Rencontre de Patricia Egard, fondatrice du site Ideasvoice, site qui aide à mettre en relation les entrepreneurs ou les porteurs de projets avec leurs futurs associés, et de Marie-Laure Voisard, coach d’Amvoilure, spécialisé dans la relation d’associés.
Patricia Egard est une passionnée de l’entrepreneuriat, elle a montée sa propre structure innovante, il y a 3 ans, anime des ateliers avec des porteurs de projets. Elle nous fait part de ses observations sur les bonnes pratiques qui permettent de réussir, dans la durée, les relations d’associés autour de projet innovants.
Comment les personnes que vous rencontrez se choisissent-elles ?
Beaucoup se choisissent car ils ont travaillé ensemble auparavant soit :
- dans une société dans laquelle ils étaient salariés,
- recrutés d’abord en tant que salariés, ils deviennent associés dans la société ou lors de la création d’une autre structure,
- comme étudiants créant et menant divers projets communs durant leur formation
- avec des relations extérieures rencontrées autour de projets.
Ces expériences facilitent la relation entre associés puisque chacun se connait dans l’action et accepte de poursuivre ensemble un projet commun.
Pour ceux qui ne se connaissent pas encore ?
L’étape de découverte de comment on fonctionne ensemble est incontournable. L’occasion peut être donnée en préparant un dossier pour BPIFrance (anciennement Oséo), pour un incubateur…
Dans les projets innovants, il ne peut s’agir que d’équipes ?
Camping, incubateur de startups, n’accueille aucun projet porté par une seule personne. C’est une équipe qui porte un projet et il est indispensable de savoir échanger, partager autour de points de vue différents, s’organiser et progresser ensemble.
Certains pensent avoir trouvé une idée « géniale » mais ils sont incapables d’accepter les critiques, les ajustements, le regard des autres car ils sont certains d’avoir raison et ont parfois la « grosse tête ». Sur les projets qui sortent d’un incubateur, il est toujours intéressant de regarder si les équipes qui les portent sont les mêmes que celles de l’arrivée.
Pour vous quel est le nombre d’associés idéal ?
Il n’est pas nécessaire d’être un grand nombre d’associés au départ. Plus on est nombreux plus les risques de désaccords augmentent. Les associés vont-ils pouvoir rester ensemble plus de 2 à 3 ans ? La plupart du temps, seules 2 personnes, le noyau dur, tiennent dans la durée parce que c’est :
- plus facile de partager les rôles,
- plus simple pour garder la motivation.
Vous dites rencontrer de nombreux étudiants porteurs de projet, y a-t-il une particularité pour cette population ?
Les étudiants sont amenés durant leurs études à créer et à mener un certains nombre de projets. Par exemple, chez Epitech, la 4ème et 5ème année, les étudiants portent souvent de beaux projets. Ils sont environ 6 dans une équipe. Les leaders peuvent avoir envie de poursuivre le projet. Or cela n’aboutira pas forcément à un projet entrepreneurial car tous les membres de l’équipe n’ont pas la fibre entrepreneuriale. Il est indispensable que l’idée plaise à tous pour une mobilisation partagée.
Sur les projets, tous n’ont pas la même maturité, pas la même notion de la constance dans la durée du projet, ni une conscience toujours très claire de leur rôle. Il n’est pas facile de motiver des étudiants si cela ne les intéresse plus. Apprendre pour apprendre ce n’est pas leur truc. Les projets devront avoir été menés jusqu’au bout avant de parler association.
C’est aussi dans ces équipes qu’ils vont avoir envie, s’ils ont une idée qui les séduit, de s’associer pour monter une société et voir si cela leur correspond. Le temps des études est une période riche en expériences et opportunités. Beaucoup sont prêts à tester, même une association, et à se démobiliser aussi rapidement si une autre opportunité leur semble plus attractive.
Quelle est la plus grande source de tensions entre associés sur un projet innovant ?
De nombreux projets innovants demandent un investissement dans le temps, pour du développement, avant de pouvoir être rentables. Des porteurs de projets n’ont pas la possibilité de salarier des techniciens et ils les prennent comme associés, ce qui permet de diminuer l’engagement financier du départ et de maintenir la motivation dans le projet. Ce qui semble une bonne idée à la base, peut créer beaucoup de tensions et de déceptions car certains sollicités par de nombreux projets ne seront jamais disponibles. Plusieurs raisons peuvent en être la cause :
- ils n’ont pas réellement fait leur choix : ils choisiront par l’expérimentation
- ils ont besoin d’une rémunération à court terme : ils privilégieront le projet qui les rémunérera rapidement
- ils n’ont pas la maturité pour savoir dire non
- ils sont dans une logique de salariés : « je fais mes heures »
- ils ont peur d’engager du temps sans retour sur investissement : la peur du risque
Alors d’après vous que faut-il faire ?
Ne pas hésiter à mettre les choses sur la table. Toutes les questions concernant le temps et les risques devront être posées, régulièrement et non une seule fois, pour permettre à chacun de se positionner dans l’aventure et expérimenter ce qui marche ou ne marche pas.
Clarifier la feuille de route à chaque étape : les attentes, la contribution, le résultat, la rétribution.
L’ensemble de ces échanges permettront de préparer, dans un deuxième temps, la rédaction d’un pacte d’associés.
Clarifier entre associés le retour sur investissement et le temps investit permet de partir sur un bon pied mais est-ce suffisant ?
Dans une startup on construit au fur et à mesure ce qui nécessite de nombreux arbitrages. Cela demande beaucoup de flexibilité et d’adaptabilité à chacun. Parfois, les associés n’ont pas d’autres choix que de gérer le projet momentanément en solution dégradée…Il faut oser expérimenter.
Oui je comprends bien l’adaptabilité mais expérimenter entre associés c’est quoi concrètement ?
Par exemple, c’est beaucoup échanger sur ce qui marche et ne marche pas. C’est accepter de tester puis de faire un bilan, puis re-tester…
Pour conclure que souhaitez-vous ajouter ?
Savoir vivre ensemble avec des associés, c’est aussi être capable d’écouter des états d’âme, des doutes. Parfois il faut savoir s’arrêter pour prendre du recul. Il y a beaucoup de dimensions à intégrer et c’est un sacré travail sur soi-même que de vivre un projet avec des associés. Les investisseurs sont rassurés par une équipe et non par une idée.
A retenir :
Pour réussir une relation dans le temps avec des associés sur un projet innovant :
- Valider la capacité à travailler ensemble
- Savoir partager ses idées pour former une équipe
- Être au clair sur le temps investi et les risques
- Oser expérimenter
- Investir dans des échanges réguliers et fréquents
- Savoir s’adapter et être flexible
- Prendre du recul
- Une particularité : les étudiants testent les opportunités
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