05/11/13
Après quelques jours sans envie d’écrire, je reprends la plume. Ce n’est pas toujours évident de trouver chaque soir, l’énergie pour écrire et partager. La période est difficile mais aujourd’hui, je reprends le récit de mes magnifiques rencontres. Je dois avouer que j’ai pris un coup. J’ai déjà marché un bon bout de route et l’affreuse météo de ces derniers jours a finit par user mes nerfs. Des heures à marcher sous la pluie. Ce matin, au bout de trois heures sous l’eau, chaque goutte est comme la pointe d’un couteau. Mon pantalon est totalement détruit, je n’ai pas d’imperméable et je dois faire face aux éléments avec des sacs poubelles. Je ruisselle. Je ressemble plus à un container percé qu’a un pèlerin.
La pluie étant continuelle, j’ai fais le choix de rester en tee shirt et de mettre le reste de mes vêtements dans des sacs en plastique. Je préfère avoir froid pendant ma marche et certain d’avoir du sec a enfiler en fin d’étape. C’est dur. Je continue et me force à chanter sous la pluie. J’y arrive un moment puis vient le temps du silence et de la souffrance. Chaque geste devient difficile. Dès que j’enlève mes mains de mes poches, c’est une aventure pour les remettre. Mes mains sont engourdis, anesthésiées. Je suis trempé jusqu’aux os. J’arrive sur une départementale qui m’indique qu’il me reste 12 kilomètres avant d’arriver à La Souterraine, mon étape du jour. C’en est trop. Après trois heures d’épreuve, je commence à faire du stop. A peine ai-je exhibé mon pouce qu’une voiture s’arrête. Un signe. Chouette. « Merci monsieur. Je suis désolé, je vais mouiller votre voiture ». « Y pas de problème, entrez ! » Merveilleux.
Cette rencontre avec Maurice va s’avérer être une rencontre formidable, un verre d’eau dans un désert.
Une fois arrivé, il me dépose devant le refuge de la ville. Je le remercie chaleureusement. Il me demande si je ne veux pas dormir chez lui. Je lui dis que c’est très gentil mais que maintenant que je suis là, je vais dormir au refuge. Il me donne son numéro, au cas ou. « Si t’as un problème, tu me téléphone et je viens te chercher ! »
Je m’installe dans un bar, où ma dégaine ne passe pas inaperçu. C’est bien simple, plus personne ne parle et je connais la couleur des yeux de tous les clients. Ils me dévisagent. Heureusement que j’ai cette coquille Saint Jacques autour du coup. Les gens ont besoin d ’être rassuré. Ce coquillage, symbole du pèlerin, leur dit que je ne suis pas un zoulou ou pire, un rom, qui viendrait voler leurs poules et violer leurs filles. Très vite, ils se dérident. La patronne s’inquiète pour son sol que je suis en train de serpillier. Malgré l’ambiance glaciale, je garde le sourire et me fait tout petit. Je téléphone au refuge. Pas de réponse. Chaque quart d’heure pendant plus d’une heure, je tombe sur le répondeur. Petit à petit, je me déshabille et enfile des vêtements secs en faisant des allers retours aux toilettes. Et puis, mon téléphone sonne. Le monsieur du refuge me dit qu’ils sont exceptionnellement fermé aujourd’hui, pour cause médicale, aye !
Tout penaud, les pieds nus et les cheveux encore mouillés, je contact Maurice et lui explique la situation. « J’arrive ! Bouge pas! » Incroyable ! Ce monsieur que je ne connais pas, va faire encore trente kilomètres pour me ramener chez lui ! Merveilleux. Quand je pense que j’ai refusé quand il m’a fait sa proposition la première fois. Comme elle est dure à apprendre cette leçon : « Fais confiance à la vie bonhomme et à ton ange gardien aussi ! Écoute quand on te parle, tu t’éviteras des complications. »
Je me suis promis d’accepter toutes les propositions que la vie me ferait pendant mon voyage et cette fois, j’ai foncé bille en tête alors que la solution était à mes côtés. En fait, j’ai refusé par pure égoïsme ! Revenir en arrière de 14 kilomètres me déplaisait. Ce que l’égoïsme nous empêche de vivre !
On croit pouvoir tout contrôler mais on contrôle que dalle ! Merci pour cette leçon. Et merci de ne jamais te lasser de mon ingratitude et de m’offrir chaque jour autant de situations pour que je finisse par comprendre, par te comprendre, toi, la vie. Je te promets que j’y parviendrais. Donne moi encore un peu de temps. Tu verras, je suis bon élève…
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