5 novembre 2013
Tunisie
Le « dialogue national » commencé le 25 octobre devait se conclure samedi dernier 2 novembre. Cette limite a été prolongée jusqu'à lundi midi pour s'accorder sur le nom d'un futur Premier ministre indépendant chargé d'organiser les élections qui ont déjà un an de retard, les islamistes d'Ennahda les retardant sans cesse.
Voici une description de la situation par le journal algérien El Watan, qui s'est révélé jusqu'à maintenant un bon observateur : les négociateurs ne parviennent pas à départager deux candidats: Mohamed Ennaceur, 79 ans, soutenu par l'opposition, et Ahmed Mestiri, 88 ans, soutenu par Ennahda. Il s'agit de vétérans de la politique, ayant été ministres sous la présidence d'Habib Bourguiba, le père de l'indépendance. L'opposition juge M. Mestiri trop faible physiquement et craint qu'Ennahda cherche à contrôler indirectement le gouvernement : Ennahda veut quitter le pouvoir par la porte et revenir par la fenêtre. Ils veulent nommer quelqu'un pour prendre les décisions à sa place, M. Mestiri n'ayant pas la forme physique pour travailler quatorze heures par jour.
Ce mardi matin, pas d’accord. Le gouvernement islamiste reste en place, mais devrait faire face à une immense déception. Comment s’exprimera-t-elle ?
Par ailleurs, l'élection des membres de la commission électorale par l'Assemblée nationale constituante (ANC) prévue samedi a été reportée dans l'attente de sa publication au journal officiel, ce qui devrait intervenir en début de semaine. Enfin, l'adoption de la loi électorale devant intervenir avant le 9 novembre est mal engagée, les travaux n'ayant pas encore débuté.
Israël n'est pas Israël pour tout le monde
Certes Israël ne fait pas partie du monde musulman, mais il n'en est pas loin, d'abord géographiquement (quand je vais en Israël, je suis toujours frappé de voir à quel point Arabes et Juifs « se marchent sur les pieds », je veux dire sont les uns sur les autres, particulièrement, mais pas seulement, dans la vieille la ville de Jérusalem). Et, comme chez les musulmans, on y observe une profonde division entre croyants ultra-orthodoxes et le reste de la population. Cette division serait même « plus profonde qu'entre Juifs et Arabes » d'après l'ancien premier ministre israélien Ehud Olmert.
Non seulement les divers partis orthodoxes sont à l'opposé des principes socialement et politiquement libéraux des fondateurs d’Israël, mais certains sont antisionistes et ne reconnaissent pas leur propre État, ce qui n’empêche pas leur hostilité envers les Arabes chrétiens ou musulmans. Comme certains de ces partis sont indispensables aux diverses coalitions, leur influence politique est importante. Par ailleurs ce sont des groupes très prolifiques et qui prennent donc une place croissante lorsque l'immigration juive de l'extérieur ralentit.
Non seulement cela ne facilite pas les négociations avec les Palestiniens, mais cela mine les soutiens internationaux du pays et notamment ceux de l'opinion juive internationale majoritairement libérale, socialement et politiquement. On se souvient de l'effet dévastateur du film « Kadosh » décrivant la condition féminine chez les orthodoxes. Le soutien des États-Unis vient de moins en moins de l'opinion juive américaine, et de plus en plus de courants chrétiens évangélistes infiniment plus nombreux (40 millions contre 6 ?) qui ont une conception idéalisée et purement biblique du mot « Israël ». On est loin du complot juif international qu'imaginent beaucoup de musulmans.
Algérie : confirmation de la candidature de Soufiane Djilali
Alors que les conditions de l'élection présidentielle de 2014 sont toujours un brouillard épais, et que le niveau gouvernemental de l'Algérie ne fonctionne plus, probablement du fait d'une incapacité physique plus forte qu'avouée du président Bouteflika, Soufiane Djilali que je vous ai déjà présenté, a confirmé sa candidature. L'absence de sondages et de moyens médiatiques pour les candidats potentiels ou déclarés ne permet pas d'apprécier l'opinion des Algériens, fatalistes vus de l'extérieur.
Algérie : le dinar plonge
Vous souvenez que les comptes extérieurs de l'Algérie sont pris en ciseaux entre la hausse des importations de toutes sortes et la baisse des exportations d'hydrocarbures du fait de la hausse la consommation intérieure. La fringale de biens importés et d'essence consommée découle de la distribution massive d'argent à la population pour éviter les troubles. Le résultat prévisible a été la baisse du dinar, au moins sur le marché parallèle (il n'est pas convertible), donc l'annulation d'une partie du pouvoir d'achat distribué.
Il est possible que la monnaie algérienne ait également été affaiblie par d'importantes fuites de capitaux, en partie du fait de l’inquiétude face à la dégradation politique, en partie pour mettre à l'abri le produit de l'importante corruption. Cette dernière est ancienne et massive, mais a été mise en évidence par le dévoilement d'un certain nombre d'affaires, peut-être pour nuire au camp de tel ou tel acteur des prochaines présidentielles.
Pour rassurer, les médias mettent l'accent sur une importante découverte de pétrole et de gaz dans la région de Ouargla. Mais sans préciser qu'il faudrait un temps certain avant qu'elle ne soit exportée et apporte des devises.
La France, l'Allemagne et l'intégration des enfants d'immigrés
Je résume ici l'étude d'Ingrid Tucci, sociologue à l'Institut allemand des études économiques (DIW Berlin).
Le système éducatif français est plus ouvert aux enfants d'étrangers que le système allemand : en France un enfant d'immigrés a plus de chances d'atteindre le bac, alors qu'en Allemagne l’orientation est très précoce et il est dirigé vers l'enseignement professionnel. Mais le résultat s'inverse alors : en Allemagne cet enfant trouvera plus facilement du travail qu'en France.
En Allemagne l'enfant d'un étranger reste un étranger, juridiquement pour beaucoup (le droit du sol n'a été introduit qu'en 2000), psychologiquement pour tous. Il s'étonne moins de la discrimination et a tendance à chercher du travail dans sa communauté. En France un enfant d'étranger est français, non seulement juridiquement mais aussi parce qu'on le lui répète à l’école. Il est donc davantage aigri par les discriminations.
La Chine et ses musulmans
L'attentat qui vient d'avoir lieu sur la place Tiananmen à Pékin et fomenté, semble-t-il par des musulmans ouïgours attire à nouveau l'intention sur l'Asie centrale chinoise.
Vous vous souvenez qu'il y a 2 sortes de musulmans en Chine : des Hans (l'ethnie chinoise) peuvent être musulmans comme d'autres sont chrétiens, et des peuples non Hans, comme les Ouïgours qui peuplent le Sinkiang, partie chinoise de l'Asie centrale et où on trouve les mêmes peuples turcophones et musulmans que dans la partie ex-soviétique.
Or non seulement la Chine n'aime pas les tentations séparatistes (cela vise aussi les Tibétains bouddhistes), mais de plus elle considère l'Asie centrale ex-soviétique comme stratégique du fait de ses matières premières et de son pétrole. Mais leur route vers les régions industrielles de la Chine traverse le Tibet et le Sinkiang. La Chine essaye donc de mieux contrôler ces régions en y multipliant les routes, les chemin de fer et les implantations de population Han. Tibétains et Ouïgours se sentent donc envahis.