Par Baptiste Créteur.
Les manifestants manifestent et, comme on pouvait s’y attendre, ils affrontent les forces de l’ordre et quelques débordements surviennent. On pouvait s’y attendre, surtout du côté des forces de l’ordre d’ailleurs : les casseurs ne sont autres que des policiers en civil.
Ce n’est pas nouveau, mais on peut tout de même se poser la question de la légitimité de telles pratiques : qu’ils cassent ou se contentent de se fondre dans la masse et jouer les agitateurs, pousser au crime et le commettre ne font pas réellement partie de la fiche de poste du gardien de la paix.
Cette vraie manipulation n’est évidemment pas acceptable pour les médias subventionnés, qui préfèrent lui substituer la manipulation des pauvres par les riches et faire des opposants quelconques au mieux des idiots utiles manipulés, au pire des réactionnaires. Mélenchon pour le Front de Gauche, et un anonyme vivant aux crochets du contribuable pour le PS, se livrent à l’exercice.
Je ressens comme un malaise, un gros malaise à entendre cet inlassable petite musique d’un ras-le-bol généralisé. […] Je suis allé à Quimper parce que je voulais écrire sur le sujet. Une fois sur place, quelques heures avant le grand rassemblement, l’article lu ce samedi matin a pris tout son sens. J’ai cru un instant que j’étais à la « Manif pour tous ». Je suis passé par le parking le long de l’Odet. Je n’ai jamais vu autant de 4×4 d’alignés. Les gens descendaient de voitures, arborant fièrement leurs bonnets Armor Lux, se prenant en photos avec leur iPhone et leurs écharpes. Ils étaient nombreux, souriants avec leur Audi, Nissan ou pick-up. Chaussés de bottes plutôt Bessec que caoutchouc. Ce n’était pas des T-shirts roses qui prônaient un papa et une maman, mais bien des bonnets rouges qui étaient vendus 5 euros. Et ça débitait les billets de cinq. Alors ensuite, oui, la foule d’anonymes est arrivée, moins souriante, plus crispée. Mélange des genres.
Je ne veux pas succomber à la tentation facile de moquer un témoignage selon lequel on peut prendre des photos avec une écharpe. En revanche, je me laisse joyeusement tenter par la dénonciation d’un amalgame évident, d’une stigmatisation éhontée : posséder iPhone et 4×4 rendrait toute manifestation illégitime, rendrait infinie la contenance du bol qui ne pourrait jamais déborder.
On tente de scinder les manifestants en deux, de distinguer manipulateurs et exploités, de faire revivre une lutte des classes qu’on rêve de voir encore déchirer la société en deux. Mais la vraie lutte aujourd’hui, c’est la lutte des castes, entre le public (les maîtres de l’État, i.e. politiciens et administration mais aussi syndicats, associations subventionnées et patrons adeptes du capitalisme de connivence) et le privé (les vrais serviteurs de l’État, qui ploient sous son poids sans provoquer le moindre battement de cils). On tente de faire planer le doute, de semer la confusion quant à ces manifestations qu’on ne parvient pas à contrôler.
D’ailleurs, ces manifestations, en plus d’être manipulées, sont réactionnaires : on se croirait à la manif pour tous. Le sweat-shirt rose devient bonnet rouge, une manifestation contre un changement sociétal à venir se fait protestation contre un changement économique déjà voté. La ficelle est grosse, mais plus c’est gros plus ça passe :
Qui est derrière ? Qui surfe sur la détresse bien réelle de ces gens ?
La question est posée : à qui profite le crime ? Qui ose utiliser une détresse réelle pour des motifs fictifs, détourner la colère légitime des opprimés pour les opprimer mieux encore ? Les odieux capitalistes.
Ce qui me choque, c’est que ce sont les mêmes qui étranglent les producteurs qui ont manifesté ce samedi. J’ai l’impression que la douleur bien réelle et parfaitement ressentie des uns est utilisée par d’autres sans scrupule afin de tirer les manettes pour gagner plus et conserver leurs marges bien juteuses.
Bretons, vous êtes donc, pour les socialistes et bas du front de gauche, des idiots, qui léchez la main qui vous bat et mordez la main qui vous nourrit. Vous êtes de gros cons.
De gros cons représentatifs du peuple de France, incapables de comprendre que vous êtes exploités par le patronat et que votre salut passe par les syndicats. Incapables de comprendre que travailler les soirs et week-ends, c’est de l’exploitation, et de remercier les syndicats qui le forcent à la place à rester à la maison. Incapables de comprendre que quand l’État vous prend le fruit de votre travail et le claque, c’est pour votre bien.
De gros cons qui n’ont toujours pas compris que les politiciens et syndicalistes mafieux n’étaient pas des parasites vivant grassement à vos frais mais une élite intellectuelle, une avant-garde éclairée qui, sans avoir jamais créé le moindre emploi, sait mieux que quiconque comment créer de l’emploi ; qui, sans avoir jamais travaillé, sait mieux que quiconque comment réguler le travail ; qui, sans être soumise aux mêmes impôts et aux mêmes règles que les autres, loue les mérites de l’impôt comme étant notre lien national. Une avant-garde éclairée qui comprend les dangers de la vitesse, des feux de cheminée, de l’encens et des boissons énergétiques. Qui comprend le danger de la menace fantôme extrémiste de droite, au point de prendre pour argent comptant des on-dit contraires aux preuves et des déclarations montées de toutes pièces, de dissoudre des groupuscules dont on découvre l’existence dans ses discours.
Une petite élite qui mérite sa rémunération, ses dessous de table et ses privilèges, et qui vous crache au visage, vous, suppôts du capitalisme qui voulez les leur enlever. Vous qui brulez les instruments de mesure de votre laisse fiscale, qui défoncez les portes de leurs forteresses de paperasse, qui osez manifester contre vos bienveillants anges gardiens, contre la puissance publique.
Vraiment, Bretons, vous êtes de gros cons. Cessez de vous laisser embobiner ; rejoignez les manifestations authentiques organisées par les professionnels de la mobilisation authentique, prenez part au cortège saisonnier de lycéens ou victimes de plans de licenciement. Ne soyez pas petits-bourgeois ou prolétaires, ne cherchez pas à déstabiliser le gouvernement socialiste qui ne peut être que juste parce qu’il est socialiste ; si vous étiez éclairés, vous manifesteriez pour payer plus d’impôts, et d’ailleurs vous donneriez tout, le fruit de votre travail et votre patrimoine, à la cause socialiste. Vos tracteurs serviront à ériger des monuments à la gloire de l’égalité, vos terres à faire pousser les roses de leur inauguration. Et si vous le faites de vous-mêmes, si vous acceptez votre servitude, n’êtes-vous pas libres après tout ?