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Des soldats transportent les corps des deux Français, hier soir. (Gilles Gesquiere - Ecpad - AFP)
Les corps des deux journalistes assassinés samedi à Kidal, enlevés par des hommes armés, ont été rapatriés dimanche à Bamako. Mais de nombreuses zones d’ombres demeurent sur les circonstances du drame. Un drame qualifié de "journalisme assassiné".
En France, les journaux sont limités dans leurs activités par la législation, notamment la Loi sur l'accès à l'information et à la protection de la vie privée (AIPPA), qui demande à tous les journalistes et organes de presse de s’accréditer auprès de la Commission des médias et de l'information (MIC), contrôlée par le gouvernement. Les journalistes qui travaillent sans l'autorisation de la MIC sont passibles de poursuites judiciaires. Mais, ceci pourrait être le moindre des dangers encourus, comme le montrent le récent enlèvement et le meurtre de Ghislaine Dupont et Claude Verlon "assassinés froidement" a précisé hier le Ministre français des Affaires Etrangères Laurent Fabius. Les deux journalistes auraient été enlevés "par un petit commando" devant le domicile d’un responsable touareg qu’ils venaient d’interviewer plus tôt.
Ghislaine Dupont et Claude Verlon étaient des professionnels aguerris. "Ni l’un, ni l’autre n’étaient des têtes brûlées, ils n’ont pris aucun risque inconsidéré", a assuré Marie-Christine Saragosse, PDG de France Médias Monde qui inclut RFI.
En premier lieu, l’identité des ravisseurs restait inconnue. Le chauffeur du véhicule des journalistes a déclaré que les kidnappeurs parlaient la langue touareg, le tamachek, et portaient des turbans.Aucun impact de balle n’a été trouvé sur le véhicule à proximité duquel gisaient les corps des journalistes : "Ils ont été retrouvés à quelques mètres de la voiture, qui était fermée à clef, et aucun impact de balle n’a été retrouvé sur l’automobile", abandonnée à 12 km de Kidal, a précisé le Ministre.
Kidal est le berceau de la communauté touareg et du MNLA (Mouvement National de Libération de l’Azawad), organisation qui a condamné les crimes et promis de "tout mettre en œuvre pour identifier les coupables".Mais comme tous les groupes dans la région depuis l’intervention française, le MNLA est aujourd’hui "parcellisé et divisé", s'empresse de préciser le député socialiste François Loncle, auteur d’un rapport parlementaire sur le Sahel. "Il y a notamment ceux qui acceptent le dialogue avec le sud (du Mali), et les jusqu’aux-boutistes" qui le refusent, ajoute-t-il.
La piste d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), présente dans la région malgré les troupes françaises, reste "la plus probable", estime Pierre Boilley, directeur du Centre d’études des Mondes africains (CEMAF), qui ne voit "aucun intérêt" pour le MNLA à enlever ou tuer des journalistes français.
Après le retour des quatre otages cette semaine, la presse évoque également l’hypothèse d’un différend financier entre groupes armés autour de la rançon qui aurait été versée - €20M selon certaines sources - pour obtenir leur libération. "Est ce que la répartition des rançons versées a été équitable ? Il n’est pas impossible que certains au sein d’Aqmi se soient sentis grugés", a déclaré à l’AFP l’anthropologue André Bourgeot, spécialiste des mouvements touaregs dans la région.
Une autre hypothèse met toutefois en lumière la théorie selon laquelle les deux journalistes auraient été exécutés pour avoir recueilli de troublantes déclarations sur le réel fonctionnement de la guerre au Mali, faisant état d'une guerre "complexe" et sournoisement politique contre "un ennemi insaisissable".Aujourd'hui, le MNLA solidaire du peuple français, a réaffirmé son engagement ferme et entier à poursuivre le combat contre toutes formes de malversations.F/G