Je pense être un type finalement assez irrécupérable. Figurez vous, en effet, que, lors du Festival Lumière 2013 qui s'est achevé il y a maintenant une quinzaine de jours, un festival qui, comme de coutume, mettait en avant tout un tas de films différents qui ont compté dans l'histoire du cinéma et provenant d'horizons géographiques très variés, des USA à la Russie en passant par la suède d'Ingar Bergman, les quatre séances à laquelle j'ai choisi d'assister mettaient toutes en avant le.....cinéma français des quarantes dernières années!!
En effet, après "Un singe en hiver", film présenté lors de la géniale cérémonie d'ouverture, et avant l'avant première de "Belle & Sebastien" de Nicolas Vanier (dont je vous reparlerai, je l'espère, quelques temps avant sa sortie salles le 18 décembre prochain), les deux autres projections auxquelles j'ai assisté concerne un acteur phare du cinéma français populaire, l'immense et génial Pierre Richard.
Pourquoi Pierre Richard? Tout simplement parce qu'il est unique à mes yeux, et aux yeux, du reste de pas mal de spectacteurs de ma génération et des anciennes aussi me semble t-il ( plus d'ailleurs vu la quantités de têtes blanches dans les deux projections auxquelles j'ai assistées). Ses rôles de distrait et de réveur dans les étoiles, ont fait de lui un vrai comédien populaire, apprécié de tous, quelque soit son milieu social ou son degrès de cinéphilie. Et j'avais pu mesurer, lors de la soirée d'ouverture, qu' à l'applaudimètre, l'arrivée de Pierre Richard sur grand écran était quasiment du même niveau que celle de Belmondo ou de Tarantino, les deux stars de la soirée.
Personnellement, j'ai toujours eu une tendresse infinie pour Pierre Richard, ne serait ce que déjà parce que, physiquement, il m'a toujours énormément fait penser à mon père, même si la maladresse légendaire qu'il trainait dans tous ses film le rapprocherait plus de....moi!! Enfin, je veux surtout parler du "moi" de ma jeunesse, l'être terriblement malhabile et tête en l'air, qui collectionnait les bleus et les échymoses à force de m'éclater la figure par terre....Maintenant, je continue évidemment toujours d'être un peu lunaire et maladroit, mais je tombe quand même un peu moins souvent, fort heureusement ( mais mes enfants semblent malheureusement reprendre un peu le flambeau)!!
Et du reste, si j'ai beaucoup regardé les films de Pierre Richard pendant ma jeunesse (mes parents étaient de grands fans), cela faisait bien plus de 20 ans que je n'en avais pas revisionné un, et cet hommage à Pierre Richard prévu par le Festival était donc l'occasion idéale de me replonger dans l'univers poétique et hilarant de cet illustre comédien français. Un comédien, qui est venu plusieurs jours sur Lyon pendant la durée du Festival, afin d'y présenter 4 de ces films, et dont 2 que j'ai pu revoir avec grand plaisir, "Le Grand Blond avec une chaussure noire" (encore que celui ci , je me suis demandé pendant toute la vision du film si je l'avais déjà vu une fois ou uniquement quelques extraits), ainsi que "La Chèvre", que, pour le coup , je suis sur d'avoir déjà vu au moins 3 ou 4 fois à la télé.
Car évidemment, Pierre Richard étant un comique populaire, on pourrait se demander quel intérêt il y a à voir sur grand écran ses films dans le cadre d'un Festival dont une des premières particularités est plus de dénicher de petites merveilles méconnues ou de remettre le curseur sur un grand cinéaste un peu oublié, et, incontestablement, les films de Richard ne sont ni l'un ni l'autre!!
Mais comme l'a très bien relevé Nicolas Seydoux, le président de Gaumont invité à s'exprimer avant la projection du Grand Blond, revoir ces trésors du cinéma populaire français dans une salle comble et avec des gens qui rient en même temps que nous aux pitreries de Pierrot n'a pas du tout la même saveur que si on les voit seul derrière son petit écran. Sans parler de la qualité de ces copies, toutes remasterisées, qui nous changent de ces copies toutes "craquelantes " et vieilliottes diffusées sur le petit écran.
Si c'est Seydoux qui présentait le film d'Yves Robert, j'ai quand même pu voir de près Pierre Richard lors de sa présentation, de "La chèvre" , le grand classique de Francis Weber réalisé en 1981, son premier film de la trilogie du buddy movie avec Gérard Depardieu, une trilogie qui connaitra un succès critique absolument énorme.
Et l'artiste a rappelé au public ici présent à quel point, dans son cinéma, celui qu'il a réalisé mais aussi celui qu'il a tourné pour Yves Robert, Francis Weber ou d'autres, le gag visuel prenait une place prépondérante. Ses maitres incontestés, ceux qui lui ont servi de référence ultime, sont "Buster Keaton, Charlie Chaplin, Jerry Lewis et Jacques Tati, bref tous ceux qui ont fait du burlesque, un genre avec lequel il s'est senti spontanément le plus proche».
Ce qui est paradoxal pour moi, c'est qu'au départ, ce genre d'humour n'est pourtant pas forcément ma tasse de thé, moi qui suis plus comique de mots que de situations.. Mais en voyant Pierre Richard faire ses pitreries sur un écran, j'oubliais mes inclinaisons et démarrais au quart de tour et rit à gorge déployée. Je ne saurais trop expliquer pourquoi, peut -être car il était plus aisé pour moi de m'identifier à lui et à son coté monsieur tout le monde qu'aux acteurs américains du cinéma muet en noir et blanc.
En tout cas, j'ai découvert (ou redécouvert je n'aurai pas donc réussi à trancher) ce "Grand Blond avec une chaussure noire", ce classique de la comédie française du début des années 70, cette parodie somme toute très réussie des films d'espionnage. Ce qui fonctionne parfaitement dans cette excellente comédie, c'est le quiproquo sur lequel il se base: un violoniste insignifiant est suivi à la trace par une équipe d'espions des services secrets. Bien qu'ignorant ce qu'il se trame, le musicien va dérouter progressivement ses adversaires, pour la plus grande jubilation du spectateur.
Il faut dire que le casting de ce film contribue pour beaucoup à cette jubilation : Mireille Darc (avec sa fameuse robe coupée au dos, voilà typiquement une des scènes que je connaissais par coeur car elle est repassée maintes et maintes fois), Jean Rochefort, Jean Carmet, en benet cocu, Bernard Blier, ect sont tous formidables… Mais, évidemment, puisque c'est ce qui nous intéresse dans ce présent billet, c'est avec ce film que Pierre Richard fut révélé complètement au grand public et c'est ici que l'on allait voir naître son personnage récurrent de gaffeur sympathique, étourdi et romantique. Richard excellait déjà totalement dans ce rôle de monsieur tout le monde, un peu maladroit, à qui il lui arrive des aventures incroyables, malgré lui.
Et concernant le second film que j'ai vu de lui durant ce festival, quel bonheur de revoir La Chèvre en salle et de rire de concert avec une salle comble, en présence du génial comédien. "La Chèvre" est en effet une comédie indémodable, avec des dialogues hilarants et un vis comica imparable, faisant la part belle à ce duo comique parfaitement dissemblable qui fonctionne comme sur des roulettes .
Car l'idée de génie de Francis Weber est quand même d'avoir réuni ces deux comédiens qui jouaient dans des cours totalement opposés à l'époque, Pierre Richard et Gérard Depardieu (bien plus sobre que dans ses rôles récents), pour former ce duo détonnant de drôlerie et de complicité. Et le film recèle quantités de scènes cultes (les sables mouvants, Perrin piqué par une guêpe, la paille dans le nez) dans lesquelles le comique de Pierre Richard touche ici à la perfection.
J'ai tellement aimé revoir le film en salle que je suis allé dès le lendemain le prendre à ma médiathèque pour le montrer à mes enfants, et ceux ci se sont également régalés et esclaffés aux gaffes et aux maladresses de l'incorrigible Pierrot, par contre, j'ai un peu ramé lorsqu'il a fallu leur expliquer les scènes avec les prostituées dans le bordel )... Depuis mes loustics ont du revisionner le film 6 ou 7 fois et continuent de d'esclaffer...je l'aurais bien revu avec eux, mais j'ai d'autres films à voir, moi et des chroniques à faire aussi!!
Ce qui est certain, c'est ce que ce passage de relais réussi à ma progéniture est donc la preuve ultime que l'humour de Pierre Richard traverse admirablement les générations et que ses films pourraient tout à fait repasser au Festival Lumière dans 50 ans, si bien sur, celui ci existe encore!!
Pierre Richard, entretien post-it Télérama
En bonus de mon billet, je vous offre un entretien original et passionnant proposé par Télérama à découvrir!!