Personnage imaginaire, ZAKARIA BOUALEM est devenu le héros incontournable d’une certaine jeunesse marocaine depuis son apparition dans les colonnes de TEL QUEL en 2002.
Et je la comprends : cette espèce d’anti-héros est le prototype du jeune provincial installé confortablement à Casablanca mais qui aspire à mieux et à plus sans se donner la peine de faire ni mieux ni plus.
Vous avez dû surement, dans le cours de votre vie réelle, croiser ou avoir eu affaire à Zakaria Boualem, sans le savoir.
Sous le clavier de Réda ALLALI, chaque semaine, les “jeunes cadres dynamiques” s’arrachent les aventures – souvent les mésaventures et le plus souvent la simple vie – de ce jeune natif de Guercif – localité posée par la grâce de on ne sait trop qui au-delà de Taza, sur la route d’Oujda. Autant dire nulle part!
Bien sûr, la plupart se reconnaissent en lui.
D’autres le gaussent et lui reprochent, sans pourtant une dose d’envie, sa capacité de râler à propos de tout et de rien!
Certains sont ébahis face à son énergie à tout dénigrer, tout critiquer, tout saboter.
J’ai lu quelques unes de productions de Réda Allali; Parfois, il m’arrivait de ne lire que cela dans les numéros de Tel Quel.
Parfois riant jaune, d’autres fois vraiment amusé, souvent pas pris du tout par le délire de Allali, j’ai toujours trouvé un certain charme dans son style.
J’aime les textes écrits dans une langue étrangère par des marocains pour les marocains : il faut une grande maitrise de la langue pour arriver à cela. Et Reda Allali maitrise parfaitement la langue de Molière.
Tout comme il maitrise également la psychologie d’une partie de la population de ce pays, notamment cette jeune bourgeoisie casablancaise, celle qu’ailleurs on qualifierait de “bobos” : les bourgeois-bohème.
Jeunes relativement aisés, à l’abri des besoins quotidiens après des années d’études, se déclarant plutôt de gauche, quand il s’agit de grands problèmes touchant à l’idéologie mais très attachés à leurs propres privilèges, par ailleurs chèrement acquis, les fans de Zakaria Boualem ne peuvent le renier.
Depuis 2002, Reda ALLALI a écrit plus de quatre cents chroniques sur son héros : il en a choisi une centaine pour une édition groupée, sous le titre : “Zakaria BOUALEM, tentative de classe moyenne avortée dans un pays du tiers monde“, co-édité par TEL QUEL et CASA EXPRESS EDITIONS et paru en février 2012.
Tant qu’à faire, l’édition aurait pu être plus soignée : et c’est bien dommage! Un livre reste un livre et mérite qu’il soit traité comme tel!
Mais ne donnons aux futilités plus d’importance qu’elles n’en ont : Reda Allali marque par ce recueil son entrée dans le monde es livres.
D’autres avant lui, et avec beaucoup moins de talent et de modestie, ont tenté le coup et l’ont lamentablement raté.
Alors, si vous n’avez pas eu l’occasion de sourire ces derniers jours, feuilletez ce petit bouquin : vous ne serez pas d’accord sur tout, mais je vous garantis que vous y retrouverez un peu de vous-mêmes, qui que vous soyez et un peu des gens qui vous entourent.
Cela semble assez élémentaire, mais cela nécessite un talent rare d’observateur critique d’un certain Maroc d’aujourd’hui.