Le monopole de la sécurité sociale a-t-il vraiment sauté ?
Publié Par Alexis Vintray, le 3 novembre 2013 dans SantéRappel de quelques vérités qui fâchent les libéraux sur la fin du monopole de la sécurité sociale.
Par Alexis Vintray.
Ici ou ailleurs, des chroniqueurs aux avis radicalement divergents se sont déjà affrontés, arguant pour les uns que le monopole de la sécurité sociale avait déjà sauté, pour les autres, qu’il était encore d’actualité. Je n’ambitionne pas de faire mieux qu’eux, n’ayant ni la formation juridique nécessaire ni le temps de rentrer dans des textes juridiques pour le moins abscons. Je me contenterai de quelques remarques de bon sens.
Qu’on le veuille ou non, le droit reste univoque
À l’appui de leur thèse sur la fin du monopole de la sécurité sociale, Claude Reichman, le MLPS (Mouvement pour la liberté de la Protection Sociale) et ses partisans citent différentes décisions, qui ont toutes en commun de n’être liées que de loin au sujet du monopole de la sécurité sociale. Voir cet exemple récent sur Contrepoints. Pourtant, aucun jugement n’a jamais été rendu reconnaissant clairement la fin du monopole, et aucun « libéré de la sécu » n’a jamais gagné sur le fond (voir plus bas). L’article pourrait s’arrêter ici !
Personne n’a jamais été condamné pour avoir incité à quitter la sécu. Et alors ?
Le code de la sécurité sociale continue à prévoir expressément diverses sanctions (article L 114-18 du code de la sécurité sociale) pour qui inciterait « à refuser de se conformer aux prescriptions de la législation de sécurité sociale, et notamment de s’affilier à un organisme de sécurité sociale ou de payer les cotisations et contributions dues ». Un texte rappelé par la sécurité sociale dans un communiqué de presse paru fin octobre et qui vise directement Contrepoints, mains sans nous citer.
Certes, personne ne semble avoir été poursuivi à cause de ce texte. Interrogé par Contrepoints, Claude Reichman estime que c’est un « sabre de bois : inutile de vous dire que cette loi, radicalement contraire aux dispositions communautaires, ne m’a jamais été appliquée car elle aurait fait immédiatement l’objet de sanctions européennes. » Une absence de poursuites contre les dissidents qui est confirmée en creux par Alexandra Béchard, du service de presse de la Direction de la sécurité sociale (Ministère de la santé et des affaires sociales), qui nous a répondu : « en l’état, nous ne disposons pas d’éléments sur le nombre d’actions intentées par les organismes de sécurité sociale sur ce fondement. » Lire entre les lignes « aucune poursuite à ce jour ».
Mais interpréter cette absence de poursuites comme une reconnaissance implicite de l’illégalité du texte est tout autre chose. Ce n’est pas parce que je ne tire pas avec mon arme que c’est une arme factice… On aimerait croire la belle histoire selon laquelle le texte ne sera jamais appliqué mais, au vu de la violence de l’appareil d’État quand il se sent menacé, il y a tout lieu de craindre le contraire voire pire.
Le combat des libérés de la sécu est un combat sur la forme, pas sur le fond
Comme le montre bien le témoignage régulier et courageux de Laurent C. depuis un an sur Contrepoints, le chemin de croix de ceux qui essaient de quitter la sécu est un combat qui consiste essentiellement à se rendre insaisissable (en mettant tous ses biens au nom de son conjoint ou à l’étranger) et à contester méthodiquement chacune des décisions de justice, qui vous donnent immanquablement tort, avec les lettres recommandées qui s’imposent, dans les délais prévus par la loi. Et pas du tout un combat sur le fond, en espérant convaincre un tribunal de la fin réelle du monopole.
Sur le fond, personne n’a jamais gagné et obtenu un jugement reconnaissant le bien-fondé des arguments sur la fin du monopole. Au mieux, les « libérés de la sécu » obtiennent que les organismes de sécurité sociale, par lassitude ou impuissance (insaisissabilité) abandonnent leur combat.
Le combat pour la liberté de choix de son assurance maladie est pourtant un combat juste
En dépit de ces objections, le combat pour la reconnaissance de la liberté de chacun de choisir sa propre assurance-maladie est un combat juste et parfaitement libéral, que notre journal défend et défendra avec ardeur. Mais il reste un combat qui n’est pas du tout gagné et doit être mené avec les bonnes armes. Il reste du chemin.
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