L’un avait regardé la télévision,
l’autre avait lu un livre. Peu avant vingt-trois heures ils avaient décidés
sans se concerter, qu’il était temps d’aller dormir. Ils se sont embrassés et
souhaités bonne nuit, leurs baisers se sont prolongés, ils y ont ajouté
quelques caresses, se sont enlacés, leurs bouches et leurs mains parcouraient
sensuellement le corps de l’autre.
Les murs ont tremblés une
première fois sans qu’ils ne s’aperçoivent de rien, la première secousse était
si faible et leur amour si fort.
Ils poursuivaient leur étreinte et
se susurraient des mots d’amour à l’oreille quand les murs de la ville entière
ont tremblés une seconde fois. La seconde secousse était si forte.
La nuit entière et les jours
suivants les pompiers venus de toute la région et des régions voisines tentaient
de dégager des survivants de la catastrophe, les associations humanitaires
distribuaient vivres et couvertures, les caméras du monde entier envoyaient aux
chaînes de télévision des images diffusées en boucle.
Quelques jours après ce que les
sismologues qualifiaient déjà de plus grande catastrophe jamais enregistrée sur
l’échelle de Richter, une petite fille de sept ans fut retirée vivante des
décombres. Tout le monde se réjouissait de cette miraculée.
Le bilan humain était lourd, de
nombreux disparus gisaient sous les gravats devenus des sarcophages de bêton.
Le séisme aurait eu lieu à dix-huit
heures, que des hommes et des femmes auraient été surpris dans leurs voitures
en rentrant du travail. A dix-neuf heures les familles auraient été réunis,
certains dînant, d’autres écoutants leurs enfants réciter leurs leçons.
A Vingt-trois heures pour que la
terre tremble c’est une bonne heure.
Les recherches se sont arrêtées sans que personne n’ait jamais retrouvé un homme et une femme dont la dernière
action sur la terre fut de s’offrir mutuellement du plaisir en se parlant d’amour.