Montebourg, donneur de leçon, s’en prend à l’Allemagne
Publié Par Thibault Doidy de Kerguelen, le 30 octobre 2013 dans PolitiqueLors d’une intervention au Medef, Arnaud Montebourg a fustigé pêle-mêle l’Allemagne, l’euro fort et les politiques d’austérité en Europe.
Par Thibault Doidy de Kerguelen.
C’est la faute à l’Allemagne !
Monsieur Arnaud Montebourg, le ministre du « Redressement productif », probablement parce qu’il n’a pas redressé grand chose pour l’instant, nous a gratifié hier mardi 29 octobre d’une de ses saillies dont il a le secret. Après la coréanophobie, la sinophobie, l’indianophobie (qui nous a coûté le premier marché de Rafales signé), l’américanophobie, le voici maintenant dans le registre que l’on croyait à jamais oublié d’une époque sombre de notre histoire, celui de la germanophobie.
Dans la série « c’est la faute à tout le monde sauf à moi… », le ministre a profité d’une intervention au Medef pour fêter à sa manière le 20e anniversaire du traité de Maastricht.
C’était le bon temps quand on pouvait dévaluer comme on voulait…
Bon sang ne sachant mentir, le marxiste devenu ministre nous a gratifiés d’une de ces affirmations péremptoires et idéologiques qu’il affectionne particulièrement : « La monnaie est un outil mercantile, sous manipulation politique qui n’appartient pas aux banquiers centraux. » Puis, enchaînant sur la monnaie européenne : « L’euro n’appartient pas à l’Allemagne. Il appartient à tous les membres de la zone euro. Et nous en avons une part de propriété et nous avons à dire les choses. »
Le chemin étant tracé, il poursuivit : « L’Union européenne, c’est la dureté monétaire et la dureté budgétaire », « Qui peut dès lors s’étonner que l’UE soit aujourd’hui en situation de récession quand toutes les régions du monde connaissent ou reconnaissent la croissance ? »
Le monde entier contre Montebourg…
Ainsi donc, si la France connait la crise, c’est de la faute des Chinois qui sous-paient leurs salariés, des Coréens qui travaillent trop, des Indiens dont le patronat est avide, des Américains qui sont cupides, des Allemands qui veulent absolument confier l’Euro à une banque centrale et pas au gouvernement français. Voilà la haute pensée politique de notre ministre.
Le fait que l’Allemagne dispose de la même monnaie, s’impose la même rigueur et ne soit pas dans la même situation semble totalement échapper à notre révolutionnaire en herbe. Que dis-je, le fait qu’il y a 20 ans l’Allemagne était le malade de l’Europe et qu’aujourd’hui, malgré les crises, le coût de la réunification et… l’Euro (car n’oublions pas que l’Euro coûte très cher à l’Allemagne qui est obligée d’être solidaire des pays qui, comme Monsieur Montebourg, croient que « la monnaie est un outil mercantile sous manipulation politique… »), elle soit la première puissance européenne, le premier exportateur mondial semble tout à fait échapper à notre grand penseur…
L’Allemagne paiera !
Cherchant à étayer son attaque frontale de l’Allemagne, le ministre a cité un rapport d’il y a quelques mois du Fonds Monétaire International (FMI), qui demandait une politique monétaire plus souple en zone euro. « Ce qui m’amuse un peu, c’est que même le FMI le dit. Vous voyez un peu le gauchisme très dangereux du FMI », a-t-il ironisé, occultant le fait que le FMI n’a jamais demandé que la monnaie passe sous contrôle politique, ne connaissant que trop la probité des politiques européens et leur souci de la gestion de la monnaie, comme l’histoire nous l’enseigne.
M. Montebourg a aussi évoqué le commissaire européen à l’Industrie, Antonio Tajani, qui aurait dit que « l’euro était trop fort » lors d’une réunion la semaine dernière à Bercy. Information que le ministre a ponctué d’un « La Commission européenne s’intéresse enfin aux vrais problèmes » péremptoire.
Même Stiglitz, il est d’accord !
Le stagiaire ayant écrit son intervention, sachant ménager ses effets, avait gardé pour la fin la citation-choc. S’en prenant pour finir à l’ « austérité » (mot tabou rejeté aussi bien par les politiques que par le peuple et par les employeurs devant lesquels s’exprimait Arnaud Montebourg), le ministre cita un article récent du prix Nobel d’Économie Joseph Stiglitz : « Aucune économie n’est jamais revenue à la prospérité avec des mesures d’austérité. C’est une leçon de l’histoire. »
Si bien sûr la rigueur budgétaire et la rigueur de gestion de l’argent public sont cataloguées « austérité », alors quel beau détournement de sens que l’utilisation de cette phrase de Stiglitz ! En tous cas, entendre ce « grand économiste » qui avait, en son temps, assuré que Fannie Mae et Freddie Mac ne présentaient aucun risque de défaillance et que l’ancien Président Nicolas Sarkozy avait appelé au chevet de la France (avec les résultats que l’on sait…), cité aujourd’hui par Arnaud Montebourg pour appuyer ses propos m’a personnellement presque autant fait rire qu’une bonne citation d’Attali ou de Minc !
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