Vous l’aurez compris, ce recueil de nouvelle a fait le choix de l’horreur et du sanglant. Il ne s’agira pas tellement ici d’avoir peur que de détourner le regard devant l’insoutenable. On s’applique à vous décrire comment découper les chairs, sectionner les muscles, glisser une agrafe sous un ongle. On vous raconte comment on plante un couteau dans la chair, comment le sang coule goutte à goutte et se répand, comment les entrailles s’exposent ou comment les dents se plantent dans les muscles. Ca vous dégoûte? Je pense que c’est bien l’objectif. Et je pense qu’un gros risque d’overdose vous guette avec ce recueil. Car prise une à une, ces nouvelles sont pleines de qualités. Les descriptions de psychopathes mettent mal à l’aise et fascinent tant l’inventivité et le sang-froid du personnage sont frappantes. Les univers glauques dans lesquels se retrouvent Rosy ou notre amnésique font aussi leur petit effet. Quant à Jeanne ou à notre habitante de la rue, on ne peut s’empêcher, de manière inattendue, de compatir et de comprendre les extrémités auxquelles elles sont réduites.
Mais nouvelle après nouvelles, toutes s’appliquent à être les plus sanglantes, les plus écoeurantes possible, et j’ai parfois eu l’impression de relire encore et encore le même massacre gratuit. Un peu comme en regardant les films du genre Saw: c’est gore, c’est sanglant, mais à la fin, du gore pour du gore, l’intérêt se perd. Et c’est dommage, parce que cet effet de surenchère mis à part, beaucoup de nouvelles exploitent à merveille l’art de la chute qui vous laisse bien sur les fesses, ou encore marient à merveille l’horreur avec une peur sourde, une véritable tension. Mes préférées? Je voterai pour “L’ombre du mal”, peut-être la plus dégoutante mais aussi la plus travaillée quant à la tension et à l’originalité, et “La rue”, qui a réussi à me faire basculer du côté de l’héroïne.
La note de Mélu:
Des qualités, mais un registre qui mériterait d’être précisé. Merci à Elodie Morgen et aux éditions des Tourments pour leur confiance.