photo : Ahmed Sbai
La chronique démocrate de Florian Zwojsczyki
Episode 3 : Ode à l’amour d’Aubagne
Nous ne sommes plus étonnés. Racisme ambiant. Violences de classes. Capitales de nos douleurs. Comment voulez-vous être politiquement déterminable dans un monde en fuite ? Comment rattraper de peu ce factuel, ce désordre idéologique, quand ici ou là, on brouille les pistes, on enclave les peines, on sert les poings sans once de convictions ?
Ce qui nous reste, ce sont nos choix. Ce qui nous reste, ce sont nos luttes. Quotidiennes, vaines ou immortelles. J’entends ici le chant des Fralib comme une cigale qui emmerderait la terre entière. Salut Unilever. Non, je ne vais plus acheter les produits honteux de ton siècle périmé.
J’accoste la révolte. Je la sens s’enfuir du mauvais côté, là où la flamme vampirise le sang de l’ouvrier. Le drapeau rouge a vieilli mais j’aperçois au loin l’Arc-en-ciel. Il n’est qu’une idée. Il n’est qu’un chemin. Fou l’homme qui prétendra l’avoir atteint.
Je parcours la métropole, entrelacé du vide qu’elle répand. Les vastes comédies ont toujours des acteurs. Sur ses chaises il y aura toujours du pouvoir à prendre.
Et derrière, le même regard. Celui qui n’y croit plus mais vous donne encore sa confiance. Il repose un peu de son désespoir dans votre urne. On ne souffrira pas à sa place. Mais dans son geste il y a toute l’ambition du monde.
Qui sait. Celle de prendre un bus sans chercher une pièce dans sa poche. Celle de voir du Picasso en rentrant chez lui. Celle de se sentir considéré tout simplement.
Quelque chose doit nous guider. Ce lien qui nous uni, c’est la foi que nous mettons en un tout petit point de l’univers. Ce point, c’est Aubagne. Cette force que nous avons, cet amour, nous nous devons de le conceptualiser.
Il paraît que certaines avenues ont un sens[*], ont un visage, ont un passé. Si l’on y pense bien, rien n’empêche qu’un jour, une nouvelle puisse s’appeler l’Amour d’Aubagne, tout simplement.