Sa dernière soirée. Il a laissé sa maîtresse en lui laissant entrevoir un futur à leur histoire. Il a vu ses
Sa femme s’est endormie depuis longtemps, son cerveau tranquillement emmailloté par la douce chimie des somnifères qu’elle prend depuis des années. Sur leur terrasse qui domine les toits parisiens, il savoure une cigarette en même temps que ce paysage qu’il aime, qu’il a du mal à quitter malgré tout. Les immeubles, les fenêtres comme des yeux lumineux, témoins de ces vies semblables ou non à la sienne, ces yeux pleins de mystère puisque l’observateur n’arrive jamais à savoir ce qui s’y trame même s’il a l’occasion d’apercevoir une silhouette en train de se faire à manger, en train de parler avec une autre silhouette, d’étendre une machine, de téléphoner, de vivre. Il espère, pris soudainement d’une empathie envers le monde entier, qu’à travers ces fenêtres les existences sont heureuses. L’une d’elles s’éteint – il commence à être tard. Les cheminées recrachent un peu de fumée dans l’air orange, à moins que ce ne soit une brume légère que l’automne offre enfin. Il aime le ciel orange, car la nuit alors se prend pour un jour apocalyptique ; il y a quelque chose de surnaturel dans ce ciel orange de Paris, comme si la cité l’ensorcelait pour qu’il ne dorme pas. La fraîcheur de l’air, associée à la frénésie du départ qu’il a dû refouler depuis plusieurs mois, plusieurs jours, le maintient éveillé. Il fait mentalement défiler tous les éléments dans le ciel orange. Les valises. Les billets de train. Les papiers d’identité jetés dans un coin impossible à trouver. Sa coiffure. Ses tenues. Ses billets.