A une station d'essence Shell de Washington, une demi-douzaine de fidèles, les mains jointes et la tête courbée, prient avec ferveur pour que le prix de l'essence redescende.
"La semaine dernière à cette station, le gallon (3,78 litres) d'essence était à 3,51 dollars. Maintenant il est pratiquement à 3,60 dollars, cela fait 9 cents de plus en une semaine", s'exclame Rocky Twyman, qui a fondé la semaine dernière le groupe "la Prière à la pompe" pour implorer le ciel de faire baisser les prix.
"Seigneur tout puissant, viens à nous et donne-nous de la force pour que nous fassions baisser ces prix de l'essence trop chers", déclame M. Twyman, suivi par de fervents "amen" de ses acolytes.
"Mon Dieu, les prix ont monté à cette pompe depuis la semaine dernière. Nous savons que tu es capable, que tu as tous les pouvoirs du monde", continue-t-il avant que ses compagnons -- une ancienne Miss Washington, un petit entrepreneur, et deux bénévoles à la soupe populaire locale -- entonnent un chant: "Nous aurons une baisse de l'essence, nous aurons une baisse de l'essence !".
"La prière est la réponse à tous les problèmes. Nous appelons Dieu pour qu'il intervienne dans la vie de ces gens égoïstes et avides qui font monter les prix", explique-t-il.
Selon lui, avec la hausse des prix de l'énergie, "il y en a qui font beaucoup d'argent et c'est très, très mal".
Le week-end dernier, Rocky Twyman était à la tête d'un groupe de 200 personnes en prière devant des pompes à essence de San Francisco où le gallon atteint presque 4 dollars.
Pour Judy Dugan, de l'organisation de consommateur Consumer Watchdog, certains Américains en viennent à invoquer Dieu parce que le gouvernement ne semble pas se préoccuper de la flambée des prix: "C'est ce que vous finissez par faire quand vous n'avez personne à vos côtés et les consommateurs n'ont pas le gouvernement américain à leur côté, pour sûr".
Lors d'une audition jeudi au Congrès, élus et experts ont dépeint un sombre tableau des conséquences de la hausse des prix de l'essence et de l'alimentation, la plus forte depuis 17 ans.
Les Américains sont contraints d'adopter "un régime de récession", a déclaré la parlementaire Carolyn Maloney, soulignant que les ménages modestes remplaçaient désormais viande, poisson et légumes par des pâtes et des conserves.
Marcia Frazier-Foster a rejoint le groupe de prières parce que chaque jour elle fait un trajet de 53 km pour aller travailler: "Le coût de la nourriture a tellement augmenté. Ce qu'on nous donne à la banque alimentaire diminue. Le prix de l'essence a flambé et je dois dépenser plus pour mon trajet".
"Et pourtant, personne dans les hautes sphères n'est vraiment préoccupé par la hausse des prix de l'essence. Le président Bush ne croit même pas que nous soyons en récession", se plaint-elle avant de répéter les prières du guide: "ces prix vont tomber de la même manière que les murs de Jéricho sont tombés dans la Bible".
Par Karin ZEITVOGEL
AFP