Ce programme réunit une centaine de chercheurs qui travaillent de manière interdisciplinaire. Ils, et elles, sont historiens, sociologues, juristes, politologues, médecins, psychiatres, pédagogues, ethnologues ou géographes.
Les 37 projets de ce programme abordent des thèmes tels que : travail social et politique; pratiques scolaires et voies de formation; représentations et modèles de santé; emploi, travail salarié et protection sociale; constructions de l’identité et de la différence ou encore espaces publics et positionnement social.
Parmi les travaux de ce programme, l’un d’entre eux devrait retenir particulièrement l’attention des électeurs suisses. Il porte pour titre «La procédure de naturalisation est-elle conforme aux principes d’un Etat de droit ou est-ce une décision politique?»
Brigitte Studer et Gérard Arlettaz, co-auteurs de l’étude, sont chercheurs à l’lnstitut d’histoire de l’Université de Berne. Ils ont examiné les critères d’admission et d’exclusion du droit de cité suisse de 1874 à nos jours. Pour sa part, Marc Helbling, de l’Institut des sciences politiques de l’Université de Zurich a choisi de comparer les procédures de naturalisation de – excusez du peu – 207 communes.
Ainsi, on apprend qu’en 1874, une durée de résidence en Suisse de deux ans – alors que l’on en est à douze ans depuis 1952 - permettait d’accéder à la naturalisation. Mieux, entre 1874 et 1898 des accords bilatéraux – tiens donc ! - permettent le libre établissement dans tout autre pays d’Europe.
Pour les chercheurs, ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle que «L’idée que les étrangers puissent représenter un problème n’apparaît dans les sources». La politique de naturalisation se durcira alors jusqu’à la fin des années 70. Ce n’est que depuis les années 80 que l’étau se desserrera. Pour se resserrer à nouveau sous l’impulsion des partis de droite extrême et, notamment et récemment, de l’UDC.
Cela n’empêche pas les chercheurs d’arriver à des conclusions et de faire des recommandations au terme de leur travail.
Voici comment la revue Horizons du Fonds national suisse parue en décembre 2006 les résume :
L’équipe de recherche du PNR 51 fait les recommandations suivantes pour une pratique de naturalisation plus efficace, qui exclut l’arbitraire et les décisions subjectives:
Uniformité : un règlement de naturalisation unique et valable dans l’ensemble de la Suisse devrait être introduit.
Acte apolitique : la procédure de naturalisation devrait devenir un acte administratif, avec obligation de motiver la décision, comme c’est aujourd’hui le cas dans toute l’Europe (sauf en Suisse).
Présomption d’intégration : une personne qui a vécu en Suisse durant une période déterminée fixée par la loi ne devrait plus avoir à prouver son intégration. C’est l’Etat qui devrait établir une non-intégration éventuelle.
Réduction de la durée de résidence requise : le délai de 12 ans, qui fait de la Suisse le pays européen le plus restrictif, devrait être abaissé.
Communes seulement consultées : les communes ne devraient pas prendre de décision dans la procédure de naturalisation, mais être seulement consultées.
Une constatation s’impose, les résultats des chercheurs sont aux antipodes de l’initiative qui sera soumise au peuple le 1er juin prochain. Et c’est probablement pour cette raison que, dans son programme, l’UDC préconise que «Les ressources financières affectées à la recherche doivent être concentrées sur les domaines promettant de la croissance et des plus-values afin de renforcer la compétitivité internationale de la Suisse.»
Ben tiens, c’est bien connu, politique et Connaissance ne font pas toujours bon ménage. Et, dans ces conditions, pourquoi pas une bonne une révolution culturelle à la Mao !
- N.B. Pour en savoir plus sur le même sujet et sur la manipulation des chiffres du parti au bouc, lire cet excellent billet de mon collègue Daniel.