Extraits de La Face nord de Juliau, onze et douze, de Nicolas Pesquès, choisis
en mémoire de mon amie Maryse
Hache, disparue il y a tout juste un an, le 25 octobre 2012.
On peut regarder la prairie. On peut lire celle qui ne se voit plus dedans. On
peut regarder et voir celle qui manque d’être là. La séparation est la
conjonction. Et. Les trois cyprès et les deux autres. Les deux points du mode d’emploi
quand on interroge le mélange. Du bruit autour de la perdrix. N’arriveront à
faire de la colline ni l’envolée de matière ni l’amas de texte. Le corps qui
les broie. Le paysage se dessine et s’en va vers d’autres usages. On lit le
sillonnage dans les deux sens. Le calme n’est pas revenu. Sans doute parce qu’une
logique n’est pas la bonne. Soit vraie soit réelle. Le ET est détachable.
Finir sans fin en déposant les ustensiles, en perfectionnant la vallée et en
fermant les yeux. Le front encore tiède. Le
livre pour toujours et la colline ad lib. L’accompagnatrice arrêtée par le
gong, suspendant lentement sa ponctuation. Le rythme des phrases porteuses d’une
équivalence douleur-couleur. Les serrantes, les devenues du ciel, les
terriblement muettes. Le tour de la maison, le nouage et l’adieu. L’arrivée de
la très grande privation à l’ombre de la face nord. Cette chose presque
tranquille qui disparaît d’un coup. Le sens des corps.
Les scènes sont plusieurs mais il y en a d’excédentaires. Excellentes coupures.
Passage en trombe de choses illisibles qu’on gardera, compactées. Meule du
souvenir. Texte ajointé par tranche. Puis le coucou avec la brume. Beau matin.
Celle qui s’éloigne ne fait que s’éloigner. Donc dite. Une jolie possibilité
comme un bouclier. On n’écrit pas. On regarde le chardonneret. C’est de l’uranium.
Depuis qu’elle disparaît, elle aggrave la lecture. On peut le dire à l’envers :
elle est si légère qu’elle arrive à tout bout de champ. Façon d’habiter.
Certaines factions provoquent des images rémanentes : jaune, li(è)vre,
fourche. Les fils suivent le vent. Il n’y
a pas d’amour heureux peut se dire autrement : le bonheur est si
aérien que seul l’instant le garde. Le scorpion fait danser ses pinces. L’épée
de l’hirondelle. Les images qui s’écrivent dans les étoiles sont de la volonté
dévastée. L’empire des réflexes. La grammaire qui clignote. La reine noire.
Oui.
Nicolas Pesquès, La face nord de Juliau,
onze, douze, Flammarion, 2013, pp. 161, 164, 171 et 177
Nicolas Pesquès dans Poezibao :
lecture d’été au musée Zadkine (08), bio-bibliographie, extraits 1, La Face nord de Juliau, 6
(par A. Paoli), La Face Nord de Juliau, V
(journal de lecture par F. Trocmé), ext.
2, La Face nord de Juliau, 7, ext.
3, une
rencontre avec N. Pesquès (Petit Palais, 2011), ext
4, ext.
5, "La
Face nord de Juliau, huit, neuf, dix" par Florence Trocmé (journal de
lecture), "La
face nord de Juliau, huit, neuf, dix" par Matthieu Gosztola, "La
face nord de Juliau onze, douze" par Antoine Bertot, "
La face nord de Juliau onze, douze", par Ludovic Degroote
Maryse Hache dans Poezibao :
Bio-bibliographie,
écho
rencontre Bénézet, Di Manno fevrier 07, extrait 1,
un
atelier de poème, ext.
2, in
memoriam,