Depuis quelques temps, le Maroc virtuel, celui qui surfe sur Twitter et Facebook, pas sur la blogoma qui semble être tombée dans une aride stérilité sauf rares et obstinées exceptions, bouillonne, tremble, frémit gronde et rue dans les claviers et parfois se déchire à propos de l’affaire Anouzla et de ses suites.
Dans ce fatras, j’ai eu l’occasion dimanche dernier, par l’entremise d’un twitteur que je lis régulièrement, de découvrir le message suivant :
2/2 c'est pas un truc pour les Marocains. Il me semble que la majorité de ces derniers n'a jamais été demandeuse de liberté d'expression.
— Larbi.org (@Larbi_org) October 20, 2013
Je prends la responsabilité de reproduire ce texte car il m’interpelle de la manière la plus brutale, car il émane de celui que l’on a considéré comme le “pape de la blogoma” et qui est devenu le porte-twitter du Mouvement du 20Février .
Comment un homme se prétendant défenseur de la liberté dans ses formes les plus diverses peut-il affirmer que “la majorité de nos compatriotes n’a jamais été demandeuse de liberté d’expression”?
Tout simplement parce que “la majorité de nos concitoyens” ne donne pas à l’affaire Anouzla la priorité que cet internaute et ses amis lui accordent.
Il a le droit de dire ce qu’il veut, mais pas celui d’insulter la mémoire de notre peuple!
Mais me problème n’est pas là : il réside encore une fois entre le hiatus réel qui existe entre le Maroc virtuel et le Maroc réel.
Quand une poignée d’internautes s’enflamment, le plus souvent à juste titre, pour une cause, ils voudraient que le reste du pays suive leur enthousiasme!
Or, le marocain(e) de base ne fait pas partie des petits cercles de vrais ou prétendus intellectuels qui peuplent la toile.
Avoir quelques milliers d’amis sur Face Book ne fait pas de vous un leader politique et votre voix sonne peut-être haut et fort dans votre communauté, mais n’a aucun écho dans la réalité du pays!
Etre suivi par quelques milliers de twittos ne donne aucune légitimité populaire à votre pensée à laquelle 145 caractères enlèvent toute profondeur!
Entre Twitter et Facebook, évolue et s’agite des communautés qui vivent en vase en clos : le Maroc ne fait pas exception à ce constat.
Le marocain(e) réel(le) est en prise directe avec la vraie vie.
Entre les menaces sur le prix du pain, la scolarisation des ses enfants, les difficultés à joindre les deux bouts, le marocain(e) pense à la santé publique en faillite, à la corruption envahissante, à sa sécurité menacée par une criminalité de moins en moins maitrisée, aux risques de circuler en voiture, et parfois aux problèmes politiques de ce pays et à l’incurie de ceux qui sont censés le représenter!
Les guéguerres entre internautes ne sont pas inscrites dans son agenda immédiat!
Cela ne signifie pas que le marocain(e) n’a aucune envie de liberté d’expression, ni aucun désir de liberté tout court.
L’histoire de notre pays et de notre peuple l’a démontré : la liberté d’expression a été payée par certains au prix de leur chair, souvent de leur vie.