Avec l'affaire Leonarda,
notre démocratie atteint le fond. Une expulsion, pourtant décidée et confirmée
après mout recours par la Justice fait l'actualité pendant une semaine sur tous
les médias, elle met la pression sur le Ministre de l'intérieur de la
République Française au point qu'on demande sa démission, elle l'amène à
écourter son séjour dans les départements d'outre mer, elle provoque des grèves
de lycéens avec blocages de Lycées, elle conduit à toutes les hystéries
(certains parlent de rafle) et le pompon, elle amène le Président de la
république lui même à intervenir dans une intervention solennelle pour
trancher...à moitié. Intervention qui relance de plus belle la
polémique.
Certes, les conditions de « l’interpellation » de cette jeune
fille sont discutables. Malgré les précautions qui semblent pourtant avoir été
prises et notamment le fait de ne pas l’avoir fait descendre du bus devant ses
petits camarades, c’est le symbole lui-même qui a choqué. Mais cet élément
n’est pas contesté, le manque de « discernement » a été
officiellement acté et Manuel Valls s’est empressé de publier une circulaire
demandant aux préfets de sanctuariser l’Ecole et ses prolongements.
Pour autant, l’expulsion de la famille Dibrani est d’une banalité sans nom.
Juridiquement inattaquable et moralement tout à fait défendable compte tenu du
passif du père, des mensonges des uns et des autres et de l’absence flagrante
de volonté de s’intégrer des parents.
D'évidence il y a des cas d’expulsion qui crèvent beaucoup plus le cœur que
celui-ci.
Alors, comment en est t’on arrivé à faire de cette incident, malheureux certes, mais anecdotique, une véritable affaire d’Etat ?
J’y vois principalement deux raisons :
Tout d’abord, le sujet sous-jacent, l’immigration. L’immigration est un
sujet à propos duquel les clivages sont extrêmement importants et qui, pour
cette raison, n’a jamais été traité de manière satisfaisante. Clairement, il
n’y a pas de consensus ni sur la Loi, ni sur la manière de l’appliquer. Ce
sujet est l’occasion de combats permanents ou le manichéisme est roi. Les bons
humanistes s’opposent aux xénophobes réalistes renfermés sur leurs petites
frontières.
Les uns évoquent leur indignation face à la misère du monde, les autres
rétorquent qu’accueillir cette misère sans discernement n’est guère
raisonnable. L’humaniste face au boutiquier, le combat n’est pas
égal.
La 2éme c’est l’ambiance délétère qui règne sur la politique française. Ce
n’est pas nouveau mais elle s’est clairement détériorée depuis l’arrivée de
François Hollande au pouvoir.
Dans ce contexte, l’affaire Leonarda a servi de détonateur. Elle a
constituée le prétexte à toutes les oppositions contestataire de France et de
Navarre et elles sont nombreuses. Elles en ont toutes profité pour régler leurs
comptes avec l’Exécutif. Tout d’abord avec Manuel Valls, l’occasion était trop
belle pour affaiblir celui qu’ honnissent dans une belle unanimité, le Front de
Gauche, EELV, l’UMP, le Front National et une partie du PS. L’homme est trop de
droite pour la gauche, trop populaire pour la droite qui voit en lui un
concurrent déloyal. Imaginez, un socialiste qui prône l’ordre, la sécurité et
qui accuse sa consœur Ministre de la justice de laxisme !
Puis avec François Hollande. Il faut bien avouer que tant sur la forme d’une
déclaration solennelle que sur le fond avec cette décision faussement
consensuelle, celui-ci a tendu le gourdin pour se faire battre. Son
intervention donnait trop d’importance à un fait qui ne méritait certainement
pas une intervention présidentielle et elle s’est conclue par une proposition
qui ne pouvait satisfaire personne. Par-dessus le marché, il s’est fait
publiquement rabrouer par celle qu’il a voulu aider.
Pour tous ces gens, la maladresse de François Hollande a été la cerise sur
le gâteau, l’aubaine inespérée pour clamer haut et fort que, définitivement,
cet homme n’est pas à la hauteur de sa tâche.
Sans surprise, les premiers à se lâcher, on les trouve dans sa propre
majorité et chez ses pseudos alliés qui sous prétexet de leçon de morale,
trouvent là une occasion de contester haut fort son autorité sinon sa
légitimité. Quoi, vous exigez d’une jeune fille de 15 ans qu’elle choisisse
entre la France et ses parents, père indigne, président indigne !!!
La Gauche déboussolée et divisée comme jamais, la Droite morcelée sans chef
ni doctrine, tous ont non seulement abusé de l’émotion populaire provoquée par
un fait largement surmédiatisé mais ils l’ont nourris en surenchérissant dans
la fausse compassion. Tous l’ont utilisé pour se refaire une santé sur le dos
d’un Président encore plus mal en point qu’eux.
Notre démocratie ne sortira certainement pas grandie de cette pitoyable manière de faire de la politique.