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Dans le port de Stockholm, ya des marins qui naissent

Publié le 05 mai 2008 par Dje
Oui, je sais ce que vous allez me dire : j’avais promis les chroniques sur mon périple en Suède dès mon retour, et il a fallu au final deux semaines pour que je publie la deuxième partie du récit. Mais que voulez-vous, le processus d’écriture est parfois difficile à dompter, et il est plus délicat d’écrire sur une expérience personnelle, avec son lot de découvertes et de ressentis, que sur des faits d’actualité aussi subtils soient-ils. J’avais mis trois semaines cet été à trouver les mots justes pour décrire ma rencontre si particulière avec Andy, pour être sûr que les émotions sincères et vraies que j’avais ressenties transpiraient à travers ma prose maladroite. Si j’ai eu besoin de deux semaines cette fois-ci pour coucher sur papier ma découverte de Stockholm, c’est parce que là encore j’ai été relativement touché par cette ville.
Depuis maintenant deux ans, j’ai eu la chance de visiter quelques-unes des réputées plus belles villes européennes : Paris, Amsterdam, Budapest, Londres ou encore Prague. Pourtant, au-delà de leur attrait touristique et culturel indéniable, aucune de ces villes ne m’a parlé comme Stockholm. Là-bas, je me suis senti comme chez moi. Est-ce la fraîcheur du vent marin venu de la Baltique ? Est-ce cette humidité si familière dans l’air, ou encore le cri des mouettes sur les quais ? Je n’en sais rien… Evidemment, tant de choses dans la capitale suédoise me ramènent à la ville qui m’a vu naître et dont le sang coule dans mes veines. Stockholm, c’est La Rochelle en – beaucoup – plus grand. Plus grand oui, mais sans tous les défauts qui existent habituellement dans une ville de cette taille. Tout y est paisible, calme, serein. Comme une invitation permanente à la paix intérieure.
Pour vous retracer brièvement le contexte, la ville est constituée de plusieurs îles qui se côtoient dans l’un des bras sans fin que la Mer Baltique déploie vers l’intérieur du territoire suédois. L’influence de la mer y est donc omniprésente, par les ponts qui relient les différents quartiers, par les quais interminables qui se font face, par les petits ports qui se multiplient au cœur même de la ville. Se trouver dans une capitale qui compte tout de même près d’un million d’habitants, et pouvoir se promener au milieu des bateaux avec un vent humide sur le visage, voilà une expérience aussi surprenante qu’agréable. Le tout sans agitation fortuite, sans démesure. Je ne me suis pas senti touriste en me promenant le long des berges, mais pour la première fois je me suis senti chez moi dans un endroit qui n’est pourtant pas chez moi. Comme si cette terre me parlait, comme si j’avais déjà vécu là. Certaines choses ne s’expliquent pas… J’ai ressenti ça très vite, comme une évidence, et lorsqu’au gré d’une fin d’après-midi ensoleillée j’ai vu le soleil tomber sur les façades le doute n’était plus permis. Car pour la première fois, j’ai retrouvé cette lumière orangée si typique que je n'ai de cesse de chercher quand je quitte ma côte Atlantique, et que je n’avais encore entrevue nulle part ailleurs.
Il n’est pas question ici de dresser un tableau élogieux du modèle scandinave. J’ai par nature une grande méfiance envers ce qui est unanimement considéré comme un exemple à suivre, vacciné entre autres par ce que j’ai pu voir du fameux modèle travailliste à l’anglaise, considéré comme une référence conciliant contraintes sociales et économie de marché. J’ai déjà eu l’occasion d’exposer mon avis sur la question. Le fameux modèle scandinave, aussi idyllique soit-il, repose tout de même sur des principes quelquefois douteux, notamment un protectionnisme à outrance et une autosatisfaction souvent palpable dans les propos des autochtones. Mettre en exergue un chômage qui n’excède pas les 2,5% c’est une chose, oublier de préciser que la politique nationale est très proche de la dogmatique "immigration zéro" en est une autre. Toute médaille a son revers, même celle qui a l’apparence la plus sympathique. Je n’ai malheureusement pas eu suffisamment de temps sur place pour en apprendre plus sur les réalités du pays, et c’est très dommageable car il y a sûrement quantité de choses à dire.
Cinq jours passés comme l’éclair, et j’ai quitté Stockholm, sans regrets car je sais qu’un jour nos chemins seront amenés à se recroiser, d’une manière ou d’une autre. J’en suis intimement convaincu, que je me sois senti aussi bien dans cette ville ne peut pas être qu’une coïncidence. Je m’en suis pleinement rendu compte au moment de quitter la Suède, pendant cette dernière nuit passée à l’aéroport. Les quelques dix heures passées en transit m’ont inévitablement ramené à la dernière fois que j’ai eu à attendre un avion : mes trois jours à Budapest, avec tout ce qu’ils avaient comporté de joie, de déception, et d’enrichissement personnel. Et pour la première fois, je me suis surpris à repenser à ce drôle de week-end sans amertume, sans rancœur. Peut-être parce que j’ai trouvé à Stockholm des réponses aux questions que je me posais il y a huit mois, et qui n’étaient pas totalement éludées. Peut-être…
"Dans le port d’Amsterdam, y a des marins qui naissent" chantait Jacques Brel. Dans le port de Stockholm, il y a peut-être un marin qui a vécu une seconde naissance. Comme quoi même après des années, on peut encore être surpris par ses propres réactions.
(Chroniques d'un expatrié - Etape 2: la Suède 2/2, 05.05.2008)

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LES COMMENTAIRES (1)

Par Ludo
posté le 06 mai à 10:43
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Une bonne image de ce qu'est toujours Stockholm pour moi après 2 ans passé ici :)

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