Les REITs et les MLPs sont des instruments financiers que l’on trouve majoritairement aux Etats-Unis et qui sont particulièrement généreux du point de vue de leurs distributions. On peut dire qu’ils sont un peu cousins, à la fois proches dans leur mécanisme de fonctionnement, mais aussi différents dans leur structure. La stabilité de leur modèle économique, leur indépendance relative par rapport au marché des actions, ainsi bien évidemment que le revenu attractif qu’ils génèrent, peuvent représenter une opportunité intéressante pour des (futurs) rentiers. Par ailleurs, ces instruments possèdent une particularité dont on ne parle que très rarement : la protection qu’ils offrent face au risque de monnaie, en particulier celui de leur monnaie de référence, le dollar.
Voyons d’abord ce qui se cache sous ces deux termes peu avenants.
REITs
Une « REIT » est une entreprise dont la plupart des actifs et des revenus proviennent de l’immobilier. Elle doit distribuer chaque année au moins 90% de son résultat net sous forme de dividendes. Là où ça devient intéressant, c’est qu’elle peut déduire fiscalement les dividendes versés de son résultat, avant de supporter l’impôt. Elle est donc bien évidemment encouragée à distribuer l’intégralité de son résultat…
Les activités immobilières ne génèrent pas des rentabilités aussi élevées que celles que l’on trouve auprès des entreprises cotées en bourse. L’Etat les favorise donc en leur évitant la double imposition : celle sur le résultat de l’entreprise et celle sur les dividendes perçus par les actionnaires. Néanmoins, si les rentabilités sont inférieures à celles d’autre secteurs, elles sont aussi plus stables et surtout plus durables. Le rendement des Equity REITs (location de parc immobilier) atteint ainsi 12% par an (en total return) lorsque l’horizon d’investissement dépasse la durée d’un cycle immobilier (environ dix ans).
Les Mortgage REITs (placements hypothécaires) peuvent quant à eux distribuer des dividendes particulièrement généreux. Ils affichent aussi parfois des rentabilités extrêmes, comme en 2001, avec 77%. Mais cela se fait au prix d’une volatilité dissuasive, avec de très fortes chutes (-42% en 2007). Les Mortgage REITs reposent en effet uniquement sur de la dette, avec en arrière plan des actifs qui peuvent fondre comme neige au soleil. Contrairement aux Equity REITs, ils ne bénéficient pas de la plus-value immobilière. Leur rendement annuel atteint ainsi un modeste 4% sur un horizon de placement de 10 ans (en total return).
Les REITs ont l’avantage d’offrir une large palette de choix dans le domaine immobilier, avec des spécialisations par secteurs et/ou régions. En général, plus elles sont concentrées sur un marché particulier, mieux c’est, car elles peuvent bénéficier d’un avantage concurrentiel et/ou d’un marché de niche. Chaque secteur possède ses propres caractéristiques. L’hôtellerie est par exemple très sensible à la conjoncture économique. Les bureaux sont légèrement moins tributaires de la croissance, tout en affichant des taux d’occupation situés généralement entre 90 et 95%. L’immobilier résidentiel est encore moins sensible aux aléas économiques. Quant à l’’immobilier commercial c’est certes le secteur le moins rentable, mais c’est aussi le plus stable, grâce aux normes très strictes quant à la durée et la revalorisation des loyers. Enfin, les centres médicaux sont eux aussi très peu influencés par la conjoncture, et se paient même le luxe d’afficher un taux d’occupation généralement situé entre 95 à 100%.
En bref, si l’on veut investir sur le long terme dans les REITs, pour en tirer des revenus solides, mieux vaut se focaliser sur les Equity REITs, qui tirent leurs revenus de la location d’un parc immobilier, plutôt que sur des Mortgage REITs, qui tirent leurs revenus des dettes hypothécaires. De plus, mieux vaut se focaliser sur les secteurs des commerces, de la santé et du résidentiel, moins soumis aux aléas économiques.
Malgré ces précautions, tout investissement comporte des risques. Bien entendu, celui qui menace le plus le secteur immobilier, c’est la hausse des taux d’intérêt. Une hausse importante et subite de l’inflation pourrait par exemple faire revoir à la Fed sa politique monétaire particulièrement accommodante, et du coup mettre en danger les REITs. A contrario, cette sensibilité aux taux est paradoxalement intéressante pour se couvrir du risque de monnaie. Un durcissement de la politique monétaire de la Fed est néfaste pour le cours d’une REIT, mais elle renforce aussi sa monnaie de référence, le dollar. Et vice-versa.
Un autre risque d’une REIT, c’est que l’argent ne rentre tout simplement pas dans les caisses de la société. Cela peut se produire si les biens à louer ne trouvent pas preneur ou si un locataire ne peut plus payer son loyer. Pour palier à ces risques, la société a intérêt à fortement diversifier à la fois ses locataires et ses biens immobiliers. Plus la quantité et la diversité des biens et locataires est importante, plus bas est le risque. Dans le secteur commercial par exemple, une répartition sur plusieurs domaines d’activités différents permettra d’éviter que de très nombreux locataires se retrouvent simultanément en défaut de paiement à cause d’une crise structurelle ou conjoncturelle touchant un secteur particulier.
Enfin, il faut aussi relever que les REITs sont généralement très volatiles, même si on concentre sur la location dans les secteurs commerciaux, résidentiels et de la santé. L’écart-type relatif peut très facilement représenter le double d’une action cotée en bourse. Il faut donc en être conscient avant d’investir dans ce type d’actif. En contrepartie, cette volatilité n’est historiquement pas trop liée à celle des actions, ce qui permet de s’affranchir quelque peu du risque de marché. Mais depuis la crise des subprimes cet avantage s’est passablement estompé.
MLPs
Avec la forte baisse des taux d’intérêt sur les placements à revenu fixe traditionnels au cours des dernières années, les investisseurs se sont de plus en plus tournés vers des instruments de placement spécialisés pour leur fournir le revenu dont ils ont besoin. Les MLPs ont ainsi considérablement gagné en popularité parce qu’ils peuvent justement offrir des rendements très élevés, grâce aux avantages fiscaux dont ils bénéficient, un peu à la manière de leurs cousins les REITs. Les MLPs ne paient en effet pas d’impôt avant de distribuer leurs profits, ce qui leur permet d’être plus généreuses avec leurs actionnaires. Pour bénéficier de cet avantage fiscal, 90% du revenu d’un MLP doit provenir d’activités dans l’immobilier, dans les matières premières ou les ressources naturelles (mines, bois ou énergie).
Les MLPs sont contrôlées par un partenaire général, qui détient en principe une participation de 2%. Il s’agit la plupart du temps de sociétés privées, mais quelques-unes sont aussi cotées en bourse. Dans ces cas, le partenaire général paie la plupart de ses flux de trésorerie à ses actionnaires. Prenons l’exemple de la société Kinder Morgan (NYSE:KMI), qui est partenaire général du MLP Kinder Morgan Energy Partners (NYSE:KMP). Alors que la société Kinder Morgan offre un rendement de 4.5%, Kinder Morgan Energy Partners verse des distributions de 6.5%. Ceci donne une petite idée des avantages fiscaux accordés aux MLPs…
Les MLPs semblent avoir un attrait particulier pour les grands producteurs de gaz naturel et de pétrole. Beaucoup d’entre eux ont en effet transféré leurs actifs et leurs pipelines dans des MLPs, qu’ils contrôlent en tant que partenaire général. Les honoraires des opérateurs pétroliers sont réglementés et basés sur le volume de produits transportés, et non sur le prix du pétrole. La croissance des bénéfices à long terme suit ainsi celle de l’économie dans son ensemble et n’est pas tributaire du prix du pétrole. En ce qui concerne les opérateurs de gaz naturel, les marges peuvent par contre varier avec le prix de la marchandise. Certains opérateurs utilisent des stratégies de couverture afin de réduire leur vulnérabilité aux fluctuations des prix. Mais tous ne le font parce que cela limite leur potentiel de hausse.
Tout comme les REITs, les MLPs sont très volatils, et peuvent ne pas convenir au profil risque de tous les investisseurs. En contrepartie, ils sont eux aussi peu sensibles aux variations du marché des actions, ce qui est toujours intéressant pour diversifier un portefeuille. Last but not least, comme leurs cousins, ils offrent une excellente protection face au risque de monnaie que représente le dollar, avec sa sempiternelle faiblesse structurelle.
Notons enfin un petit détail technique qui pourrait avoir son importance en fonction du traitement fiscal auquel est soumis l’investisseur individuel qui porte son choix sur ce type de placement. Les MLPs ne paient pas des dividendes, mais des distributions, qui comportent un petit montant de revenu et un grand montant de gain en capital. Ceci pourrait vouloir dire en théorie qu’en Suisse une grosse partie de cette distribution n’est pas imposable. Reste à savoir comment cela sera traité dans la pratique, tenant compte aussi de la retenue supplémentaire USA. Il y a fort à parier malheureusement que cela soit géré selon la règle habituelle appliquées aux dividendes américains (15% d’impôt US non récupérable et 15% d’impôt CH récupérable).
En conclusion
Les REITs et les MLPs, même s’ils opèrent dans des secteurs non semblables et fonctionnent sur une structure différente, sont en fin de compte très proches. Le traitement fiscal auquel ils sont assujettis leur permet de payer des distributions généreuses. Habituellement je suis très sceptique par rapport aux rendements élevés. Ils sont la plupart du temps le signe d’une gestion irresponsable de l’entreprise et/ou de difficultés conjoncturelles ou structurelles. Néanmoins, concernant ces deux instruments, ces distributions généreuses sont au contraire le fruit d’un mécanisme fiscal qui leur permet et les encourage même à payer plus de dividendes à leurs propriétaires.
Très souvent des rendements élevés sont aussi synonymes de croissance léthargique du dividende. On connaît bien ce phénomène avec les sociétés de type « Utilities », comme la Consolidated Edison (NYSE:ED). Cela existe aussi bien entendu chez les REITs et les MLPs, mais ce n’est pas forcément le cas. Beaucoup d’entre elles n’ont même rien à envier aux célèbres aristocrates de dividendes, même si leur historique de distributions croissantes est bien plus modeste.
Bien entendu, tout n’est pas rose non plus. Même si elles sont relativement à l’abri des fluctuations du marché des actions, la volatilité des REITs et des MLPs est vraiment très élevée. Beaucoup d’investisseurs s’en accommoderont certainement. D’autres, habitués à des placements de type défensif fournisseurs de dividendes stables et croissants, pourraient au contraire vite prendre peur.
N’empêche, et j’en parlais en introduction, ces deux types d’instrument ont une caractéristique qui est très souvent passée oubliée par les investisseurs européens et en particulier helvétiques qui achètent des titres US. Les REITs et les MLPs raffolent d’un dollar faible… et inutile de vous dire qu’historiquement cette fichue monnaie a une fâcheuse tendance à perdre de sa valeur.
Tenant compte de toutes ces considérations, j’ai décidé d’ajouter une nouvelle stratégie de dividendes croissants à mon portfolio, basée sur les MLPs et les REITs. Celle-ci comptera pour débuter plus de 30 titres et sera disponible dans la partie membre ces prochains jours.