Une expulsion, une de plus, dans des circonstances qui choquent. Et voici que le sujet dépasse son auteur. Léonarda, jeune collégienne arrêtée sur le parking d'un autre collège
1. Le gouvernement a été ébranlé. Peut-on le dire ? Oui. Jean-Marc Ayrault a demandé une enquête; Manuel Valls a fait publier un communiqué défensif. Le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, celui qui institutionnellement pourrait remplacer le président de la République si celui clamse, a fustigé publiquement les conditions de l'arrestation. Le Parti du président, le PS, s'est indigné. François Hollande, en déplacement à quelque 3.000 kilomètres de là, a réagi. Cette indignation s'est vue jusque dans les blogs politiques.
D'une prise de conscience, on pourrait se réjouir.
Pas seulement.
2. Une fraction de la gauche n'a rien saisi, rien compris, rien appris des années d'opposition sarkozyste. Au lieu de se réjouir, elle s'est "terrifiée". Comme si, au coeur d'une émotion collective, il fallait faire le tri dans les soutiens, les purs et les autres. Sa rage est sans doute aussi violente que sa déception. Mais elle se précipite de façon inattendue dans une impasse politique qui se démontre jour après jour. La première - et peut-être la seule - leçon de l'antisarkozysme est qu'il faut réunir parfois des contraires sur un objectif commun.
3. Une fraction du camp majoritaire s'est désolidarisée de cette accusation. Ségolène Royal a rejoint Jean-Pierre Chevènement pour "calmer" le jeu. "Tous ceux qui se précipitent dans des réactions alimentent une fois de plus la polémique sur la question de la sécurité, ce qui est très mauvais pour la gauche" . Chevènement a ajouté: "Il arrive un moment où il faut bien appliquer la loi". Ces positions ne sont pas surprenantes.
4. La droite est dépassée. Jean-François Copé a dénoncé la "fin de l'hypocrisie". Quelle ignorance ! Le gouvernement, et Valls en premier, sont accusés de prolonger les mauvaises pratiques du sarkozysme anti-migratoire et l'UMP clame qu'il y aurait du laxisme ! L'outrance, là-bas, n'a pas de limite.
Qui a lu le Figaro, ce mercredi 16 octobre ?
Tout au long de la journée, chacun a ensuite rivalisé de superlatifs pour qualifier l'affaire: «Insupportable»,«indigne»,«inacceptable», «inhumain», «effroyable», «scandaleux»… Sous Nicolas Sarkozy, les socialistes étaient à peine plus virulents. Quant à Jean-Luc Mélenchon, il n'a pas failli à son rôle en lançant: «Rendons Valls à Le Pen.»5. Personne ne sait si le sujet importe politiquement au-delà de l'émotion légitime. C'est triste à dire. Les faits se succèdent mais Valls - pour ne citer que lui - enquillent les sondages populaires. Et un dernier, intoxication ultime, consacre Marine Le Pen comme meilleure opposante à François Hollande.
Quelle leçon politique en tirer ?
[ NDR: Au final, une arrestion d'une collégienne, étrangère et rom, dans un cadre scolaire, a (heureusement) suffit à agiter le paysage politique. Il y a des émotions légitimes. Il faudra se le répéter. ]