La tuyauterie européenne ne m'intéresse guère. Une fois que ma conviction a été faite sur le caractère nuisible et inutile de l'ensemble, j'ai beaucoup de mal à m'intéresser aux détails.
J'ai bien tort. Heureusement, des blogueurs plus pointus sont apparus et suivent de près l'actualité de la construction de l'état européen.
Le lecteur qui se veut au courant de l'actualité européenne fera donc bien de lire l'article "La France perd le contrôle de ses banques", sur le site de CJ Willy, un franco-américain. Le lecteur complètera ensuite régulièrement son information, toujours sur le même site, mais aussi chez Magali Pernin, sur son site Contre la Cour.
Vous apprendrez donc que le contrôle des grandes banques française sera assuré à partir de l'année prochaine par la BCE, avec un regard parlementaire ou démocratique quasiment nul.
Le Monde d'hier informait par ailleurs ses lecteurs que l'état des lieux que fera la BCE au moment de sa prise de contrôle, l'audit des banques dont elle devra à l'avenir assumer le contrôle, sera effectué par un cabinet américain, dont les performances récentes ne sont pas avérées.
Le lecteur curieux note avec intérêt que la première page du site de Wyman fait de la pub pour de la spéculation sur les matières premières agricoles.
Mais je laisse de côté les querelles à ce sujet. Même si elles sont importantes, elles ne sont que la moitié du problème.
Car, comme le résume fort bien un article de la Tribune, ce n'est pas tout de contrôler les banques, il s'agit de savoir qui paie lorsqu'arrive une faillite.
Et là, rien n'a été décidé.
Or, il n'y a pas de régulateur infaillible. On a beau dire et faire et embaucher tous les cabinets américains, donc sérieux, que l'on veut, à un moment donné, surtout si la stagnation européenne se poursuit, des banques peuvent faire faillite parce que la conjoncture a dégradé trop fortement leur portefeuille de crédits.
Si une faillite importante intervient, mettons en Espagne, il faudra expliquer au contribuable espagnol que bien que théoriquement contrôlée par la BCE, en l'absence de mécanisme de résolution des crises, c'est l'état espagnol qui devra payer. Pire, la BCE étant consciente de ce risque d'impasse, elle risque d'être encore plus sévère dans ses recommandations aux banques, et de contribuer ainsi à la crise.
L'Allemagne se réjouirait d'une telle situation où seul le contrôle bancaire serait un peu européanisé, la responsabilité financière, la plus importante, restant nationale (on peut noter au passage que les banques allemandes échappent en grande partie au contrôle de la BCE, les landesbanken, régionales, étant trop petites pour relever du contrôle de Francfort).
Seulement, en cas de crise bancaire, et dans l'urgence, la tentation serait probablement irrésistible de faire renflouer une banque théoriquement contrôlée par la BCE par le MES. Et là le contribuable allemand ne sera peut-être pas ravi d'apprendre qu'il est tout de même indirectement convié à remettre au pot.
Tout ceci pour constater quoi ? D'abord que la construction européenne prend un tour monstrueux. Nul doute qu'avec des débats aussi complexes, le sujet de l'Union bancaire n'intéresse personne. Ensuite que cette obscurité ne profite qu'à une construction européenne intéressée par la seule acquisition de pouvoirs nouveaux, qu'elles qu'en soient les modalités.
Au final les banques européennes ne seront probablement pas mieux contrôlées, et, en cas de crise, les enchevêtrements de responsabilités (d'irresponsabilité plutôt) sont tels que les dégâts en seront probablement aggravés.