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Los Hermanos - Sentimental

Publié le 14 octobre 2013 par Boebis @bonjoursamba

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Si la britpop est la réponse au grunge américain, Los Hermanos sont la réponse brésilienne à ces deux derniers. Réponse qui ne fut bien sûr pas entendue hors du Brésil ; la curiosité des Anglo-saxons – et le reste du monde avec eux - pour le rock non anglophone étant à peu près similaire au goût des Français pour le vin étranger.

Mais Los Hermanos ont pourtant eu un impact au Brésil que n’avaient eu aucun groupe de rock brésilien depuis Legião Urbana. C’est d’abord en 1999 un engouement monstrueux et ultra rapide pour le premier single du groupe, Anna Julia. Une pure ballade power-pop qui ne reflète pas l'album qui verse dans un hardcore mâtiné de ska. Le single propulse le groupe débutant dans toutes les radios, émissions-télé et festivals que peut compter le Brésil. Le tube permet au groupe d’écouler 400.000 albums, des chiffres considérables surtout pour un groupe de rock, là où les charts sont plutôt trustées par l’axé ou le sertanejo, et pour un groupe qui avait fait ses armes dans la scène alternatives de Rio de Janeiro.

Le premier succès de Los Hermanos est au fond un malentendu, comme celui de Nirvana de Smell Like teens spirit ou de Radiohead de Creep. Logiquement, la vague médiatique retombe brutalement avec le second album, Bloco do eu sozinho où le groupe affirme, contre sa maison de disque et malgré les attentes d'une partie de son public, son identité musicale. Le style du groupe reste accessible, du rock-indie avec une dimension pop assumée, des guitares électriques saturées mais avec des mélodies lyriques et chantées par des voix bien mises en avant. Un guitare-basse-batterie-clavier classique, complété d'une petite section de cuivres - héritage de l'influence ska des débuts bien qu'utilisées différemment - et une cellule rhytmique qui s'enrichit des syncopes brésiliennes. Si des groupes de rock, manguebit en tête, avait déjà puisé dans le maracatu et d’autres rythmes brésiliens, le groupe basé à Rio s'inspire logiquement -mais légèrement - de la samba.

Le groupe qui a perdu son statut d’idole éphémère acquiert peu à peu celui de référence incontournable et omniprésente du rock brésilien, à la manière de Noir Désir en France. Un public bien moins nombreux, mais plus fidèle et sans doute tout aussi fanatique. Le genre de groupe au bon goût revendiqué qui fait l’unanimité chez les étudiants, à l'image des membres du groupe, blancs, barbus et issus de la prestigieuse fac PUC-Rio. 

Mais derrière ce statut d'icône, qui donne légitimement envie de les déboulonner, il reste les chansons. Et quelles chansons ! Signées Marcelo Camelo ou Rodrigo Amarante qui se partagent le micro, c'est leurs qualités de songwritting qui en font un groupe qui n'a pas à rougir de leurs modèles anglosaxons. Une finesse dans l'écriture et les arrangements qui les place un bon cran au dessus des "gros" groupes de rock alternatif brésiliens des années 90 (Raimundos, O Rappa, Skank) qui n'ont pas forcément très bien vieillis.

Los Hermanos ont le petit truc en plus. Chez eux, c'est ce lyrisme assumé mais jamais affecté. C'est le don pour concocter des mélodies parfaites pour panser les chagrins adolescents, sans arrière-pensée ni recul, ou sans doute aussi pour les revivre le temps d'une chanson. Des chansons-d'amour-un-peu-tristes-et-désabusées qui deviennent de véritable hymnes les soirs de saudade, quand la midinette qui sommeille en chacun de nous se réveille.

Los Hermanos n'est pas le groupe le plus original, le plus radical, le plus populaire ou le plus-quoi-que-ce soit. Mais c'est le trait d’union le plus évident entre la MPB et le rock, entre l’underground et le mainstream. C'est le groupe qui pourrait réconcilier pour un moment le grand public et l'esthète, le snob à lunettes et la lycéenne en jupette, votre maman et votre petite soeur. Et rien que pour ça, c'est un grand groupe de rock.


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