Vivant à Montreuil, je n’avais pas soupçonné le foisonnement des ateliers d’artistes, et j’avais entrepris l’année dernière, d’explorer ceux de mon quartier.
Cette année, je voulais profiter de l’occasion pour rendre visite à deux personnes que je côtoie seulement sur les réseaux sociaux, pour se rencontrer. Cela définissait ma dernière étape et le périmètre de la balade, qui consistait modestement à traverser tout Montreuil !
La ville compte plus de 170 ateliers exposants cette année, il fallait donc se résoudre à faire des choix choix.
Sur le chemin de ma première étape, je marquais une pause dans la rue Désirée Charton, sur les murs de l’ancienne usine, recouverts de fresques de graffs qui me semblaient récents.
Laurie et les petites mains
Dans le premier atelier, chez Charlotte Castro, où plusieurs artistes présentent leur travail. On flâne parmi les céramiques, objets ou bijoux, les sculptures en papier, les fleurs au crochet et le travail fascinant et minutieux de Laurie Archambault, créatrice, artisan, relieur. Ses bijoux sur papier du Japon fascinent, car leur forme n’est pas l’habituelle (et pourtant si charmante, grue japonaise), il s’agit de pliages mathématiques pleins. La forme travaillée par l’artiste pourrait tolérer les vides, et serait alors idéale pour des luminaires. Ici elle explore des formes pleines, qu’elle assemble pour obtenir ce petit cube.
Son attention se porte aussi sur la reliure pure, car son intérêt principal tourne autour du papier. Elle le travaille et le manie, comme une vraie matière première, elle y adjoint de l’eau, des encres. Elle éprouve sa résistance. La pérennité de ses créations est d’ailleurs souvent au coeur des questions de ses clients. Le papier pourtant tient bon, que l’on porte ses bijoux sur soi, et qu’il soit en contact avec les vêtements, enfermés contre un manteau et frottés, “il se fait” dit-elle, en observant la petite broche qui ne la quitte pas, désormais patinée.
Ainsi, dans sa recherche créative, elle confectionne aussi de petits carnets en réalisant leur reliure fantaisie, mais elle travaille aussi sur des rénovations de livres.
Mon attention se porte aussi sur deux de ses livres, à l’arrière plan comme décor sur la table. Un carnet dont la couture verticale est apparente, et dont la couverture a été dominotée avec de l’encre d’imprimerie. Cela consiste à créer un imprimé en répétant un motif.
A l’intérieur, elle a rempli scrupuleusement et avec un oeil esthétique ses cours de reliure justement.
De même, le livre objet (travail réalisé à l’Ecole Estienne) dont les pages ont été pliées en triangles, et dont la forme répond à celle de l’enveloppe argentée qui s’y intercale. Choisissant des morceaux spécifiques d’une oeuvre d’Italo Calvino, elle a illustré le contenu de l’enveloppe sur le thème de la correspondance, et l’intérieur du livre plié, avec les personnages qui interviennent dans le texte qu’elle a sélectionné.
Mais plus que tout, il est intéressant d’échanger avec l’artiste, accessible et sympathique, et passionnée par son sujet qu’elle maîtrise aussi bien dans la facture que dans le discours.
Pour découvrir le travail de Laurie Archambault et ses créations, c’est ici
Sur la route, les messages
En m’éloignant je notais les signes sur les murs, ceux de l’automne et les messages formulés.
Un détour par “La queue de charrue”, atelier où sont présenté plusieurs créateurs, dont les céramiques de Véro Marchand.
En remontant la rue de Romainville, un garage ouvert invitait à la découverte. A l’intérieur, au bout de l’enfilade de pièces au contenu hétéroclite, un comité d’accueil autour d’une cabine d’observation. Le texte et la voix se déclenchant à la détection de mouvement. Ainsi, une photo s’auréole d’un contexte, d’une histoire vécue.
Nicolas Desbond et Soleil rouge
Ainsi, devant le ravissant atelier “Soleil rouge”, on prend le temps d’admirer les lieux, l’étrange maison qui fait penser à une case créole dans le jardin.
Ici est présenté le travail de Nicolas Desbond, serrurier d’art et sculpteur. La serrurerie pourquoi ? Car son travail, comme le montre bien son atelier, consiste à travailler le métal à froid et à l’assembler.
Il est aussi possible de voir quelques techniques de ferronnerie sur ses pièces. Cactus, formes oblondes et nouvelles formes, ses sculptures proposent de poser sur les choses un regard neuf. Ses pièces de design sont intéressantes également. J’ai été fascinée notamment par les nombreuses et singulières chaises suspendues au plafond (mais plus visible dans le jardin !)
Pour découvrir le travail de Nicolas Desbond, c’est ici
Végétation et maisons abandonnées
Sur le chemin, des traces de l’automne encore. Des indices qui se matérialisent en feuilles roussies, et en hasardant un regard au-delà des portails, des maisons abandonnées.
Paul et Nicole Bougeant
Sur le pas de la porte, une petite créature nous salue. On est dans l’atelier de Paul et Nicole Bougeant. On discute alors du raku, cette technique de cuisson japonaise.
Et j’observe avec attention les motifs qu’on dessinés des crins de cheval appliqué sur l’objet lorsqu’il est encore chaud, ou le résultat de l’enfumage et de l’émaillage.
Les kiwis de Montreuil et Pittorex
Sur le chemin ensuite, je note aussi bien l’architecture insolite qui se mêle aux notes orangées de la saison, que les oeuvres dorées où les textes se devinent chez Pittorex.
L’atelier de Jérome Mesnager
J’arrive alors dans l’atelier de Jérôme Mesnager (dont j’ai parlé plusieurs fois, pour son exposition touchante au Cambodge, ou pour son personnage du “corps blanc” qui se trouvait tout en haut de l’ancien lavoir dans la rue de la Villette). Dans la rue déjà on note sa présence, et sa maison est facilement repérable.
A l’intérieur, l’espace et les oeuvres parlent d’elles-mêmes.
On trouve aussi des créations d’”Artiste ouvrier”, qui dévoile d’ailleurs avec sympathie, quelques pièces inédites dans la maison avec ses créations foisonnantes, qui mêlent les détails et les scènes exotiques.
L’atelier de Sophie Brassard et ses toiles poétiques
Au bout du chemin tortueux, se trouve l’atelier de Sophie Brassard et ses toiles poétiques.
Elles se présentent en panneaux ou en toiles, sur lesquels viennent s’exprimer des motifs abstraits appliqués à l’encre ou la peinture acrylique, laissant libre cours à l’interprétation. On oublie un instant le reste, absorbés dans le mouvement et dans la touche de l’artiste.
Pour découvrir le travail de Sophie Brassard c’est ici
Atelier Pétroland et Alexsander Petrovic
C’est ensuite à l’atelier Pétroland que l’on marque un arrêt. On y découvre le travail étonnant d’Aleksandar Petrovic. Ses créations sont faites en matériaux métalliques de récupération qu’il détourne pour les transformer en objets lumineux. Un univers particulier entre poésie et technique, à découvrir ici
Dale Joseph Rowe
On arrive chez Dale, dans un endroit adorable comme je les aime.
Son travail fixe dans une vision colorée des images de famille, à commencer par la sienne. Entre mémoire et choix d’une image qui joue sur les contrastes des couleurs, on se laisse porter dans différentes occasions. Travaillant sur plaques métalliques, il nous explique avec patience sa technique, qui consiste à dessiner puis peindre par couches et poncées successivement, pour obtenir un résultat patiné et brillant.
L’échange est agréable et donne envie de suivre l’artiste et son travail. C’est une belle rencontre.
Pour connaître le travail de Dale, c’est ici
Je poursuis ensuite au-delà du marché et d’autres ateliers qui semblent m’inviter pour me presser pour ne pas être contrainte par le temps et avoir un instant pour rencontrer Babeth.
Chez Babeth Chaussabel…
Marseille 2013, Babeth ChaussabelSi cela fait un an que nous nous « connaissons » virtuellement et que nous suivons nos quotidien, au gré d’images glanées lors de ses voyages, je découvre dans un format de photos mobiles (carrées), des histoires qui développent en 4 photos sur le même thème. Je me laisse emporter au Laos, à Bali, à Marseille et dans la mer Méditerranée.
Un des tableaux retient car il montre ce qu’il y a au dessus et en dessous de la surface de l’eau, et la matière brute des vagues étincelant au soleil.
Son accueil est agréable et récompense cette longue marche à travers la ville. Nous bavardons longuement et c’est agréable. Une jolie rencontre qui clôt cette journée…
Pour voir le travail de Babeth, c’est ici
A la nuit tombée, un dernier endroit retient mon attention : le 116 rue de Paris, où sera inauguré mercredi 16 octobre 2013, le futur centre d’art contemporain…