A la cour du Roi Arthur, la tension est palpable: un mystérieux chevalier vient d’entrer et d’annoncer qu’il détient en otage des sujets du roi et qu’il ne les libèrera qu’à condition qu’un chevalier vienne se battre pour les regagner, en emmenant en garantie la Reine Guenièvre elle-même. Le Sénéchal Keu, bien décidé à ne pas laisser son roi dans un tel déshonneur, se charge donc d’aller à la fois libérer les malheureux et protéger la Reine. Mais il tombe dans un terrible piège: très vite, Gauvain, l’envoyé d’Arthur, ne trouve nulle trace de la Reine ni de son protecteur. Il rencontre alors un autre Chevalier, mystérieux, prêt à partir à la recherche de sa Reine à n’importe quel prix. Le premier indice se présente en la présence d’un nain qui conduit une charrette. Il sait où sont partis la Reine et les ravisseurs, mais il ne le leur dira que si le Chevalier accepte de voyager dans la charrette. L’hésitation est légitime: seuls les voleurs, les criminels, les êtres les plus vils sont ainsi transportés. Mais le Chevalier n’a pas le choix: pour partir sur la piste de Guenièvre, il doit perdre son honneur.
Ce grand classique met en scène la dévotion faite homme. On devra attendre la fin du livre pour connaître l’identité de Lancelot, même si le titre ne nous laisse que peu de doutes. C’est poussé par un amour totalement dévoué que Lancelot se lance à la recherche de Guenièvre, prêt à abandonner son honneur, à subir les huées du peuple et à risquer le mépris de celle même qu’il cherche et bien sûr à risquer sa vie et à passer au plus près du danger. On comprend mieux d’où vient l’idéal du Chevalier dévoué à sa dame qui n’a aucune pitié pour lui.
Cependant, et heureusement, l’histoire ne s’arrête pas là: l’amour de Lancelot, on le sait, est récompensé. Et les aventures sont encore légion. J’ai beaucoup aimé les petits stratèges et les problèmes créés par la relation entre ces deux personnages mythiques. Les épreuves qui viennent se mettre en travers d’eux sont toutes plus improbables les unes que les autres et c’est bien là le charme d’une telle intrigue. Je garde un souvenir à la fois ému et amusé d’un Lancelot obligé de défendre l’honneur de la Reine en se battant pour prouver que le Sénéchal Keu n’a pas partagé son lit, alors que c’est lui-même qui en sort.
Cependant, je regrette que l’histoire semble tourner un peu en rond et s’éterniser. Le style médiéval et épique a quelques lourdeurs auxquelles j’ai toujours eu un peu de mal à m’habituer.
La note de Mélu:
Un classique qui mérite d’être connu.
Un mot sur l’auteur: Chrétien de Troyes (environ 1135-1190) est un trouvère qui se désigne lui-même sous ce nom. Il affirme être au service de Marie de Champagne, la fille d’Aliénor d’Aquitaine. D’autres de ses oeuvres sur Ma Bouquinerie:
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