La bataille américaine de l’Obamacare : éviter une Sécurité sociale à la française
Publié le 12/10/2013
Aux États-Unis se joue actuellement une importante bataille entre ceux qui défendent les vertus du régime capitaliste avec libre concurrence et ceux qui prônent un système socialisé, étatisé, et corrompu.
Par Bernard Zimmern, d'Emploi2017.
Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi : l’eau – l’argent –, fuit de toutes parts : effectifs de gestion de la Sécu qui n’ont pas diminué malgré l’informatisation, mise à disposition gratuite des effectifs pour des fonctions qui n’ont rien à voir avec la Sécu. Jean-Claude Mailly, secrétaire général de FO est un fonctionnaire payé par la Sécu mais n’y a jamais mis les pieds. Il y a des combines multiples pour faire prendre en charge par la Sécu des coûts qu’elle ne devrait pas supporter, comme la prise en charge des indemnités journalières maladie alors que le bénéficiaire vaque à ses occupations ou est en vacances. Mais il est impossible de contrôler sérieusement une organisation aussi gigantesque que la Sécu qui rappelle feue l’URSS.
Barack Obama a finalement réussi la bataille que mènent les Démocrates et que n’avaient pas réussie Bill Clinton. Il l’a fait grâce à un Sénat où le filibuster (obstruction parlementaire) n’était plus possible ; le filibuster est l’acte de stopper les travaux du Sénat en parlant sans discontinuer nuit et jour ; le Sénat a décidé il y a longtemps que pour empêcher un filibuster il fallait 60 voix sur les 100 du Sénat ; 60 voix était ce dont a disposé Barack Obama 6 mois après les élections de 2008, grâce à plusieurs recours inversant les résultats des élections de 2 ou 3 sénateurs par quelques centaines de voix en faveur des Démocrates [1]. Il a perdu cette possibilité aux élections partielles de 2010.
L’Obamacare, loi de plusieurs milliers de pages votée en 2009, vise de fait à instaurer une Sécurité Sociale à la française car c’est la première étape vers une socialisation, c’est-à-dire une étatisation de la société. Il s’agit théoriquement de permettre à près d’une cinquantaine de millions d’Américains non couverts par des assurances santé de l’être à travers un « marché » où l’État américain proposerait une assurance en concurrence avec les assurances du secteur privé.
Notons d’abord que cela a été un faux problème créé pour des raisons politiques car sur les plus de 40 millions non couverts, moins de 10 l’étaient plus de 18 mois ; la plus grande part était constituée de salariés en transit entre deux emplois et entre deux couvertures.
Mais à voir la fuite des petites entreprises devant les nouvelles charges que leur impose Obamacare, à voir la montée des malades qui viennent se réfugier dans les hôpitaux publics parce que les médecins privés ne veulent plus se plier à toutes les nouvelles règles et charges qu’entraîne Obamacare sur Medicare, l’assurance des plus de 65 ans, on réalise que les États-Unis sont en train de se battre contre l’introduction d’une Sécurité Sociale à la française. Et l’on ne peut que se rappeler les propos de Paul Krugman, prix Nobel, grand commentateur du journal de gauche, le New York Times, et qui défendait Obamacare avant qu’il soit voté en disant : mais la France a déjà depuis longtemps un Obamacare et les Français n’en sont pas plus malheureux ou appauvris comme tout un chacun peut le constater en se promenant à Paris, pour ne pas dire rue de la Paix.
C’est la bataille qui se déroule sous nos yeux au Congrès : la lutte de ceux qui croient encore que, malgré tous ses défauts, un régime capitaliste avec concurrence est infiniment supérieur pour le bonheur, l’épanouissement et la prospérité de ses citoyens à un système socialisé et étatisé où l’appropriation de la croissance et de la richesse se fait par les copineries et les détournements secrets, en fait par la forme que prend la corruption dans les sociétés modernes étatisées.
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Sur le web.
Note :
- Cette remarque, non pour remettre en cause la légitimité de ces élections, mais pour marquer que les grands mouvements de fond d’une nation comme les États-Unis se jouent souvent à quelques centaines de voix. Comme l’élection de Georges W. Bush en 2004. ↩
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