J’ai beaucoup aimé ce livre très court et très intense. J’y ai retrouvé chez Antoinette un portrait d’adolescente particulièrement réussi, qui parvient à mêler avec efficacité le caprice et la révolte enfantine et la rivalité et la frustration toute féminine. Car c’est bien de cela qu’il s’agit: Antoinette se sent femme et ne sait plus comment le montrer à sa mère qui la cantonne à la nursery. C’est d’ailleurs lorsqu’elle aperçoit sa gouvernante en compagnie d’un garçon, flirtant sans retenue, qu’elle entérine sa décision de saboter le bal de sa mère. Voir autant de féminité s’épanouir autour d’elle sans qu’il lui soit permis d’exprimer la sienne lui est insupportable. C’est à la fois très compréhensible et très agaçant.
Ce qui le rend très compréhensible, c’est justement l’attitude de sa mère. Rosine Kampf ne jouit que de la fortune gagnée en bourse de son mari et souhaite être une femme du monde. A ce titre, sa fille n’est qu’un obstacle qu’elle ne peut souffrir. La rivalité mère-fille dans cette course à la popularité est évidente, et si le sujet n’est pas nouveau, il nous invite à nous mettre une minute à la place de cette femme-enfant qui ne trouve pas sa place dans le monde des nouveaux riches convoités par sa mère. Et le père dans tout ça, me direz-vous? Il reste très en retrait, mais c'est pour mieux exploser lorsque la crise éclatera.
La note de Mélu:
Malgré le côté un peu superficiel de ce roman très court, une bonne lecture entre légèreté et amertume.
Un mot sur l’auteure: Irène Némirovsky (1903-1942) est une auteure russe de langue française, morte en déportation. D’autres de ses oeuvres sur Ma Bouquinerie: