Actes Sud (2003) – Collection Un endroit où aller.
Le 2 août 1914, dans un village des Landes, Jules Chabredoux, comme beaucoup de jeunes hommes, doit fouiller entre les piles de draps afin de retrouver son livret militaire. Il quitte à regret sa femme Félicité et son fils Antoine pour rejoindre son régiment, laissant également derrière lui son chien Prince, un colley fidèle et courageux, sa mère Julia, une veuve sévère et murée dans ses certitudes et son frère, Petit-Louis, trop jeune pour être enrôlé. Félicité a fait promettre à Jules de ne pas jouer au héros et de revenir de cette guerre que beaucoup voient comme une formalité vite expédiée. Les premiers combats tournent au désastre, faisant des milliers de morts et le conflit s’installe, dans les tranchées, imposant aux soldats des conditions effroyables. Jules va néanmoins trouver un soutien inattendu lorsque son chien, après avoir traversé la France, le rejoint dans les lignes. Grâce à l’esprit progressiste du lieutenant Bourgeois, Prince va devenir un chien-soldat, contribuant par son intelligence et son dévouement, à la réussite des missions auxquelles il participe.
Tour à tour, au fil des chapitres, Alice Ferney raconte la vie dans les Landes, la vie et la mort sur le front de l’Est. Les femmes, courageuses, assurent les travaux de la ferme, espèrent des nouvelles du front, craignent l’arrivée des gendarmes, porteur d’annonce de mort. Félicité lit et relit les courriers plein d’amour que lui envoie Jules, et résiste à la méchanceté de sa belle-mère. Jules, déjà peu enthousiaste lors de son départ, se rend vite compte de l’enfer qui attend les soldats, dans cette guerre mal préparée. Mais il apprend aussi la camaraderie, la solidarité et apprécie la valeur de son lieutenant, respectueux de ses hommes. L’éducation du chien va souder les hommes et contribuer à garder quelques traces d’humanité malgré l’horreur des offensives et des retraites.
Le sujet n’est pas nouveau, bien sûr, mais Alice Ferney a écrit un livre magnifique, qui par certains aspects, présente un intérêt documentaire passionnant. La description de l’éducation du chien et de son utilisation par l’armée apporte un dérivatif bienvenu à la narration des combats et à leurs conséquences meurtrières. Il y a parfois des longueurs, mais l’écriture est belle, au plus près des sentiments et des sensations, évitant l’outrance et les excès. Un livre fort et éprouvant, pour aborder avec un peu d’avance le centenaire du début du conflit.
D'autres avis chez Babelio, chez Essel et chez Hélène.