Magazine Environnement

Le monde est un labyrinthe

Publié le 09 octobre 2013 par Rolandbosquet

labyrinthe

   Notre ami Joseph, chemineau par goût de la liberté, avait trouvé refuge chez Marthe Dumas, du Mas du Goth, le temps de requinquer sa santé mise à mal par les intempéries, la faim et la maladie. (Mes précédentes chroniques du 25 mars et 6 octobre 2011). A l’issue de longs combats administratifs, nous étions parvenus à lui faire obtenir les aides financières que la collectivité octroie aux citoyens dans la difficulté. En guise de remerciement, il rend aujourd’hui encore maints services à Marthe elle-même ou à ses voisins tout aussi âgés qu’elle. Des services certes limités à la faible hauteur de ses possibilités physiques encore réduites et de ses maigres compétences en matière de bricolage, jardinage et autres babillages. Mais il évite ainsi à la commune de dépêcher auprès de ces vieilles personnes plus ou moins isolées des aides rémunérées et coûteuses pour le contribuable. La mondialisation galopante n’est pas encore parvenue à éradiquer totalement l’économie de troc qui sévit toujours au fin fond des campagnes. Joseph, donc, est apparu, hier midi, sur le pas de ma porte, complètement désemparé. Ils veulent que je le rende, me dit-il en brandissant une lettre à l’en-tête administrative et à la conclusion comminatoire. Selon le signataire, monsieur Jean-Jacques Ducoin, notre ami Joseph étant non seulement sans-logis mais également sans-domicile-fixe, il ne pouvait donc prétendre à des aides réservées aux bénéficiaires justifiant d’une adresse. On pourrait s’étonner de ce que ce brave monsieur Jean-Jacques Ducoin ne s’étonne pas d’envoyer une lettre à un sans-logis sans adresse. Or le document que Joseph serre entre ses doigts est formel. En haut à droite, figurent la date d’envoi et l’adresse du destinataire et, en bas, figurent les noms, prénoms et qualités du signataire suivis de sa griffe énergique et pressée. On pourrait également arguer que c’était le Service lui-même de ce monsieur Jean-Jacques Ducoin qui avait accordé ces aides. Le Directeur qui officiait alors, un certain monsieur Jean-Bernard Dumilieu, avait sans aucun doute recherché toutes les bonnes raisons possibles lui permettant de déclarer la demande irrecevable. N’en ayant pas trouvé, il s’était vu contraint de signer la décision favorable et de la transmettre au Service des Paiements. Celui-ci, méfiant, (les fonctionnaires sont toujours méfiants lorsqu’il s’agit de verser des sommes modiques à de modestes assujettis), ont fort probablement vérifié que les nom, prénom et date de naissance de notre ami Joseph étaient bien inscrits dans la colonne adéquate. A l’issue de quoi, la responsable du Service, une certaine madame Jeanne-Marie Dubord, a signé, à son tour, le bon pour virement. Et l’on voudrait que tout ce travail, gigantesque pour des fonctionnaires empreints de normalitude, soit aujourd’hui remis en question d’un simple trait de plume ! La jurisprudence du bon sens montre que l’administration a toujours raison. Et l’article 2 précise même qu’elle ne saurait avoir tort. Alors, lequel de monsieur Ducoin ou de monsieur Dumilieu est l’intrus ? Qui pourrait les départager ? Ce monde, décidément, est un labyrinthe inextricable et l’on voit bien que, dorénavant, il continuera à tourner aussi mal qu’avant.

Pour suivre régulièrement ces chroniques, il suffit de s’abonner gratuitement à "new letters"


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Rolandbosquet 674 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte