Même les usagers en ont été choqués ! Un certain nombre d’entre eux ont été sollicités (par mail) pour répondre à une enquête en ligne « sur la qualité des services » des bibliothèques municipales parisiennes. Rien sur l’état des bâtiments, les réductions d’horaire ou la baisse des budgets d’acquisition. Toutes les questions sont centrées sur les personnels. Les heureuses élues étant les bibliothèques Hélène Berr, Brassens, Rostand, Yourcenar….
Cette enquête a été commandée à la société Sphinx Institute spécialisée dans les tests de produit. Outre le questionnaire, cet institute est aussi spécialisé dans le …témoin mystère ! Et oui, il ne faudra pas s’étonner de la recrudescence soudaine d’usagers ronchons !
Alors comme ça, si les bibliothèques vont mal ce serait uniquement parce que le personnel ne serait pas assez disponible ? Mais les lecteurs (nombreux) ne se sont pas laissés embobiner par ce vil subterfuge et nous ont alertés presto ! Certains qui n’en font pas mystère ont d’ailleurs laissé des messages rageurs : « Je suis étonné que vous posiez beaucoup de questions sur les personnels, - son accueil, son amabilité, ce dont je n’ai jamais eu à me plaindre et rien sur l’état des bibliothèques. Celle que je fréquente est un four en été, à se faire sentir mal, les ordinateurs de consultion sont d’une lenteur effrayante à décourager toute recherche. La photocopieuse, service essentiel, a été supprimée. C’est effrayant de voir ça à Paris »
Notre fidèle usager est des plus perspicaces, car si les bibliothèques souffrent de carence sur la qualité du service, l’origine se trouve plutôt du côté de l’administration parisienne. Voyons en détail ce qui n'a pas (encore) obtenu le label Qualiparis.
L’état des bâtiments ? Des bibliothèques victimes de chocs thermiques sont transformées soit en espace chaud, soit en espace froid. A Paris, c'est la bibliothèque du futur avant l’heure ! D’autres, victimes de la mousson qui, on le sait, s’abat régulièrement sur la Capitale (Italie et Porte Montmartre). Enfin, il y a celles dont les travaux ont été victimes d’une faille spatio-temporelle comme la bibliothèque Goutte D’or. Malheureusement, là aussi, aucune question sur ce sujet de la part de Sphinx Institute
Les baisses des budgets ? Saluons là le talent de nos experts comptables, de nos Madoff municipaux. Ils ont réussit à mélanger budget de fonctionnement et budget d’investissement. Une véritable hérésie pour tous les adeptes de la comptabilité publique comme nous l'avions révélé il y a deux ans .
A l'époque et pour la première fois, le budget des bibliothèques en préfiguration – Vaclav Havel, Carré St Lazare, Canopée… donc de l’investissement, est venu se greffer sur le budget d’acquisition des autres bibliothèques existantes (donc du fonctionnement). Résultat: le budget total du réseau parisien s’est fait ponctionner en partie par les nouveaux établissements et ce budget n’ayant pas été augmenté, celui-ci est donc très clairement (et plus que jamais) en baisse. Quand aux effectifs supprimés d'année en année ce sont des postes de service public qui manquent régulièrement. Là non plus, les parisiens n’ont pas eu le loisir de donner leur point de vue.
La tentation de Venise ? La Mairie de Paris, on le sait, à la tentation de fermer des bibliothèques. Quelque fois ça marche (Isle St Louis) quelque fois ça rate (Vaugirard). Certaines sont toujours dans la ligne de mire – Château d’Eau, Louvre…- Là aussi le questionnaire est resté muet sur ce sujet
Et ne parlons pas du moral des troupes. Ce n’est pas demain la veille que la Mairie de Paris va se pencher sur les conditions de travail de son personnel touché par la vague perpétuelle de sous-effectifs. Ceux là sont même considérés comme trop nombreux par la municipalité.
Mieux, « travailler en bibliothèque, c’est pas la mine » a osé déclarer un Bertrand Delanoë enfermé dans son bureau de l'Hôtel de Ville. Un mépris envers les bibliothécaires qui pour le coup est lui très Qualiparis.
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