Nous courons le plus vite possible jusqu'à la sortie de l'immeuble.
Dans la rue, le désert. Le silence. Pas une âme qui vive.
Nous restons le dos collé contre le mur de l'immeuble pour ne pas qu'il nous voit, si toutefois il regardait par la fenêtre de là-haut.
- Où est Samuel ?
- La voiture est garée loin maman... Je ne sais pas... Il va arriver.
- Par où ?
- Par là.
- Venez.
Ma mère ne veut pas courir le risque d'attendre en bas de l'immeuble devant l'entrée.
Nous courons le plus discrètement possible vers un amas de buissons pour nous cacher derrière. Pendant quelques minutes, nous guettons l'arrivée de la voiture et l'entrée de l'immeuble.
Le silence de la rue est de plus en plus épouvantable.
Puis le bruit d'une voiture qui arrive au loin.
Au même moment, "l'autre" sort de l'immeuble. Il reste debout, calme. Regarde autour de lui. Fait quelques pas, va sur sa droite puis sur sa gauche. Il guette.
La voiture de Samuel arrive à toute vitesse. La rue est à 200 mètres de nous.
"L'autre" ne la voit pas puisqu'il s'engage de l'autre côté, vers le parking des voitures. Il nous tourne le dos.
- C'est la voiture de Sam !
Alors que nous sortons du buisson, Samuel continu son chemin. Il ne nous a pas vu.
Nous courons à toute vitesse jusqu'à la rue. Ma mère crie :
- Samuel !
Dans son rétroviseur, il nous voit. Il freine brusquement. Nous courons jusqu'à la voiture qui nous attend. "L'autre", qui a entendu le cri de ma mère, hurle :
- Myriam !
Alors que nous nous précipitons pour entrer dans la voiture, "l'autre" court jusqu'à la sienne. Ma soeur prend place à l'avant, côté passager, tandis que ma mère et moi montons à l'arrière. Les portières à peine fermées, Samuel démarre en trombe. Ma mère se retourne aussitôt pour voir ce que fait "l'autre".
- Il a pris sa voiture !
Samuel fonce dans la cité sinueuse. Un véritable enchevêtrement constitué de nombreux sens uniques et de culs-de-sacs. Ma mère l'aide à se sortir de chaque piège de ce labyrinthe.
- Ne tourne pas à droite c'est un cul-de-sac !
Habile, Samuel parvient à circuler à travers cet imbroglio de panneaux et de petites rues. Mais la jungle des routes est quelquefois plus forte.
- Non ! Pas là !
Trop tard. Samuel c'est engagé vers une rue qui ramène vers l'immeuble duquel nous venions de nous échapper.
- Pas là ! On retourne vers la maison !
Soudainement, nous tombons nez à nez avec "l'autre", au volant de sa voiture. Samuel freine sèchement, se retourne et actionne le levier de vitesse. La rapidité avec laquelle il se dépatouille de la situation est impressionnante. Tel un cascadeur de film policier, il remonte la rue en marche-arrière et fait un dérapage digne des plus grandes scènes d'action pour retourner la voiture en marche avant et poursuivre la fuite.
Nous réussissons à sortir de la cité. "L'autre" est toujours à notre poursuite à plusieurs mètres derrière. L'allure est fulgurante. Une course poursuite à travers la ville... Sens interdits, feux rouges non respectés... Tous les risques sont bons pour le semer.
Après plusieurs minutes de lutte acharnée, nous gagnons de l'avance sur lui. Nous sortons de la ville et nous fonçons. Nous fonçons.
Le rétroviseur offre une image de désert. Nous nous retournons pour voir s'il y a une voiture derrière nous.
Rien.
Le néant. Mais nous continuons. Nous fonçons. Nous fonçons le plus loin possible pour nous échapper.
(A suivre.)