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Comment Ryan Leslie m'a retourné le cerveau

Publié le 04 octobre 2013 par Urbansoul @urbansoulmag

Brisons tout de suite la glace : je n’ai jamais été fan à proprement parler de Ryan Leslie. Alors oui, je le respecte en tant que producteur même si je n’ai jamais compris son engouement pour Cassie. Mais à côté de ça, il a quand même signé des titres de Beyoncé (pour Bad Boys II), Mary J. Blige, Chris Brown, Ne-Yo… et même Britney Spears, Booba et M. Pokora. Après, oui, j’ai beaucoup écouté You’re Not My Girl il y a quelques années et j’ai longtemps débuté chacun de mes déplacements en marchant au rythme de Guardian Angel. Mais je n’ai jamais suivi sa carrière religieusement, comptant les jours avant la sortie de son prochain projet. Mais laissez-moi vous raconter le jour où tout a basculé (et je sais ce que la ménagère de moins de 50 ans vient de penser à cet instant précis : la réponse est non, je ne regarde pas cette émission).

Fin juillet, je suis tombée sur l’une de ses interviews pour Medium dans laquelle il évoquait sa nouvelle stratégie marketing mise en place en prévision de la sortie de l’album Black Mozart. Non satisfait de la prétendue interactivité offerte par les réseaux sociaux, Ryan Leslie a en effet décidé de donner son numéro de téléphone et son adresse e-mail à ses fans. « J’avais 550 000 followers sur Twitter et huit retweets, explique-t-il. Ou si je disais quelque chose de profond, une centaine de retweets. Et je me suis dit ‘C’est pas possible que cela génère un engagement. C’est pas possible que ce soit efficace. C’est pas possible que ce soit une bonne utilisation de mon temps’. »

Ses propos ont plus tard résonné en moi quand j’ai témoigné de la difficulté d’un artiste indépendant à lever des fonds pour son prochain projet. Ce dernier avait plus de 10 000 fans Facebook et avait besoin de 10 000 dollars. Un don d’un dollar quand on a toujours profité gratuitement de sa musique, c’était un peu la moindre des choses. Du moins était-ce mon avis. Sauf que ce jeune homme n’a jamais atteint son objectif financier, ni même la moitié de celui-ci. C’est beau, le soutien des « fans ». Et c’est aussi pour réagir face à ses supporters passifs que Ryan Leslie a changé de méthode, planifiant même de se passer d’iTunes. « J’ai choisi de me retirer d’iTunes parce qu’il y avait trop d’anonymat dans ma carrière. Imaginons que je vende 7000 disques en digital au cours des trois prochains mois : si je veux contacter ces gens et juste leur dire ‘Hey les gars, comme vous avez acheté mon album, je peux partir en tournée cette année’, je ne peux pas le faire », a-t-il argumenté. Pour Black Mozart, il a donc lancé un club appelé les Renegades, une initiative à laquelle je reviendrai plus tard…

Plus tard, je me suis enfin attardée sur un lien que j’avais vu passer dans mon feed : celui de son documentaire racontant la réalisation de son album. Un reportage sans aucun doute scénarisé à en croire l’intrigue amoureuse qu’il a inséré entre deux séances studio à Vienne, en Autriche, mais on y découvre toutefois son éthique professionnelle très stricte avec des journées de travail qui s’étendent entre 16h et 4h du matin, et un petit-déjeuner à 7h. Oui, le compte est bon : Ryan Leslie ne dort que 3 heures par nuit. « Il n’y a pas de temps libre mais en même temps, j’ai conscience que la vie que je mène, les voyages et les expériences que je fais, c’est ce pour quoi tellement de gens économisent, a-t-il confié dans Concrete Loop. Il y a tant d’artistes indépendants qui épargnent pour Fruity Loops, Pro Tools, Logic ou Reason et investissent pour un jour vivre la vie que je mène. Donc ça ne m’intéresse pas d’avoir du temps libre : c’est pour ça que je ne dors que trois heures par nuit ! »

Le court-métrage de 25 minutes dévoile aussi quelques extraits de l’album Black Mozart qui n’était pas encore disponible à l’époque et… j’ai trouvé ça tellement lourd que ça a finalement attisé ma curiosité au point de me pousser à l’achat. Lavage de cerveau je vous dis !

Black Mozart est composé de 12 titres sur lesquels Ryan Leslie s’illustre majoritairement en tant que rappeur, n’en déplaise à certains. « Je n’ai pas décidé de faire une transition vers le rap. J’ai juste décidé de faire les disques que j’avais envie de faire, avait-il souligné à Medium. Si vous estimez d’un point de vue divertissement ou inspiration que cela ne vaut pas la peine pour vous de suivre mon parcours en tant qu’individu, c’est un sacrifice que je suis prêt à faire pour pouvoir entreprendre la progression artistique que je souhaite entamer. »

J’ai donc dépensé 12 dollars soit 8 euros pour devenir une Renegade et pouvoir télécharger ensuite légalement Black Mozart (et l’album qui arrive, et les suivants aussi). Ça vous rappelle les fan clubs à l’ancienne ? A moi aussi. Sauf que l’artiste de 34 ans précise qu’il ne s’agit ici que de musique. « C’est le seul endroit au monde où vous pourrez accéder légalement à ma musique. Si vous la prenez ailleurs, je qualifierai ça de vol. Même si je voudrais que ma musique soit distribuée aussi largement que possible, ça ne m’intéresse pas de connaître les idées, les opinions ou les activités de personnes qui téléchargent illégalement les disques que je crée. J’investis beaucoup d’efforts, de passion, d’énergie et de collaborations pour faire cette musique », a-t-il déclaré sans langue de bois à Soultrain.

TÉLÉCHARGEZ BLACK MOZART

Est-ce que j’ai aimé Black Mozart ? Oui. Mais est-ce que je préférais Ryan Leslie en chanteur ? A nouveau, oui. Et si tel était aussi votre cas, l’intéressé annonce « Aux gens qui dépensent des sous pour ma musique et ne l’aiment pas, je les rembourserai s’ils le veulent, honnêtement ». Je n’ai pas testé. Mais par contre, en adhérant à la Renegade Nation, il faut savoir que Ryan Leslie a directement récupéré mes données, m’offrant ainsi le privilège d’entrer en contact avec lui et d’obtenir une réponse garantie. Et ça, j’ai testé. Et approuvé puisque j’ai à chaque fois reçu un e-mail dans des délais incroyables.

Certes, je lui ai écrit d’abord par curiosité, histoire de voir s’il tenait ses promesses. Mais aussi parce que je comprends son envie d’évolution et que j’applaudis son soutien aux jeunes talents comme Courtney Bennett (chanteuse londonienne de 19 ans), WondaGurl (productrice canadienne de 16 ans) ou encore Jenny Suk (est-ce que je dois vraiment encore vous la présenter ?). Mais surtout, parce que je me suis rendue compte de ce renouveau d’ambition qu’il avait insufflé en moi. Parce que je n’ai pu m’empêcher de sourire en réalisant que ses interviews, son documentaire ou son album inspirent certains à voir les choses en grand, à sortir des sentiers battus, à se montrer innovateurs et créatifs et à toujours travailler plus dur. Et je trouvais que ça méritait bien un merci.

Si vous voulez vous aussi tenter l’expérience, vous pouvez envoyer votre prose à [email protected]. Ou si vous êtes riche, vous pouvez même essayer le téléphone au +1-915-600-6978. OU il vous reste toujours la possibilité d’espérer échanger après son concert le 18 octobre prochain au Carré de Willebroek.

Breaking news : Inspiré par Ryan Leslie, Talib Kweli vient d’annoncer le lancement de son propre club via lequel vous pourrez obtenir son prochain album Gravitas. Une révolution serait-elle en marche ?


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