Heureusement pour l’Italie, mais aussi pour l’Europe, la dernière contorsion politique conçue par Silvio Berlusconi s’est conclue en zigzags. Des sénateurs de son parti ayant décidé de ne pas lui obéir, le chaos souhaité par ce dernier a été évité. Simultanément, ici et là en Europe, des partis partageant bien des idées de Berlusconi ont pris de l’essor.
Le premier ministre italien Enrico Letta a eu les mots qu’il fallait pour éviter un énième drame politique. En clamant que « l’Italie court un risque fatal », car si d’autres élections étaient provoquées, le pays serait alors « ingouvernable », le chef de la coalition gauche-droite a introduit par la grande porte le principe de réalité dans une enceinte, le Sénat, souvent rythmée par les accents de la démagogie, du mensonge et de l’intérêt personnel. Bref, le pire a été évité et la justice devrait reprendre certains de ses… droits !
En effet, le baroud d’honneur de Berlusconi s’étant terminé en eau de boudin, il va logiquement perdre son immunité parlementaire et sera donc condamné à purger sa peine, en tout ou en partie, pour avoir été reconnu coupable de fraude fiscale. Il faut rappeler que son dernier « coup » politique, soit ordonner la démission des cinq ministres membres de son parti, a été conçu avec l’espoir de conserver son mandat d’élu le plus longtemps possible. Il est probable que l’on vienne d’assister à la mise entre parenthèses de sa vie politique, mais pas de… ses idées.
On ne soulignera jamais assez qu’après avoir fondé Forza Italia en 1994, il s’est lié à la Ligue du Nord. De fait, il a donné du crédit, qu’on le veuille ou non, aux thèses racistes de la Ligue en question. Au programme anti-immigrant de cette dernière qui, une fois, au gouvernement de Berlusconi demandera et obtiendra le portefeuille de l’immigration. Et d’une. Et de deux, le parti néofasciste Alliance nationale dirigé par Gianfranco Fini s’est fondu, pour ainsi dire, dans Forza Italia. Et de trois, et surtout, les Le Pen italiens ont été au pouvoir sans que cela crée de remous ailleurs sur le Vieux Continent.
On insiste : ils ont été au pouvoir. Ce faisant, « Berlu » et ses amis ont donné l’exemple. Si cette semaine, l’extrême droite a enregistré une hausse de 4 % des suffrages en Autriche, à 21,4 % (!), et si le score réalisé en Norvège lui permet de rentrer au gouvernement, c’est bel et bien parce que les victoires de l’homme le plus riche d’Italie ont décomplexé, si l’on peut dire, les porte-étendard des thèses qui demeurent nauséabondes. À cause de Berlusconi et d’Umberto Bossi, l’ex-patron et fondateur de la Ligue du Nord, les thèses en question se sont banalisées. À telle enseigne que par un effet miroir dont l’histoire a parfois le secret, cette banalisation a favorisé une cristallisation des pires postures politiques qui soient en Hongrie et en Grèce.
En Hongrie, les agissements du premier ministre Viktor Orban ont été jugés assez lugubres, c’est le moins qu’on puisse dire, que l’Union européenne (UE) lui a consacré un rapport pour mieux condamner, en juillet dernier, ses multiples atteintes à la démocratie. C’est à noter, il s’agissait d’une première dans l’histoire de l’UE. En Grèce, le gouvernement d’Antonis Samaras s’est enfin réveillé en envoyant la direction de la formation nazie Aube dorée en prison. Pour avoir assassiné il y a une dizaine de jours un rappeur, deux immigrants pakistanais antérieurement, et multiplié les exactions contre les « bronzés » des années durant, le procureur général a estimé que ce parti, qui a « réussi » à faire élire 18 des siens au Parlement, était en fait une organisation criminelle.
Cette histoire a ceci de sidérant que le cortège de régressions inhérentes à l’extrême droite suscite peu de sursauts des dirigeants européens. Dangereux ! Et en France on assiste à la déplorable campagne de Marine Le Pen pour tenter de nous dissuader du findement fasciste, d'exrême-droite, de son Front National! J'ai pas vu ni lu beaucoup de réaction locale sur cette entourloupe...