Olivier Morel et Maël – Revenants

Par Yvantilleuil

Après avoir réalisé un documentaire (L’âme en sang) consacré aux vétérans américains traumatisés par la guerre en Irak, Olivier Morel leur consacre une bande dessinée. Ce one-shot qui suit le parcours du cinéaste durant la réalisation du documentaire n’est pas l’album du film, mais l’histoire des liens et des rencontres qui se sont tissés durant la réalisation du projet.

Les gens qu’Olivier croise durant cet album sont atteints du syndrome de stress post-traumatique. L’un a vidé sa mitraillette sur un corps inanimé, l’autre a braqué son fusil sur des enfants irakiens qu’il connaissait, un troisième a torturé des prisonniers dans la prison d’Abou Grahib. Tous sont certes revenus, mais ils ne sont plus les mêmes et aucun ne connaîtra plus jamais la paix après cette guerre qui a marqué leurs esprits.

« Revenants » raconte les repérages de l’auteur, ses premières rencontres avec les revenants, les drames qu’ils ont vécus et l’impact de ces histoires sur celui qui les relate. Le lecteur découvre des personnes isolées, qui n’ont pas l’habitude de recevoir la parole. Une fois la confiance installée, les langues se délient, les doutes, la colère, la peur et la culpabilité remontent à la surface. Les fantômes avec lesquels ils doivent constamment se battre deviennent visibles et le lecteur finit par comprendre pourquoi beaucoup de ces laissés pour compte terminent SDF ou finissent par se suicider. Hantés par les cauchemars de ce qu’ils ont vu et vécu, ils sont dorénavant incapables de réintégrer l’American Dream.

Si cet album poignant dénonce la guerre en donnant la parole à ceux qui n’en sont pas revenus indemne, il invite également le lecteur réfléchir et pousse même l’auteur français naturalisé américain à s’interroger sur sa situation personnelle. Par contre, le passage d’un vétéran à l’autre manque souvent de fluidité et ce manque de structure empêche le lecteur de s’immerger complètement dans ses tranches de vies entremêlées de manière un peu désordonnée. C’est un peu dommage car, individuellement, la plupart de ces histoires s’avèrent poignantes.

Visuellement, Maël (Notre mère la guerreL’encre du passé) livre à nouveau un travail exemplaire, surtout au niveau de la colorisation. Il utilise en effet des teintes rougeâtres et orangées pour mettre les peurs, les souvenirs et les hallucinations des protagonistes en images. Il parvient ainsi à visualiser les traumatismes invisibles et renforce la puissance du récit.

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