Faites un bisous à vos grands-parents de la part du gouvernement
Publié le 3/10/2013
Les mouvements de révolte se succèdent ; les salariés n'hésitent plus à manifester leur désaccord avec les syndicats, les entreprises commencent à entrer en conflit ouvert avec l'administration. Bientôt la répression ?
Par Baptiste Créteur.
Là où les syndicats jouent les gros bras mais se rabibochent volontiers avec les politiques à coups de tapes dans le dos après avoir séquestré des patrons et brulé des pneus, les entreprises ont un moyen puissant de faire pression sur l’État : elles le touchent directement au portefeuille.
Jusqu'à présent, elles se contentaient de mourir la bouche ouverte et leurs créateurs de quitter le pays quand ils n'avaient pas perdu la flamme, de jurer qu'on ne les y reprendrait plus lorsqu'elle était éteinte. Bon an mal an, les créations d'emploi ralentissaient, le chômage augmentait, mais ça arrangeait presque les gouvernements successifs qui pouvaient conserver un thème de campagne facile et s'assurer un public d'avance conquis par la distribution d'argent gratuit.
Mais aujourd'hui, les créateurs entrent en conflit ouvert avec l'administration en refusant de payer leurs charges, en quittant la sécurité sociale pour souscrire une assurance maladie privée offrant les mêmes prestations pour un coût bien moindre, en manifestant même devant les instances de l'administration fiscale. Et quand on touche au portefeuille, c'est plutôt douloureux.
D'autant plus que l’État est en état de quasi-faillite, avec des taux d'intérêt qui augmentent tranquillement et rendent le service de la dette de plus en plus pesant. Ajoutons à cela des embauches massives de fonctionnaires, des chômeurs de plus en plus nombreux et des recettes fiscales qui n'augmentent pas tout à fait autant que prévu par les stagiaires de Bercy, et on comprend que la situation soit plutôt tendue.
Plus grave pour le gouvernement, de nouveaux mouvements se créent, de plus en plus rapidement : à peine un rapport sort que la filière viticole se mobilise déjà, et on ne compte plus les mouvements d'entrepreneurs qui se rassemblent autour de problèmes communs – artisans, médecins et, récemment, très petites entreprises.
Et ça tombe mal ; les contribuables se rebellent au moment même où le gouvernement estime la situation des jeunes un peu trop tendue pour ne pas dégénérer et promet une sorte de RSA aux jeunes décrocheurs. Le message est assez simple : si on est, entre 18 et 25 ans, déjà assez désœuvré pour n'être ni en train d'apprendre, ni en train de travailler, l’État récompense cette belle oisiveté avec 493 euros par mois. Sympa.
Au moment où la diminution de la dépense publique devient la seule option pour éviter la faillite, c'est assez incompréhensible, sauf si on imagine que l’État s'estime moins aux abois que les jeunes branleurs désœuvrés et préfère fouetter d'autres chats.
Il faudra bien que quelqu'un paie. Les entreprises sont déjà au bord de la rupture, certaines prêtes à agir, d'autres ayant commencé à le faire. Les nouveaux contribuables (un petit million, bienvenue à eux) se laisseront difficilement faire, si tant est qu'ils aient déjà les bons réflexes et de quoi payer quand les échéances arriveront – et on parle de citoyens assez loin de rouler sur l'or. Augmenter le coût du travail est impensable. La TVA doit déjà augmenter, et ça n'est pas très compatible avec le pouvoir d'achat. Alors, que faire ?
La question est ouverte. Le gouvernement fera indubitablement preuve d'une grande créativité ; la pause fiscale, le frémissement, les emplois francs et d'avenir ne sont rien à côté des trésors d'ingéniosité que l'administration fiscale va déployer pour boucler les fins de mois. La question est : qui va payer ?
Puisque les révoltes vont de plus en plus vite et de plus en plus loin, qu'il y a déjà un radar tous les cent mètres et que réduire les prestations de l’État-providence pour les jeunes ne semble pas être une option, je vous laisse deviner quelle catégorie de Français va payer l'addition. Faites un bisous à vos grands-parents de la part du gouvernement, on ne sait jamais.
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