02 octobre 2013
«Je ne pense pas toujours à faire des nouveautés, à être créatif, mais à faire un vêtement pour que les femmes soient belles» … Que peut-on dire de plus ? retenue et simplicité, les maîtres-mots de cette consécration, où on neverra aucun portrait du couturier ....
Alors, cette première rétrospective du travail d'Azzedine Alaïa au Palais Galliéra, qui vient de retrouver ses belles couleurs après quatre années de rénovation, est un enchantement. Loin des polémiques stériles sur l'art contemporain, une exposition d'un tel artiste vivant constitue une rareté. Car chacune des créations de cet artiste est absolument sublime, aussi bien dans sa structure, sa construction que dans ses détails.
Dans la lignée des Madeleine Vionnet, Madame Grès, Balenciaga, Givenchy ou Yves Saint-Laurent, la Haute Couture est ici maîtrisée dans la plus pure tradition de l'art français. Pourtant, la destinée de ce petit homme brun au regard brillant, né en à Tunis en 1940, n'était pas écrite. Il commence à travailler tout jeune avec sa sœur couturière, s'inscrit aux Beaux-Arts de Tunis en section sculpture, puis vient à Paris où il rencontre de bonnes fées qui apprécient son talent. Travailleur acharné, son style est absolument original et reconnaissable entre tous.
Et la mise en scène des 70 modèles, particulièrement sobre (réalisée par Martin Szekely), est complétée par de brillantes explications d'Olivier Saillard, le directeur du Palais Gallieéa. Grâce à elle, on peut voir de près les détails : incrustations des fermetures à glissières enroulées telles un serpent autour des reins, de ces cuirs découpés avec, en transparence, des couleurs vives, les casaques évoquant l'Afrique avec humour et tendresse, les drapés, les vides et les « crevés » de la robe à claire voie …
Des modèles hors du temps et hors des saisons, un art consommé de la provocation tranquille, très apprécié de vedettes du monde entier : on « voit » surgir Grace Jones, Naomi Campbell, Rihanna ou, surgie de l'imaginaire du cinéma français, la belle Arletty pour laquelle Alaïa a créé ce haut de chausses directement inspiré du film « Les visiteurs du soir ».
C'est le corps de la femme qui donne le volume à la robe, et toutes méritent d'être appréciées en 3D. Mais « mince » (et c'est bien le cas de le dire) il faut un corps de déesse pour porter ces secondes peaux ….Cependant, Azzedine Alaïa poursuit son répertoire au-delà du domaine de la robe. Sa maîtrise de la coupe s'exprime avec encore plus de clarté dans ses manteaux et vestes de lainage, et dans ses faussement pudiques corsages blancs.
Bref, une jouissance absolue que cette exposition, expression contemporaine de la cohérence et de l'harmonie dans la créativité. Il faut y courir !
Palais Galliéra, 10 avenue Pierre 1er de Serbie, jusqu'au 26 janvier, tous les jours sauf le lundi à partir de 10 heures, 8€.