François Hollande a fait savoir lors de la conférence sociale qu’il comptait faire face au problème du coût du travail et de son poids sur l’industrie française. Il a néanmoins toujours refusé jusqu’ici de reconsidérer l’abrogation de la loi sur la défiscalisation des heures supplémentaires alors qu’elle est réclamée par les entreprises et les salariés.
Durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, le 1er octobre 2007, entrait en vigueur la loi sur les heures supplémentaires défiscalisées : réduction des cotisations sociales pour les salariés du privé et de l’impôt sur le revenu pour les salariés du public et du privé ; réduction forfaitaire de cotisations sociales pour les employeurs ; valorisation salariale des heures travaillées au-delà de la durée légale de 35 heures par semaine, voilà en substance le contenu de cette loi.
Après de farouches oppositions entre la gauche et la droite, le 19 juillet 2012 les députés abrogeaient la loi, symbole du « travailler plus pour gagner plus » de Nicolas Sarkozy. François Hollande l’avait promis pendant sa campagne. Elle coutait trop cher aux finances publiques (5 milliards d’euros par an) affirmait la Cour des comptes, pour qui le un budget était bien trop important compte tenu d’une « efficience pas encore établie ».
Il serait peut-être judicieux de reconsidérer la question aujourd’hui tout en triant le bon grain de l’ivraie afin de ne pas commettre les erreurs de 2007. Parmi elles, le manque de clarté et la complexité des formalités administratives. Selon une étude de l’ANDRH (Association nationale des directeurs des ressources humaines) réalisée à la suite de l’entrée en vigueur de la loi, 71 % des responsables des ressources humaines considéraient qu’elle était difficile à mettre en place.
La révision de la fiscalité du travail est une demande des entreprises françaises en mal de compétitivité qui saluent sans s’en contenter tout à fait « le choc de simplification » entrepris par le Gouvernement. Le projet de loi présenté le 4 septembre vise en effet à rendre plus limpide la jungle réglementaire dont se plaignent actuellement les entreprises. Mais coupler la simplification administrative à la défiscalisation des heures supplémentaires, voilà qui constituerait une belle victoire pour les chefs d’entreprises.
Le député Yves Jégo, vice-président de l’UDI lançait dimanche 22 septembre une pétition pour revenir au dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires. Avant lui, le député PS Thierry Mandon en avait également formulé la demande cet été. Selon lui, sa suppression a privé des millions de salariés modestes d’un complément de revenu qui aurait permis de stimuler le pouvoir d’achat. Cette requête avait été rejetée par le Gouvernement et François Hollande a de nouveau refusé de revenir sur ce dossier lors de son intervention sur TF1 le 15 septembre.
Les Français aussi, dans la situation de « ras-le-bol fiscal » dans laquelle ils se trouvent, sont nettement favorables au retour de la mesure. Selon un sondage BVA/i -Télé publié samedi 14 septembre, près de 8 Français sur 10 se sont prononcés en faveur d’une exonération d’impôts sur le revenu lié aux heures supplémentaires. Cet assentiment quasi unanime va à l’encontre de l’argument selon lequel la défiscalisation des heures supplémentaires ne profite qu’aux salariés les plus aisés.
Pour les entreprises, l’intérêt est double. Outre les économies évidentes réalisées lors de l’imposition, les chefs d’entreprises acquièrent la flexibilité dont ils ont besoin pour répondre aux carnets de commandes qui n’ont rien de stable depuis le début de la crise. Il est tout à fait irréaliste de cumuler toutes les heures supplémentaires réalisées par les salariés français pour expliquer ensuite que ce serait autant d’heures pour lesquelles les entreprises pourraient créer des postes. Il s’agit souvent pour l’employeur d’une poignée d’heures supplémentaires, avec des variations dans l’année. Pas vraiment de quoi permettre un véritable recrutement.
« Tout le monde s’y retrouve dans cette défiscalisation. Ce mécanisme a déjà fait ses preuves en matière de compétitivité des entreprises comme en faveur du pouvoir d’achat des ménages », assure Marc Le Fur, Vice-président de l’Assemblée nationale, député des Côtes d’Armor et membre de Génération entreprise entrepreneurs associés (GEEA), actif sur les questions de compétitivité entrepreneuriale. Il a déposé une proposition de loi visant à réintroduire la défiscalisation des heures supplémentaires tandis que son confrère Olivier Dassault a de son coté proposé une loi constitutionnelle afin d’encadrer la rétroactivité des lois fiscales.
À l’heure où les entreprises ont besoin d’assouplir leur marge de manœuvre et les salariés d’améliorer leur pouvoir d’achat, la défiscalisation des heures supplémentaires est une solution à laquelle il faut réfléchir. François Hollande ne devrait pas l’exclure d’office. Il risque de priver la France d’un autre moyen de se remettre en piste, et surtout de mécontenter des esprits déjà suffisamment échauffés.