Cyril Attrazic
Chez Camillou par Patrick Faus
à Aumont-Aubrac (Lozère)
Une histoire familiale comme on les aime dans cette France qui n’en finit pas de résister pour rester elle-même et conserver des bribes de l’ancien monde. Il ne s’agit pas d’un musée, figé dans une attitude du « c’était mieux avant ». C’est un restaurant qui vibre, bouge, écoute, goûte aux saveurs de partout, avec Cyril Attrazic, héritier du fameux Camillou qui a vu passé trois générations de restaurateurs. Ça aide sur le plan sentimental et ça donne des ailes pour faire et parfaire sa propre identité.… l’obsession sans cesse renouveler de mettre le paysage dans l’assiette…
Cyril l’a forgée chez Alain Ducasse et il lui en reste un savoir faire sur les sauces, les jus et la mise en avant des goûts évidents. Puis, incontournable dans cette région, l’escale chez le dieu de l’Olympe de l’Aubrac : Bras. Une histoire de famille aussi, dans les mêmes montagnes, et un apprentissage sur les cuisons, les herbes et les parfums du matin dans la campagne. L’obsession
sans cesse renouvelée de mettre le paysage dans l’assiette.
Cyril Attrazic réussit bien cette peinture en saveurs. Il la définit à sa manière, moins épurée que Michel Bras, plus sophistiquée que l’école Ducasse. Un équilibre fragile comme tout travail sur un fil, parfois bancal, parfois d’une justesse éblouissante mais toujours passionnant. L’enthousiasme et les idées du chef se retrouvent fringantes dans l’assiette.
Si Cyril était un plat, ce serait cette merveille de pensée et de réalisation : Nouilles de céleri rave, champignons du massif, jus à l’huile de truffe. Son copain Yannick Alléno, origine Lozère aussi, le dévore à chaque passage. Il a raison, c’est beau, goûteux, plein de sous-bois de fin d’été, de saveurs imbriquées et d’arômes subtils mais puissants. Un grand plat qui va le suivre longtemps.
Pendant la lecture de sa carte superbe et appétissante,
à la fois sophistiquée et très « terroir », il lance quelques remarquables amuse-bouches dont un cromesquis addictif. Mais le cromesquis n’est-il pas addictif par essence ? Puis, une Tomate cœur de bœuf, truffe d’été, fromage frais fumé qui ne décolle pas, qui reste un peu en deçà des attentes, peut-être trop recherchée, mais surtout trop sucrée pour un démarrage de repas. Mais le lapin arrive et tout va bien avec son épaule confite et caramélisée, pure merveille de sensations profondes et claires. Cuisson, texture, saveurs, une perfection. Le veau de pays est rôti, sa poitrine au barbecue, des faux poivrons et des oignons brulés, beau plat, riche et goûteux, à la cuisson idéale et pour le rassurer et nous rappeler que nous sommes à Aumont-Aubrac une cocotte d’aligot de la meilleure veine bien que moins « fromagé » que dans la tradition qui avant tout, nourrissait son homme. Plateau de fromages lozérien, magnifique, et un exquis Croustillant au fromage blanc citronné, fraises en sorbet, blanc manger à l’estragon. Ça s’appelle un point d’orgue.
Cyril Attrazic a traversé une frontière, celle du département, d’une cuisine de tradition, comme son père Francis, aujourd’hui président des Maîtres Restaurateurs, avait traversé la rue pour agrandir l’établissement familial. Chacun sa pierre. Celle de Cyril est fraîche, encore jeune, vivante, pleine de cet avenir qu’il distingue déjà. Il a été le premier a donné une étoile Michelin à la famille en 2007, perdue puis retrouvée il y a peu. Il aime cette richesse des produits, du gibier l’hiver, des champignons l’automne, du veau, des agneaux, des poissons des lacs et des rivières, des asperges du printemps et des courgettes de l’été. Il s’en empreigne, et les ressert dans leur luminosité.
Pour en exprimer au mieux les saveurs mais en plus de simplicité, il a ouvert Le Gabale, une brasserie aux prix doux et aux plats de famille. Nous ne sommes qu’au début de Cyril Attrazic…
Questions au chef
Le déclic cuisine ? Quand ? Comment ?
De tout temps, j’ai su que je resterais ici ou que j’y reviendrais car c’est ma maison et j’y tiens. J’ai fait mes classes chez Ferrandi, Gérard Vié à Versailles, Alain Ducasse au 59, puis en Angleterre et c’est là que j’ai eu la passion de la cuisine. J’avais déjà 20 ans et c’est donc venu tard.
Quelques noms qui vous ont tiré vers le haut ?
Incontestablement, Michel Bras. J’étais copain avec Sébastien Bras qui m’avait invité deux jours là-bas. Bras c’est le contemporain du territoire, un auteur, qui travaille
autre chose que la truffe, le foie gras ou des produits prestigieux. Chez Bras, j’en ai pris plein la figure. Il avait 15 ans d’avance et il les a encore aujourd’hui. Il y a aussi Juan Roca plus récemment qui m’a époustouflé par sa technique.
Comment se situe votre lien au terroir qui vous entoure, la Lozère, l’Aubrac ?
C’est long et compliqué de trouver un équilibre et surtout son équilibre. Avec ce territoire, il y a tellement à faire que ça paraît sans fin. Donc, je fais mon chemin.
Des choses qui vous énervent, agacent ?
La volonté de certains de nous imposer un minimum de variétés de légumes, ou d’agrumes comme le citron, de fruits, etc… L’uniformisation des produits qui tue la variété. C’est à nous, dans les campagnes, d’essayer de préserver la variété des produits. Comme Passédat à Marseille qui a cherché d’autres poissons à préparer et à proposer sur sa carte. Il a une variété extraordinaire que l’on ne connaissait pas avant lui.
Le dernier repas qui vous a fait tomber de votre chaise ?
Il y a longtemps que je ne suis pas tombé de ma chaise ! Le dernier en date : Yannick Alléno au Meurice il y a trois ans. Roca en Espagne, où je me demandais pendant tout le repas comment il fait tellement c’est incroyable. Je n’ai toujours pas la réponse….
Restaurant Cyril Attrazic
10, route du Languedoc
48130 Aumont-Aubrac
Tél : 04 66 42 86 14
www.camillou.com
Fermé du 10 janvier au 14 février
Fermé dimanche soir, lundi et mardi midi
Maître restaurateur
Logis de France
Menus : déjeuner en semaine : 30 € (3 plats)
Chemin d’Aubrac : 45 € (3 plats et fromages)
Sentier d’Aubrac : 80 € (6 plats et fromages)
Carte : 65 € environ
Le Gabale
Menus : 16 € et 32 €
Carte : 35 € environ
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Chez Camillou par Patrick Faus
à Aumont-Aubrac (Lozère)
Cyril l’a forgée chez Alain Ducasse et il lui en reste un savoir faire sur les sauces, les jus et la mise en avant des goûts évidents. Puis, incontournable dans cette région, l’escale chez le dieu de l’Olympe de l’Aubrac : Bras. Une histoire de famille aussi, dans les mêmes montagnes, et un apprentissage sur les cuisons, les herbes et les parfums du matin dans la campagne. L’obsession
sans cesse renouvelée de mettre le paysage dans l’assiette.Cyril Attrazic réussit bien cette peinture en saveurs. Il la définit à sa manière, moins épurée que Michel Bras, plus sophistiquée que l’école Ducasse. Un équilibre fragile comme tout travail sur un fil, parfois bancal, parfois d’une justesse éblouissante mais toujours passionnant. L’enthousiasme et les idées du chef se retrouvent fringantes dans l’assiette.
Si Cyril était un plat, ce serait cette merveille de pensée et de réalisation : Nouilles de céleri rave, champignons du massif, jus à l’huile de truffe. Son copain Yannick Alléno, origine Lozère aussi, le dévore à chaque passage. Il a raison, c’est beau, goûteux, plein de sous-bois de fin d’été, de saveurs imbriquées et d’arômes subtils mais puissants. Un grand plat qui va le suivre longtemps.
Pendant la lecture de sa carte superbe et appétissante,
Cyril Attrazic a traversé une frontière, celle du département, d’une cuisine de tradition, comme son père Francis, aujourd’hui président des Maîtres Restaurateurs, avait traversé la rue pour agrandir l’établissement familial. Chacun sa pierre. Celle de Cyril est fraîche, encore jeune, vivante, pleine de cet avenir qu’il distingue déjà. Il a été le premier a donné une étoile Michelin à la famille en 2007, perdue puis retrouvée il y a peu. Il aime cette richesse des produits, du gibier l’hiver, des champignons l’automne, du veau, des agneaux, des poissons des lacs et des rivières, des asperges du printemps et des courgettes de l’été. Il s’en empreigne, et les ressert dans leur luminosité.
Pour en exprimer au mieux les saveurs mais en plus de simplicité, il a ouvert Le Gabale, une brasserie aux prix doux et aux plats de famille. Nous ne sommes qu’au début de Cyril Attrazic…
Questions au chef
Le déclic cuisine ? Quand ? Comment ?
De tout temps, j’ai su que je resterais ici ou que j’y reviendrais car c’est ma maison et j’y tiens. J’ai fait mes classes chez Ferrandi, Gérard Vié à Versailles, Alain Ducasse au 59, puis en Angleterre et c’est là que j’ai eu la passion de la cuisine. J’avais déjà 20 ans et c’est donc venu tard.
Quelques noms qui vous ont tiré vers le haut ?
Incontestablement, Michel Bras. J’étais copain avec Sébastien Bras qui m’avait invité deux jours là-bas. Bras c’est le contemporain du territoire, un auteur, qui travaille
Comment se situe votre lien au terroir qui vous entoure, la Lozère, l’Aubrac ?
C’est long et compliqué de trouver un équilibre et surtout son équilibre. Avec ce territoire, il y a tellement à faire que ça paraît sans fin. Donc, je fais mon chemin.
Des choses qui vous énervent, agacent ?
La volonté de certains de nous imposer un minimum de variétés de légumes, ou d’agrumes comme le citron, de fruits, etc… L’uniformisation des produits qui tue la variété. C’est à nous, dans les campagnes, d’essayer de préserver la variété des produits. Comme Passédat à Marseille qui a cherché d’autres poissons à préparer et à proposer sur sa carte. Il a une variété extraordinaire que l’on ne connaissait pas avant lui.
Le dernier repas qui vous a fait tomber de votre chaise ?
Il y a longtemps que je ne suis pas tombé de ma chaise ! Le dernier en date : Yannick Alléno au Meurice il y a trois ans. Roca en Espagne, où je me demandais pendant tout le repas comment il fait tellement c’est incroyable. Je n’ai toujours pas la réponse….
10, route du Languedoc
48130 Aumont-Aubrac
Tél : 04 66 42 86 14
www.camillou.com
Fermé du 10 janvier au 14 février
Fermé dimanche soir, lundi et mardi midi
Maître restaurateur
Logis de France
Menus : déjeuner en semaine : 30 € (3 plats)
Chemin d’Aubrac : 45 € (3 plats et fromages)
Sentier d’Aubrac : 80 € (6 plats et fromages)
Carte : 65 € environ
Le Gabale
Menus : 16 € et 32 €
Carte : 35 € environ