Un Japonais en Argentine, un Espagnol en Chine, deux photographes en noir et blanc aux styles opposés, à la Galerie Kamel Mennour, jusqu’au 10 Mai.
Daido Moriyama est un photographe de l’instant, qui capture ses scènes à la volée, avec une pulsion scopique, une frénésie boulimique. Ce sont des petits morceaux de vie arrachés ici ou là, pas toujours nets, pas toujours bien cadrés. Il est fait pour le tumulte, le désordre, les villes trépidantes. Sa série Untitled (Buenos Aires, 2007) montre des vues de la ville qui sont d’une densité étonnante. Ainsi ce pont métallique au dessus des eaux noires du port prend-il un aspect étrange, médiéval, inquiétant, sur un ciel aux couleurs changeantes. Une de mes photos préférées est ce jeu d’ombres dans une impasse, où se profile l’image intruse du photographe au premier plan.
Alberto Garcia-Alix, lui, est un homme calme et posé; ses photos ont une beauté démontrée, construite, formelle. Leur géométrie, traits et lignes soigneusement tracés et cadrés, en est le bâti. Cette composition d’un arbre et d’un mur, de branches réelles et d’ombres de branches (Bian Yuan, 2007) est un bel exercice de logique, de composition, frôlant le trompe-l’oeil, décevant le regard. Cette autre (Cangrejo de las pinzas de Oro, 2007) joue avec l’alphabet des tronc verticaux, des barres horizontales et des idéogrammes, construisant un poème complexe où le crabe aux pinces d’or, mystérieux, symbolique, couronne la scène.
Votre tempérament, vos goûts vous portent immédiatement plutôt vers l’un ou vers l’autre. Mais la stimulation ici vient surtout de la tension, du contraste entre eux deux.
Photos © Dado Moriyama et Alberto Garcia-Alix, respectivement; courtoisie des artistes et de la galerie Kamel Mennour.