Le syndrome bleu marine

Publié le 27 septembre 2013 par Sylvainrakotoarison

Le débat surréaliste de la rentrée politique de cet automne 2013 s’est cristallisé autour du FN et d’hypothétiques configurations du second tour, à mille lieues des préoccupations économiques et sociales des Français.

Je me demande vraiment quelle mouche a piqué la classe politique pour parler autant du Front national ces dernières semaines.

Ce n’est pas le bijoutier de Nice si soutenu par certains puisque Marine Le Pen a tenu le 17 septembre 2013 des propos on ne peut plus raisonnables et tempérés (à savoir, qu’il ne s’agit pas ici de légitime défense et que des passants auraient pour être tués par cette colère certes compréhensible mais qui devait s’exprimer dans le cadre normal de la justice).

Ce n’est pas non plus, comme c’est pourtant l’habitude, la faute des journalistes même s’ils savent que ce marronnier a toutes les chances de faire leurs choux gras dans leurs journaux écrits ou parlés.

Contre le sectarisme

À l’origine, quelques sondages, certes, mais surtout, réalimentant la "flamme", les propos très polémiques de l’ancien Premier Ministre François Fillon le 8 septembre 2013 sur Europe 1/iTélé qui remettait une nouvelle fois sur le tapis l’éventualité d’une second tour entre FN et PS et qui affirmait : « Je conseille de voter pour le moins sectaire » tout en précisant, à la question si un PS pouvait être plus sectaire qu’un FN : « Cela peut arriver, je ne dis pas que c’est toujours le cas, mais ça peut arriver. », remettant en cause la ligne fixée par Jean-François Copé assez dubitatif (interviewé au même moment sur RMC/BFM-TV : « ni FN, ni PS allié à l’extrême gauche de Jean-Luc Mélenchon ».

Les hiérarques du PS ont tout de suite protesté avec véhémence, sur-interprétant ces propos comme un appel à voter pour le FN, tandis que les responsables du FN souriaient avec un air de triomphe modeste, bien amusés d’être malgré eux au centre de cette nouvelle polémique.

Enjeux internes

Bien entendu, la véritable motivation de François Fillon n’était pas de s’adresser au PS, ni au FN, mais avant tout à l’UMP. Depuis un an et demi, la rivalité présidentielle se poursuit entre Jean-François Copé (président mal élu mais reconnu de l’UMP) et François Fillon (candidat déclaré à la primaire de l’UMP prévue en 2016).

Et c’était prévisible : après une position très droitière faite de petits pains au chocolat, Jean-François Copé s’est naturellement recentré depuis janvier 2013 dans un but de rassembler la droite parlementaire et d’en finir avec une impopularité qui l’a noyé dans ses perspectives présidentielles. Il le fait d’ailleurs de manière assez discrète et adroite, mais probablement très efficacement.

Parallèlement, François Fillon s’est, au contraire, excentré, droitisé, afin de tenter de séduire les militants de l’UMP qui sont, en grande partie, très clivés contre la gauche (la motion "La Droite forte" des jeunes Guillaume Peltier et Geoffroy Didier était largement arrivée en tête le 18 novembre 2012).

J’avais déjà envisagé que la rivalité Copé/Fillon n’était en aucun cas une rivalité idéologique entre droite dure et droite modérée mais bien une rivalité de personnes. Pour s’en convaincre, Jean-François Copé a parmi ses proches des modérés, comme Jean-Pierre Raffarin et Luc Chatel tandis que François Fillon a parmi ses lieutenants des personnalités très axées à droite, comme les députés niçois Éric Ciotti et Christian Estrosi.

Tout est donc posture pour l’horizon présidentiel de 2017. Les déclarations très russophiles de François Fillon le 19 septembre 2013 à Moscou devant le Président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine faisaient partie de cette même stratégie de transgression dans le but de présenter un ensemble de réflexions politiques qui a vocation à être original et cohérent.

Les opposants à François Fillon avaient donc le beau rôle de se déclarer étonnés et surpris et de ne pas comprendre les déclarations de l’ancien Premier Ministre sur la comportement qu’il compte promouvoir au sein de l’UMP dans le cas d’un second tour FN/PS. Ni "front républicain", ni "ni-ni". Mais alors, quoi ? le FN ? Mettre le PS sur le même plan que le FN ?

La clef délivrée par François Baroin

Même ses amis se sont inquiétés et ont souhaité une clarification. Seul, François Baroin, le député-maire de Troyes, a expliqué sur RTL le 15 septembre 2013 qu’il était tout à fait exclu que François Fillon puisse voter un jour pour un candidat du FN : « Je sais qu’il ne votera jamais pour quelqu’un du FN et qu’il sera de tous les combats contre l’extrême droite. (…) Je n’ai aucun doute, aucune inquiétude là-dessus. (…) Je le connais, il a fait partie de tous les combats. C’est vingt ans de politique. (…) En 1998, ça secouait très fort. L’UMP n’existait pas. C’était le RPR. Il y a eu des alliances [avec le FN, aux régionales], on a sanctionné des gens. Mais pour monter au créneau, on n’était pas nombreux : il y avait Jacques Chirac, Philippe Séguin, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy, François Fillon et moi. ça a permis de tenir. Et je ne l’oublie pas. ».

Tout en gardant silence quelques jours, François Fillon avait cependant intégré cette déclaration de François Baroin dès le lendemain dans son propre blog, si bien qu’on peut dire sans trop avoir peur se tromper que c’était la bonne interprétation.

Lors du comité politique de l’UMP le mardi 17 septembre 2013 au matin, François Fillon confirmait en effet qu’il ne voterait jamais pour un candidat du FN. Il l’a expliqué publiquement quelques heures plus tard : « J’ai expliqué à mes amis que j’avais combattu le Front national toute ma vie et que je n’avais pas l’intention de changer de position. J’ai toujours combattu les alliances avec le Front national et je les combattrai toujours. À titre personnel, jamais je ne voterai pour un candidat du Front national ! J’ai appelé à lutter contre tous les sectarismes, parce que c’est ennemi du redressement national. (…) Si nous voulons appeler à un rassemblement, nous devons nous adresser à ceux qui aujourd’hui sont tentés de voter pour le Front national, aussi à des hommes et femmes de gauche qui peuvent à un moment se retrouver autour d’un projet de redressement national. ».

Montagne et souris

Mais alors, à quoi cela a-t-il servi ? À rien d’un point de vue intellectuel, puisqu’on revient à la case départ, à savoir que le choix de l’UMP dans un second tour FN/PS resterait bien soit le PS soit l’abstention si le candidat PS n’était pas acceptable (imaginons la présence d’un Jean-Noël Guérini par exemple).

Tout cela pour rien ? Non, pas vraiment. François Fillon sait, comme la plupart des communicants (et en particulier Nicolas Sarkozy qui n’a jamais hésité à user du double langage), qu’il en restera toujours quelque chose parmi les militants droitiers de l’UMP et chez certains électeurs du FN : qu’il a fait un pas vers eux, tout en restant "clean" vis-à-vis de la classe politico-médiatique.

Inspiré essentiellement par les convictions très fortes et sociales de Philippe Séguin, François Fillon est donc en train d’étonner par sa souplesse intellectuelle, enfin, je parle de souplesse, mais c’était plutôt qu’il est décevant par sa "mollesse" de conviction : Jacques Chirac et Alain Juppé n’ont jamais, eux, malgré certaines circonstances électorales, failli à cette fermeté. Pourtant, ils étaient partis de bien loin, en septembre 1983, lorsque l’alliance entre le FN et le RPR était parvenue à battre la liste de gauche à Dreux dans une élection partielle.

Le FN poussé involontairement par ses adversaires

Ces nombreux mouvements de va-et-vient depuis le début du quinquennat de Nicolas Sarkozy en 2007 sont évidemment contreproductifs. Ils donnent raison idéologiquement au FN et une grande moitié des sympathisants de l’UMP ne trouverait d’ailleurs pas ridicule une alliance UMP/FN (irréaliste vu les profondes divergences sur la politique économique et européennes). Cette banalisation renforce bien sûr le FN avec cette maxime : "on préfère l’original à la copie".

Comme ce n’est pas l’objet ici, je passerai sur les arguments de fond concernant le FN et pourquoi il est nécessaire, à mon avis, de le combattre dans tous les cas (ce sera l’objet d’un autre article). Mais c’est clair que l’argument des socialistes est lui aussi complètement contreproductif. Cela ne suffit pas de dire comme François Hollande le 15 septembre 2013 sur TF1 : « La question ne se pose pas ! ». Quand un parti vaut autour de 18%, la question se pose toujours de savoir soit pourquoi on veut l’isoler électoralement, soit pourquoi autant de personnes sont susceptibles de voter pour lui.

Sans doute que le premier critère, ce serait de ne pas prendre les Français pour des demeurés, de ne pas leur mentir, comme parler de « pause fiscale » quand le contribuable a pu juger sur pièce (avis d’imposition) à quel point il est "matraqué" fiscalement (les 1,2 à 1,6 millions de nouveaux assujettis à l’impôt sur le revenu, essentiellement des personnes à bas revenus, pourront d’ailleurs apprécier à sa juste valeur cette expression complètement découplée de la réalité) ou alors évoquer l’inversion de la courbe du chômage en août 2013 quand le nombre de "cessations d’inscription pour défaut d’actualisation" a plus augmenté que n’a diminué le nombre de demandeurs d’emploi inscrits (lire le bulletin officiel du 25 septembre 2013).

C’est bien le problème dans ce duo convictions/ambitions : les ambitions doivent servir des convictions, sinon, ce n’est que carriérisme et arrivisme.
À ce titre, François Mitterrand (14 ans) et Jacques Chirac (12 ans) ont fait fort puisqu’ils ont passé la plupart de leur carrière politique à grimper et lorsqu’ils sont arrivés au sommet de la pyramide, ils n’avaient pas grand chose à proposer sinon, dans les faits et malgré quelques actes symboliques, que de l’immobilisme. Jacques Chirac est cependant resté dans les faits ferme contre l'extrême droite même s'il n'avait pas hésité à stigmatiser certains immigrés pour se positionner électoralement : « Comment voulez-vous que le travailleur français qui habite à la Goutte-d'or où je me promenais avec Alain Juppé il y a trois ou quatre jours, qui travaille avec sa femme et qui, ensemble, gagnent environ 15 000 francs, et qui voit sur le palier à côté de son HLM, entassée, une famille avec un père de famille, trois ou quatre épouses, et une vingtaine de gosses, et qui gagne 50 000 francs de prestations sociales, sans naturellement travailler ! Si vous ajoutez à cela le bruit et l'odeur, eh bien le travailleur français sur le palier devient fou. Et il faut le comprendre, si vous y étiez, vous auriez la même réaction. » (Orléans le 19 juin 1991).
François Hollande semble être également de la farine à convictions molles. (À ce titre, peu de personnes pourraient contester que Nicolas Sarkozy avaient des convictions à l’Élysée, qui étaient discutables dans certains cas mais qui avaient au moins le mérite d’exister).

Le PS, mal placé pour donner des leçons de morale

Si la cloison d'étanchéité entre l’UMP et le FN n’a pas encore été rompu électoralement, c’est clair que c’est déjà le cas idéologiquement. Mais le PS est loin d’être bien placé pour faire la morale à l’UMP sur ce sujet.

L’ancien directeur adjoint de cabinet de François Mitterrand avait en effet reconnu que l’Élysée avait demandé en début 1984 à Antenne 2 d’inviter régulièrement Jean-Marie Le Pen à l’émission "L’Heure de vérité" animée par le journaliste François-Henri de Virieu, ce qui a permis au FN d’avoir un large écho médiatique qui s’est immédiatement traduit par l’élection de 10 députés européens FN le 17 juin 1984. Le choix très politicien de la proportionnelle intégrale pour les législatives du 16 mars 1986 a également largement bénéficié au FN qui a pu créer un groupe parlementaire de 35 députés.

Bien plus récemment, aux dernières élections législatives, les responsables locaux du PS du Vaucluse (en particulier le président du conseil général), qui n'ont pas été exclus, auraient apparemment tout fait (selon "L’Express" du 28 mai 2013) pour faire élire la jeune Marion Maréchal-Le Pen (à 22 ans), petite-fille de Jean-Marie Le Pen et nièce de Marine Le Pen. Cette aide tacite (en faisant maintenir la candidate du PS contre les directives nationales de son parti) avait pour but un retour d’ascenseur de la part du FN pour conforter un député PS. En clair, s’il y a eu, pour des élections essentielles (législatives), des accords locaux entre le FN et un parti gouvernemental, c’est bien avec le PS et pas avec l’UMP. Qu’on se le rappelle !

Marion Maréchal-Le Pen, une rivale potentielle…

Une parenthèse d’ailleurs à propos de Marion Maréchal-Le Pen : son élection pourrait être interprétée comme l’enracinement sur du très long terme de la famille Le Pen et donc, du FN. La carrière politique de Jean-Marie Le Pen ayant duré cinquante-cinq ans (1956-2011), même si, à 86 ans, il recommencera (selon toutes les probabilités électorales) un nouveau mandat de cinq ans au Parlement européen, celle de Marine Le Pen (45 ans), commencée en 2002, a toutes les chances de durer autant, ainsi que celle de Marion Maréchal-Le Pen, la plus jeune députée de l’histoire de toutes les républiques, commencée en 2010, si bien qu’on peut imaginer que la famille Le Pen soit en mesure d’occuper l’espace politico-médiatique encore une bonne cinquantaine d’années, au moins jusqu’en …2062 !


Au contraire, une autre interprétation pourrait proposer l’idée non pas d’un renforcement mais d’un germe possible de division. L’élection de Marion Maréchal-Le Pen, si elle prenait un peu plus d’envergure médiatique (et était introduite dans les sondages de popularité), elle pourrait à terme se poser en rivale (légitime) de sa tante pour le leadership de leur entreprise familiale, avec quelques différences idéologiques (Marion Maréchal-Le Pen paraît bien plus conservatrice que Marine Le Pen dans certains domaines, notamment sur des sujets de société). Fin de la parenthèse.

À l’UMP, un jeu parfois trouble

Ce qui vient d’être dit précédemment (à savoir la compromission de certains cadres du PS dans des alliances incertaines avec le FN) n’exclut pas que l’UMP, depuis Nicolas Sarkozy, souhaite jouer sur les deux tableaux, d’une part, en adoptant une opposition électorale sans réserve au FN (qui le lui rend bien), d’autre part, en épousant parfois ses propres thèmes en pensant récupérer ses électeurs.

Par exemple, rien de plus inquiétant de retrouver, parmi les 35 propositions pour la France de François Fillon (présentées le 24 juillet 2013), celles concernant l’immigration, demandant un blocage législatif de l’immigration chaque année, remettant en cause le droit du sol et (surtout), une exclusion de certains étrangers (pourtant cotisants) aux prestations sociales : « Parce que chacun doit faire ses preuves, je propose de réserver l’accès aux prestations sociales aux migrants légaux présents depuis plusieurs années sur notre territoire. » sans préciser d’ailleurs le nombre d’années.

Vers un rassemblement des centristes ?

C’est cette ambiguïté qui a de quoi inquiéter les électeurs modérés de l’UMP et leurs alliés. C’est ce qui a fait dire sur France 3 au député-maire centriste de Drancy, Jean-Christophe Lagarde, secrétaire général de l’UDI, juste avant la séance des questions au gouvernement du 17 septembre 2013 : « Et nous en avons un peu assez des hésitations de nos partenaires. ».

Sans doute le combat contre le FN sera clairement le marqueur des alliances électorales à droite et au centre, un point de rassemblement entre UDI et MoDem qui feront des listes communes aux élections européennes du 25 mai 2014 et un point qui pourrait être de divergence au sein de l’UMP. La question pourrait précipiter la réunification des centristes, non seulement l’UDI et le MoDem mais également le pôle centriste au sein de l’UMP, médiatiquement et politiquement quasi-inexistant.

Le 16 septembre 2013, l’ancien Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin avait même tweeté ainsi son angoisse : « Alerte rouge. Le vote FN est une ligne de fracture pour l’UMP. C’est notre pacte fondateur qui est en cause. » et, malgré le comité politique d’apaisement du 17 septembre 2013, il renouvelait ses craintes et ses menaces sur BFM-TV le 19 septembre 2013 : « Si le parti de l’UMP choisissait une voie qui n’est pas la mienne, naturellement je le quitterais. S’il y avait cette logique de droitisation, si on devait revenir à une logique d’une droite bipolaire, il est clair que ma place serait d’être au centre. » (je l’avais même "rêvé" dès… avril 2008, et cela avait fait grand bruit à l’époque !).

Mauvais débat pour 2014

Pourtant, toute cette agitation médiatique autour du FN et de ses éventuelles alliances électorales n’a pas beaucoup de raison d’être en septembre 2013. En effet, il n’est pas question, pour l’instant, d’élections au scrutin majoritaire uninominal à deux tours qui sont les seules capables d’apporter des duels entre PS et FN.

Les deux élections majeures qui préoccupent aujourd’hui la classe politique (sans compter les sénatoriales de septembre 2014), ce sont les élections municipales des 23 et 30 mars 2014 et les élections européennes du 25 mai 2014.

Pour les européennes, la question n’a aucun sens puisqu’elles sont à la proportionnelle intégrale à l’échelon de grandes régions. Donc, chaque parti a vocation à se présenter sous sa propre couleur et sans alliance douteuse puisqu’il n’y aura pas de second tour.

Pour les municipales, le mode de scrutin semble sortir complètement de l’esprit des commentateurs de la polémique de ces dernières semaines : pourtant, la probabilité de se retrouver dans la configuration d’un second tour FN/PS est quasi-nulle. En effet, le scrutin est un mélange de proportionnelle avec prime majoritaire dans la répartition et de majoritaire à deux tours.

La liste qui a obtenu plus de 50% des voix au premier tour a gagné l’élection, et si aucune n’a obtenu la majorité absolue, alors seules, celles qui ont obtenu au moins 10% des suffrages exprimés peuvent rester au second tour. Ce mode de scrutin existe depuis mars 1983, il n’est donc pas nouveau (mais cela semble sortir des considérations). En clair, il est très peu probable qu’une liste PS ou qu’une liste UMP fasse moins de 10% au premier tour dans une commune. Par conséquent, même si une liste FN parvenait à se maintenir au second tour (il est probable qu’elles seraient nombreuses dans ce cas-là), il y aurait toujours une liste UMP et une liste PS au second tour. Donc, un choix possible pour les électeurs.

La question pour plus tard

Donc, la question d’un duel FN/PS ne se posera pas en 2014.

Elle se posera plus aisément dans le cas des futures élections départementales (nouvelle appellation des cantonales) de mars 2015 et des futures élections législatives de juin 2017 (ou plus tôt en cas de dissolution).

Mais certains cas ont déjà eu lieu depuis juin 2012 à l’occasion de quelques élections législatives partielles. Or, les cas où le candidat du FN s’est retrouvé en duel au second tour, c’étaient uniquement les cas où il affrontait un candidat UMP mais jamais un candidat PS.

Avec la poursuite de la chute de popularité du Président François Hollande (en septembre 2013, un sondage a indiqué une chute de 5points soit seulement seulement 23% qui lui font confiance), et malgré tous les talents de communication pour faire croire à une inversion de la courbe du chômage alors les emplois dans le secteur privé ne cessent d’être détruits, il y a de fortes chances pour que la plupart des éventuels duels de second tour avec le FN se fassent en présence d’un candidat UMP et pas PS.

Enfin, il y a toujours de la part des personnalités politiques une certaine prétention et surtout, une certaine propension à l’infantilisation à vouloir donner des consignes de vote à leurs électeurs entre deux tours : ils sont bien plus adultes qu’on ne le croit et sont suffisamment "éclairés" pour faire leur choix en conscience.

Qu’en restera-t-il de ce buzz finissant ?

Probablement la banalisation du Front national en tant que parti comme les autres.

Avec une audience entre 15 et 20% de l’électorat, il serait difficile d’interdire le FN. Il aurait fallu le faire lorsqu’il n’était que groupuscule, avant 1982 par exemple, comme le fut "Ordre nouveau" le 28 juin 1973 (la loi du 10 janvier 1936 permet en effet au gouvernement de dissoudre des organisations politiques susceptibles de troubler l’ordre public). Mais l’enracinement électoral et local du FN depuis trente ans montre à l’évidence qu’il n’est pas un groupe armé et que ce parti répond à toutes les conditions classiques de la vie démocratique.

La "doctrine" de l’UMP est donc passée ce 17 septembre 2013 du "ni-ni" (qui avait pris place dès mars 2011 au "front républicain") à : "ni sectaire, ni extrémiste". Si l’honneur est sauf, d’un point de vue moral, la polémique a sans doute renforcé la conviction d’une majorité des sympathisants de l’UMP de nouer des alliances locales UMP/FN pour battre la gauche. En ce sens, et même s’il le réfute, François Fillon aura fait bouger les lignes… dans le mauvais sens, même si lui-même se sent moralement irréprochable.

Heureusement, il existe encore des personnalités, au sein de l’UMP, comme Nathalie Kosciusko-Morizet ou Bruno Le Maire, qui n’hésitent pas à rester clairs sur ce sujet, et qui sont devenues les cibles du FN comme le fut en son temps l’honorable Bernard Stasi qui n’hésitait pas à casser les idées reçues : « Réveillons-nous, citoyens, sortons de nos torpeurs, et marchons pour construire, autrement que par le verbe, cet insaisissable vivre ensemble. » (janvier 2007).

Avec un PS qui nie la réalité fiscale et sociale et qui refuse de combattre le FN sur le seul champ des arguments politiques par une sorte d’évidence morale de moins en moins évidente pour le corps électoral et une UMP qui a de plus en plus de mal de résister aux pressions de leurs militants sur les idées du FN et même, le cas échéant, à ses sirènes électorales si tentantes, le FN et ses hiérarques ont toutes les raisons de sourire. À moins que…

Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (27 septembre 2013)
http://www.rakotoarison.eu

Pour aller plus loin :
Le PS a choisi le FN au second tour dans le Vaucluse (28 mai 2013).
Fillon et ses 35 propositions pour la France (24 juillet 2013).
Fillon et le FN (17 septembre 2013).
François Baroin le 15 septembre 2013.
François Fillon.
François Baroin.
François Hollande.
Bernard Stasi.
Marine Le Pen.
Le Front national et son programme.
Législatives partielles, la dérive vers le FN.
Front républicain ?
Double jeu ?

http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/le-syndrome-bleu-marine-141452