Sylvain Cathala Trio
Paris. Le Sunset.
Mercredi 25 septembre 2013. 20h30.
Sylvain Cathala : saxophone ténor
Pierre Durand : guitare électrique
Franck Vaillant : batterie
Tous les musiciens de ce trio sont compositeurs et improvisateurs. Le concert est enregistré et fera l’objet d’un album « Live au Sunset ».
« Si vous avez des portables vous pouvez les couper mais, pour le reste, faites comme d’habitude » nous lance Sylvain Cathala. C’est une bonne façon de lancer le public dans le live. Pour qu’un enregistrement en concert fonctionne, il ne suffit pas que les musiciens soient chauds. Il faut que le public le soit aussi.
Concours de bruits entre les grincements de la guitare, les chuintements du sax, les frottements de la batterie. Chacun cherche à sonner le plus étrange possible. C’est le genre Nocturne dans un château des Carpates hanté. Le magma sonore s’organise petit à petit. L’ambiance reste sombre et crispante. C’est voulu et obtenu. Ca monte en puissance, devient une sorte de rock avec le batteur qui martèle. Trop simple. Ils partent aussitôt sur autre chose pour y revenir. C’est du jazz : ni carré, ni binaire. Il n’y a pas de basse pour donner des repères. C’est écrit puisqu’il y a des partitions. L’ambiance dans la salle n’est pas rock. Le public écoute attentivement. C’est qu’il faut les suivre, ces gaillards. Fin sèche.
Pierre Durand commence seul en douceur, avec un petit air léger, entraînant. Le trio repart sur une fausse chansonnette. C’est plus dense, profond, complexe qu’une chansonnette. Cela devient hypnotique, incandescent avec la batterie et la guitare qui tournent en boucle derrière le solo de sax. Le discours s’allège tout en restant dense. Belle énergie. Ca chante tellement qu’il n’y a pas besoin de chanteur. Fin nette. C’était « Woup, woup » (titre SGDG) de Franck Vaillant puis « Rome antique » ou « Romantique » selon l’interprétation de l’auditeur, de Pierre Durand, une création mondiale.
« White house » (Pierre Durand). Pierre commence seul avec ce vibrato qui me plaît tant. Ca ressemble à du Blues. Pas besoin d’être Noir, Américain, pour jouer le Blues. Enfin, ce n’est pas un Blues traditionnel tout de même. Le trio démarre. Ca dépote, nous secoue virilement. Les prises de bec du sax répondent aux envolées de la guitare, le tout malaxé par la batterie. Un jeune couple s’en va. Lui resterait bien mais elle n’aime pas. Il faut savoir sortir seul parfois. C’était un hommage à Weather Report, Jimi Hendrix et aux Black Keys (nom du groupe SGDG).
Un clin d’œil de Pierre Durand à la folk song music. Solo de guitare planant, éthéré au possible. Libre comme le vent sur les grandes plaines. Le trio part tout doucement. La berceuse devient un chant enflammé, passionné. Fort jolie ballade.
« It must be a barracuda » (Franck Vaillant). Dialogue énergique et subtil entre batteur et guitariste. Ca frotte, mord, tripote. Le sax ténor s’ajoute. C’est bien un barracuda. Ca vous mord et vous dévore. Ca devient calme à tout coup. Le barracuda s’est-il fait limer les dents ? Le fluide sympathique circule entre ces trois hommes. Crescendo groupé vers le final. Ca le fait. La flamme monte puis s’éteint subitement. Applaudissements.
PAUSE
« Gloomy » (titre SGDG), composé par Franck Vaillant. Première mondiale. Ce morceau a été composé pour un orchestre qui ne l’a pas encore enregistré. Ca attaque ferme. Ca vibre, vrombit férocement.
Ah tiens, ils enchaînent comme les Américains ! En général, les Jazzmen américains enchaînent sans cesse, afin de ne jamais faire tomber la tension (l’attention) alors que les Français semblent se chercher entre les morceaux. Grondement des tambours, son délicieusement mordant de la guitare, le sax ténor prolonge. Il y a come une tension douce dans ce morceau. D’ailleurs, voici un nouveau crescendo. Le fluide circule aussi bien entre les musiciens au deuxième qu’au premier set. Pierre Durand sait aussi faire un son de basse et Franck Vaillant tient la baraque. Stop. C’était « Aspiracoeur » (Franck Vaillant).
Pierre Durand commence seul un bon bourdonnement. Comme un mantra. Nous voici partis de Paris au Tibet. Et sans Tintin ! C’est amusant l’électronique. Cela permet au guitariste de produire ces sons en boucle. La pulsation de la batterie et l’attaque du sax ténor viennent perturber cette paix. La guitare en remet une couche. Le chant de la guitare s’élève en flamme, comme un fagot dressé en forme de tipi, alimenté par le sax et la batterie. Ausax de mener la danse poussé par ses partenaires.
Il est bientôt 23h. Le marchand de sable est passé, j’ai école demain et, pour ce soir, ai pris ma dose d’intensité. Le concert se finit donc ici pour moi. J’aurai plaisir à réécouter cette musique à froid, dans quelques mois, quand l’album « Live au Sunset » du trio de Sylvain Catahala sortira. Pour les Bas Normands, ce trio est en concert à Alençon, dans l'Orne ce soir.
N'ayant ni son ni image de ce nouveau trio à vous proposer, lectrices curieuses, lecteurs fureteurs, voici le trio habituel de Sylvain Cathala (sax ténor) avec Sarah Murcia (contrebasse) et Christophe Lavergne (batterie) jouant " Constantine ", composition inspirée par un séjour en Algérie.