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Des sénateurs pas si sages

Publié le 26 septembre 2013 par Rolandlabregere

Ça s’est passé dans la nuit de mercredi 18 à jeudi 19 septembre. Encore une séance qui illustre une fois de plus les cadences stakhanovistes auxquelles sont soumis les sénateurs. Sans chichis, entre gens de bonne compagnie, les sénateurs ont adopté, une série d'amendements leur laissant la possibilité de garder un mandat local – maire, président(e) de conseil général ou régional. Les élus du Palais du Luxembourg, main dans la main gauche main dans la main droite, veulent bien du projet de non-cumul des mandats mais pour les autres élus uniquement. Ceux qui ne sont pas sénateurs, le tout-venant de la République en quelque sorte. Même en comptant les prolongations, le score est sans appel. Les élus des territoires aiment les bonnes majorités. Les amendements déposés par plusieurs groupes ont été retenus par 211 voix pour et par 83 contre.

Que disent les sénateurs les plus attachés à leur prébende et leur statut avantageux ? Les argumentaires dévoilent des postures autocentrées portées par un vocabulaire ampoulé et alarmiste. François Zocchetto, président du groupe centriste, prédit que le non-cumul entraînera « un Parlement monolithique peu représentatif des Français ». Un autre se décrit comme cerné par les critiques d’une juste représentation : « Depuis des mois, vous clouez au pilori des milliers d'élus vitupérés dans les médias comme cumulards, sous-entendu goinfrés de privilèges et d'indemnités ». Jean-Pierre Chevènement, quant à lui, voit le projet de loi comme « un texte pervers et profondément antirépublicain ». 

Les refrains en défense de soi-même, de son panache à être à la fois partout tout en n’étant en même temps visible nulle part, à se parer des attributs du surhomme multi-compétent exerçant au moins  trois emplois à temps plein, acharné au travail porté par une vision unique de l’intérêt général ont bousculé les rituels oratoires de la Haute Assemblée. C’est qu’il s’agit de se défendre face à un projet de loi qui vise à clouer « au pilori des milliers d’élus ». Jacques Mézart, RDSE (Rassemblement démocratique et social européen) veut maintenir la possibilité du cumul dont la suppression pourrait mettre en jeu « l'équilibre des institutions de la République et le principe même du bicamérisme ». Robert Hue, ex-candidat communiste à la présidentielle use de l’oxymore et qualifie le texte de « révolution conservatrice » qui porte un projet « extrêmement dangereux, avec l'impossibilité pour les élus issus du terrain d'accéder à la tribune parlementaire ». Ils excellent tous à mettre en avant le plafonnement de leurs indemnités oubliant de marmonner que les fonctions non électives échappent à toute limite. Pierre Merle, sociologue des inégalités, rappelle que le régime spécial de retraite  des parlementaires « est emblématique d'un système qui tend à favoriser les favorisés». Un député ayant accompli deux mandats peut ainsi obtenir à 62 ans (et en dix ans) « sans décote, une pension de retraite de 2400 € mensuels qu'un professeur du secondaire n'obtiendra qu'après 41 ans de travail et à 65 ans... ». [Le Monde, 27/O8/2013]. Rien ne laisse supposer que les avantages des sénateurs seraient inférieurs à ceux des députés. Le rapporteur socialiste du projet de loi, les élus communistes et écologistes ont tenu bon face à la bronca des conservateurs de leurs propres privilèges.

 Les sénateurs ont ajouté une autre position à leur tropisme cumulard. Celle qui consiste à cumuler les bévues. Ceux qui se complaisent dans le ravissement d’être nommés des Sages sont en vérité de sacrés margoulins.


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