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Look at me

Publié le 26 septembre 2013 par Paulo Lobo
Look at me
Elle n'était pas là, elle me regardait de façon mécanique, comme si tout lui était égal, moi ou un autre, quelle importance? Je parlais, je discourais sur Godard et l'état du monde, j'expliquais le film d'Antonioni, je citais Pessoa, elle semblait m'écouter, mais je voyais bien qu'elle s'ennuyait, de temps en temps elle émettait une remarque ou une question brève, cela suffisait à me relancer, mon flot de paroles ne tarissait pas, je voulais absolument garder un lien avec elle, qui était si belle, si formidablement composée, je me sentais béni du ciel de sa compagnie, les phrases n'étaient qu'un prétexte, ce qui m'importait c'était l'instant, le face à face, oui l'écran devant moi... J'étais fasciné, d'autant plus qu'elle était distante et déconnectée, elle n'esquissait aucun signe de bienveillance, ne manifestait aucun zeste de communion d'esprit, elle était là par obligation, par un concours de circonstances, sans m'avoir choisi, sans m'avoir cherché ou désiré, moi Edouard Allen, le seul et unique à être revêtu de ma peau, de mon regard, de ma pensée... Comment faire pour éveiller ne serait-ce qu'une once infime de son intérêt? Je me disais que c'est ainsi que des idées de braquage de banque surgissent dans la tête des honnêtes gens, simplement parce qu'on veut plaire à une espèce de femme fatale, pour elle, je pense que je pourrais me transformer en bandit au grand coeur, c'est peut-être ça qu'elle attend de moi, que je me dépasse, que je la surprenne, que je rentre dans son monde de fantaisie, que je sois audacieux, bon sang, et pas seulement volubile! Autour de nous, il y avait des gens, qui bavardaient entre eux, qui buvaient leur café, leur bière, nous étions parmi eux, l'heure avançait, le moment de lui dire au revoir, fallait que je trouve une idée, vite, vite, je la perdrais pour toujours, alors je me suis mis à chanter, oui comme dans le film de Demy, j'ai commencé à chanter mes phrases, avec grand talent, je devais avoir en moi un peu de Legrand, et soudain, comme une éclaircie, je la vois qui sourie, elle sourie! Je suis heureux, partons ensemble braquer une banque, main dans la main, tu seras ma Bonnie et je serai ton Clyde!

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