Ils n’ont pas perdu de temps ! A peine la fatigue de ma fête d’anniversaire dissipée, je reçois la convocation pour le dépistage systématique du cancer du sein, une mammographie prise en charge à 100% tous les deux ans et réservée aux femmes de 50 à 74 ans. Impossible donc d’oublier que je suis passée de l’autre côté de la force.
J’ai donc ouvert l’enveloppe avec curiosité : qu’y a-t-il dans cette lettre ? Comment incite-t-on les femmes à participer au programme ? L’information est-elle claire, honnête, expliquant les bénéfices et les risques du dépistage afin que chaque femme puisse prendre une décision éclairée.
Sur la première feuille : quatre phrases laconiques vous demandent de vous rendre dans un centre agrée (dont la liste est jointe), on vous explique que ça ne vous coutera rien (sauf les éventuels examens complémentaires !), on vous dit que votre mammo sera relue par un second radiologue et enfin si vous ne vous rendez pas au dépistage, afin d’éviter d’autres courrier, il vous est demandé de cocher une case expliquant pourquoi ….
Puis est joint un dépliant trois feuillets de l’INCa qui parle de certains sujets qui fâchent mais sans les nommer : sur-traitements et faux négatifs. Enfin on vante les mérites de ce programme en reparlant de la deuxième lecture, le plus indéniable par rapport au dépistage individuel.
Pas mal, mais est-ce que si je n’étais pas autant concernée, je serais allée jusqu’à lire le petit dépliant ? Inquiète face aux polémiques, aurais-je compris toutes les explications ? Toutes les femmes sont-elles en mesure d’intégrer ces informations alors qu’elles ne font référence à rien de précis? Ce joli leaflet rose m’aurait-il convaincue d’aller me faire presser les nichons par un appareil digne des instruments de torture moyenâgeux alors que je me sens en pleine forme !
L’INCa a le mérite d’essayer de répondre à la plupart des interrogations mais peut être pas de façon optimale. Face à une adhésion au dépistage bien en deca des espérances, ne devrait-on pas aller plus loin, en employant et explicitant les mots utilisés par les détracteurs, en osant parler de la polémique et démontant les arguments un par un ? … Bref en appelant un chat un chat. Pas facile, je vous l’accorde et parler des contres leur donnerait corps. Cela supposerait qu’on les a lu, ce serait leur donner de l’importance. Il n’en reste pas moins qu’il ne faut pas pratiquer la langue de bois et ne pas prendre les femmes pour des cruches. Qui n’a pas lu ou entendu les anti-mammo ?
A l’aube d’octobre rose où nous allons être inondées de publicités, émissions et autres palabres sur le dépistage il me semble qu’il est nécessaire de revoir un peu sa copie et de parler sans tabou. Parlons du dépistage, mais pas seulement en le célébrant. Oui, il a des défauts, alors parlons en clairement. Des freins existent : peur d’avoir mal, pas le temps, je ne me sens pas concernée… Pourquoi ne pas les énumérer et les démonter un par un ? Enfin il me semble important d’associer d’avantage le médecin traitant et/ou le gynécologue au processus de décision. Il y a donc encore quelques ajustages à faire afin de permettre aux femmes de s’y retrouver.
Pour ma part, je vais répondre à ce courrier en cochant la case « j’ai été diagnostiquée d’un cancer du sein » et le ranger dans mes dossiers ! Dernière petite question, je suis née en aout et je le reçois à la veille d’octobre rose, hasard ?J’attends donc maintenant celui pour le dépistage du cancer du colon pour mars bleu peut-être … mais ça c’est une autre affaire !
Catherine Cerisey