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Moi, Caravage

Publié le 25 septembre 2013 par Gjouin @GilbertJouin
Moi, CaravageThéâtre des Mathurins36, rue des Mathurins75008 ParisTel : 01 42 65 90 00Métro : Havre Caumartin / Auber / Saint-Lazare
Une pièce de Cesare CapitaniD’après La Course à l’abîme de Dominique FernandezMise en scène de Stéphane GrassianAvec Cesare Capitani et, en alternance, Laetitia Favart ou Manon Leroy
Le sujet : Un fascinant autoportrait en clair-obscur de l’artiste maudit placé sous le signe du double et ponctué, comme dans un rêve éveillé, par des chants a cappella (Monteverdi, Guesualdo, Grancini)… « Un homme qui se raconte, se montre à nu : un rebelle promis à l’autodestruction, un éternel insatisfait affamé de scandales, un artiste perpétuellement à la recherche de l’absolu, mais aussi un être fragile, séduisant, troublant, comme els personnages qu’il a représenté dans ses toiles » (Cesare Capitani)
Mon avis : Cette pièce est le résultat d’une rencontre : celle d’un acteur avec un livre et un personnage. Fasciné autant par l’œuvre incandescente que par la vie tumultueuse de Michelangelo Merisi, dit Le Caravage, Cesare Capitani l’a vu se matérialiser dans l’ouvrage de Dominique Fernandez, La Course à l’abîme. Dès lors, il savait comment se l’approprier et le faire revivre sur scène. Moi, Caravage dépasse le théâtre. Lorsqu’on assiste à la prestation de Cesare Capitani, on ne parle plus de jeu mais d’incarnation tant il est habité par son héros. On ne sait plus lequel a vampirisé l’autre. Capitani EST Caravage, poussant le mimétisme jusqu’à lui ressembler. La chevelure de jais, dense et bouclée, le regard de braise et le sourire carnassier… nous sommes dans l’assimilation totale, dans le réalisme le plus impressionnant. Le jeu de Capitani est tellement passionné, exalté même que, dès les premières minutes, on oublie que nous sommes aux Mathurins tant nous sommes happés par cette interprétation quasi possédée.
Pour un acteur, Caravage est le type-même du personnage idéal par la richesse et la complexité de son caractère. C’est un aventurier. Hugo Pratt eût fait de son existence fiévreuse et tourmentée une magnifique BD. L’homme était fier, violent, jusqu’au-boutiste, entier, passionné, provocateur et, surtout, totalement pénétré de son talent insolent.Pendant près d’une heure et demie, Capitani nous empoigne et nous embarque à bord d’une felouque folle et nous empêche de mettre pied à terre. On sait dès le départ que l’on finira inéluctablement échoué sur une plage fatale. Caravage était aussi flamboyant qu’il était autodestructeur. Il était né rebelle, il ne pouvait pas rentrer dans le rang. Il ne pouvait avoir qu’un destin hors norme.
Moi, Caravage
La vie du Caravage est tellement romanesque, tellement trépidante, tellement folle qu’on ne voit pas le temps passer. On oublie qu’il y a un comédien devant nous. Les jeux de lumières éclairent la scène comme on éclaire un tableau. La lueur des bougies reproduit les ambiances claires-obscures des toiles du peintre. Et puis il y a la partenaire de Cesare Capitani qui joue tous les autres rôles qu’ils soient féminins ou masculins, qui accompagne de douces mélopées les pages les plus marquantes de la vie de Michelangelo Merisi et, surtout, qui sait mettre en exergue la beauté morale du personnage de Mario. Elle apporte un petit côté tragédie grecque qui sied parfaitement au climat de la pièce.En quittant les Mathurins, on n’a qu’une hâte : allumer son ordinateur et se (re)plonger dans l’œuvre du Caravage pour retrouver certaines des toiles que Capitani a évoquées devant nous en les décrivant et en les dessinant dans l’espace.
Avec la force du jeu de Cesare « Caravage » Capitani on en viendrait presque à croire en la réincarnation…
Gilbert "Critikator" Jouin

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