Avec la crise de 2008, où les responsabilités du système financier étaient apparues clairement, on pouvait penser que les excès les plus criants, les injustices les plus fortes allaient prendre fin. Pourtant, 5 ans après on constate qu'il n'en est rien. Les profits des plus riches augmentent de plus en plus, les bourses sont reparties à la hausse de plus belle, et aujourd'hui comme hier, les actionnaires continuent à imposer leurs règles sur le marché du travail.
C'est que depuis 2008, une machine diabolique s'est mise en marche, ou plutôt, a accéléré sa mise en place, puisqu'elle existait déjà et avait à maintes reprises dans le passé prouvé son efficacité. Cette dernière consiste à fabriquer des écrans de fumée pour éviter de s'attaquer aux racines du mal : les banques et la finance. Elle se développe en trois périodes, trois pièges qui n'ont pour unique but que de détourner la légitime colère populaire.
Le premier piège consiste à répéter sans cesse, sur tous les médias, sur tous les temps, que la politique d'austérité est la seule possible, que nous n'avons pas le choix, il n'y a pas d'autres alternatives que celles qui consistent à aller toujours plus loin dans la logique des marchés, dans la déréglementation de toutes les règles économiques. C'est le TINA anglais, le fameux "There is no alternative". Ce discours de résignation a un effet direct sur la population, c'est la vague de pessimisme que l'on connaît et qui nous rend tristes et angoissés. C'est bien connu, le pessimisme ne pousse jamais à la rébellion.
A ce discours vient s'ajouter la deuxième phase, celle du tout sécuritaire. En effet, si le politique a baissé les bras devant le monde économique, s'il a abandonné toute vélléité de le contraindre à respecter des règles qui prennent en compte le bien-être social ou environnemental, il lui reste un domaine pour faire croire qu'il peut encore agir : c'est la sécurité. Ainsi, la peur est agitée sans cesse, les propos se font de plus en plus durs, les lois de plus en plus restrictives. Il faut montrer que l'on est encore capable d'agir pour le bien commun, mais attention il y a une loi d'airain à ne jamais enfreindre : aucune loi sécuritaire ne doit marcher, les peurs doivent pouvoir continuer à être exacerbées, sinon le politique se trouvera de nouveau confronté aux seules questions économiques, ce qu'il ne peut accepter, à moins de reconnaître son impuissance dans ce domaine.
La troisième phase vient prendre sa place naturellement. En effet, tout discours sécuritaire nécessite qu'il y ait un ennemi à combattre, un bouc-émissaire à qui l'on peut attribuer cette insécurité. Cet ennemi, c'est forcément l'étranger, celui qui n'est pas comme nous et qui nous veut forcément du mal. Et pour que cette haine de l'autre devienne un puissant écran de fumée faisant oublier les questions économiques, il faut que ceux qui agitent la peur de l'étranger soient crédibles. Pour cela, on leur déroule le tapis, on crédibilise leurs thèses, on les invite partout.
Ainsi, du gouvernement à l'extrême-droite, des médias aux milieux économiques, c'est toute une formidable mécanique qui se met en place et qui n'a qu'un seul objectif : protéger les principaux responsables de la crise, à savoir les banques.