Il est l’auteur de l’une des icônes de l’art de la première moitié du XXe siècle : « Nighthawks » (1942, ci-dessus).
L’artiste américain Edward Hopper (1882 -1967) nous plonge dans l’univers des films noirs des années 1940 – « Office at night » (1940) ou « Conference at night » (1949) évoquent « Le Faucon Maltais » ou l’univers de Fritz Lang. Le lien d’Hopper avec le cinéma est celui de l’esprit du temps plus qu’un regard de cinéaste. L’artiste a vécu le développement des movies palace, qu’il fréquentait assidûment., mais dont il ramenait des visions marginales, comme les usherettes, les placeuses à qui il était interdit de regarder le film en cours si elles étaient de service. La placeuse de « New York Movie » introduit ainsi des scenarios imaginaires au cœur de cette toile aussi riche dans ses possibles narrations qu’essentielle dans sa composition.
Edward Hopper, c’est aussi une certaine New York (visible dans la vidéo ci-dessus) aujourd’hui en grande partie disparue, avec ses échoppes de quartier, bâtiments à quelques étages que les grands buildings sont venus majoritairement remplacer. C’est dans le quartier de Greenwich Village, à Washington Square, qu’il vécut de 1913 à sa mort en 1967. Dans «Early Sunday Morning », c’est un ancien bâtiment – déjà ancien lorsqu’il le peint – à deux niveaux, d’échoppes et d’appartements, 7th Av. 15 Street W, qu’il choisit de représenter… hors de son contexte urbain – car il est flanqué de deux autres bâtiments bien plus élevés à peine suggérés par l’ombre d’une tour à l’arrière plan sur la droite – et loin de toute velléité documentaire, puisque sur la toile, le bâtiment est plus long que dans la réalité.
Compression, synthétisation sont les maîtres-mots de la composition selon Hopper. Ses «Bedrooms» sont un sujet récurrent dans son œuvre, à la fois allégories du regard de l’artiste sur le monde, du voyeur qu’est le spectateur. Ces figures solitaires, dans une pièce où parfois un tableau est accroché au mur, regardant par la fenêtre… c’est la réflexion sur le fait d’être au monde, d’exister. La fenêtre est aussi une forme de tableau du monde, ainsi une fois encore, tant de narrations possibles s’invitent au cœur de cet univers d’apparente solitude. Il se dégage de ces toiles une mélancolie rêveuse, existentielle ? A la question que recherche-t-il dans ses peintures, l’artiste répond « moi-même ».
Pour voir Edward Hopper, une référence : le Whitney Museum of American Art à New York. Non seulement la sculptrice et héritière du magnat des chemins de fer Cornelius Vanderbilt, Gertrude Vanderbilt Whitney, en fut une collectionneuse, mais le musée qu’elle crée en 1930 se verra offrir en 1970 quelque 2000 œuvres – toiles, dessins, aquarelles et gravures – de la veuve de l’artiste ! Cela tombe bien, le musée lui dédit actuellement – et jusqu’au 8 octobre encore – une magnifique exposition sous le titre «Hopper Drawing» et nous introduit dans le processus créatif de l’artiste en présentant les séries de dessins préparatoires de et aux côtés de ses peintures. L’exposition – comme le catalogue, également très bien conçu du point de vue des illustrations comme des contributions, comme ce n’est pas toujours le cas, cela vaut la peine de le souligner – révèle un grand maître du dessin, une main sûre et met à nu le processus d’observation, de sélection qui aboutit à ces peintures figuratives aux formes géométriques où la lumière est à la fois projecteur de cinéma et présence physique.
Si vous êtes dans la grande pomme ces prochaines semaines, une exposition à ne manquer sous au un prétexte, un vrai coup de cœur de votre serviteur !
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INFOS PRATIQUES :
Hopper Drawing
Jusqu’au 8 octobre 2013
Commissaire : Carter E. Foster, Curator of Drawing
Whitney Museum of American Art
945 Madison Avenue at 75th Street
New York NY 10021
(212) 570-3600
http://whitney.org/