23 septembre 2013
La critique de Claude :
Ce livre est un ouvrage historique universitaire, obéissant aux règles de l'art : raisonnements rigoureux, citations, notes en référence. En devient-il un peu austère ? Peut-être. Il faut passer aussi sur quelques erreurs d'orthographe, comme sur d'autres livres à faible tirage, mais la somme d'informations contenue mérite quelques sacrifices, d'autant plus que le sujet a été rarement traité.
Ce qui frappe dans cette thèse est la faiblesse des effectifs de la Gendarmerie à la mobilisation de 1914 : pas plus de 25.000 militaires, contre 100.000 aujourd'hui. Beaucoup, d'ailleurs, sont vieux, et peu formés (nombre de gendarmes ne sont pas des sous officiers, mais des hommes de troupe).
Dès la fin juillet, la Gendarmerie va jouer un rôle essentiel dans la mobilisation, énorme machine qui a très bien fonctionné. On ne comptera que 1,22% d'insoumis, contrairement aux prévisions pessimistes ; les hommes inscrits au Carnet B (anarchistes, antimilitaristes, etc.) rejoindront leur lieu de mobilisation. Et, sur les quatre ans de guerre, il n'y aura que 80 à 90.000 arrestations de déserteurs.
Dans la durée, les gendarmes, dont les éléments les plus jeunes peuplent les Prévôtés (Services de police militaire) doivent continuer à couvrir par leurs brigades tout le territoire national, menacé par les espions infiltrés. Dans la zone des Armées, ils sont responsables de la circulation, parfois cruciale, comme entre Bar le Duc et Verdun, où circulent en camions 20.000 hommes et 2000 tonnes de matériel par jour. A eux aussi les enquêtes ou la surveillance des prisonniers allemands.
Quand, en 1917 surtout, la colère des troupes déborde, les gendarmes, qualifiés de " cognes", sont au contact, pour faire barrage aux désertions. Il en résultera un fossé durable entre troupes de ligne et gendarmerie, mais beaucoup moins de violences qu'on ne l'a dit. Après guerre, les gouvernements refuseront aux gendarmes des Prévotés la délivrance de la Carte du combattant, sauf preuve de présence en unités combattantes.
Georges Clemenceau, toujours lucide, va, dès le début de 1918, moderniser la Gendarmerie par la formation et l'organisation. C'est le début d'une évolution qui en a fait l'un des outils essentiels de l'Etat.
La grande guerre des Gendarmes, "Forcer, au besoin, leur obéissance ?" : ouvrage issu de la thėse de Louis-N. Panel, aux Editions Nouveau Monde, 610 p. 26 €