REVIEW - Deuxième soir de festival dans le jardin Roussy de la Tour-de-Peilz. L’affaire a tourné en catastrophe avec l’annulation des têtes d’affiche: Junip (José Gonzalez) et Bombino.
Le duo veveysan de Cédric (Buvette) à la batterie et Luca (Solange La Frange) à la guitare ouvrit la deuxième journée de cette édition de la Nox Orae avec un rock bruyant et psychédélique. Par moments, WTF Bijou livrent des mélodies punk-blues en vitesse et, par d’autres, ils accumulent une masse sonore impressionnante et forte grâce à des loops superposés de guitares et de bruit (distorsion plus delay…).
Ce fut le tour, ensuite, à Aurélie Émery de captiver le public (qui arrivait encore de façon timide et émiettée) avec ses morceaux sombres qui paraissaient émaner de leur propre obscurité. Les tonalités nocturnes des chansons de la valaisanne -orchestrées avec une contrebasse, guitare et batterie- renvoyaient à une énergie mystérieuse, celle des flux et des marées, du cycle féminin et de celui de la lune. Il y a quelque chose de médiéval et d’épique dans son interprétation, de même qu’une quête constante de la lumière depuis la rive opposée. Entre folk rock et électro (Émery se plait à jouer avec des boucles de guitare et de voix), la suissesse se laisse aller dans une gymnastique vocale surprenante qui n’est sans rappeler Björk, lors des moments plus calmes, et PJ Harvey, quand elle sort ses griffes. Celui-ci fut un concert énigmatique qui laissa le public muet et consterné pendant un bon moment.
Enfin, les suisses de Roy and the Devil’s Motorcycle continuèrent la soirée avec leur envolée psychédélique de guitares répétitives qui construisent un groove au mid-tempo. Avec des influences comme le Velvet Underground ou Spacemen 3, le groupe bernois joue sur un terrain qui arrive à attraper avec les premiers morceaux, mais qui fini par lasser vers la fin. Leurs chansons planantes vont bien pendant un moment, mais après celui-ci, il serait parfait qu’ils enchainent sur des virées plus noise ou sales, à la Suicide ou à la Jesus and Mary Chain. Or l’ennui va être vite balayé par la grosse surprise de la soirée.
Alors que Bombino se prépare pour jouer, le vent se lève. Les rafales se font chaque fois plus violentes. La pluie commence à se déverser comme si le monde allait finir, à l’horizontale, en plus. Les vagues du lac arrivent aux pieds du festival, à 10 mètres du bord. Le public fuit, les quelques petites tentes mises ici et là par le festival faillirent s’envoler: c’est la catastrophe. L’organisation évacue les lieux pour des raisons de sécurité et les concerts suivants, Bombino et Junip, sont annulés. Le public n’est pas content. Pas du tout, la plupart ont payé leur billet de ce soir pour venir voir les têtes d’affiche, dont le groupe de José Gonzalez. Les musiciens venus de loin se contentent d’une fête improvisée en backstage au lieu de jouer. Le festival s’excuse publiquement par la suite, en indiquant qu’ils ne pouvaient pas prévoir une telle averse, et qu’ils ne rembourseront point les billets, les forces de la nature les ayant surpassés…