En ce moment je me régale en lisant des mangas un peu plus adultes, ou en tout cas abordant des thèmes un peu plus travaillés que des combats de sabre ou des créatures surnaturelles. Je pense que ma phase shonen est passée et que j'aspire désormais à lire des choses d'avantage recherchées. Ces premiers volumes de quatre mangas différents n'ont à peu près rien en commun si ce n'est leur univers sombre et faisant quelque part réfléchir à l'évolution de notre société.
Ikigami -1, écrit et dessiné par Motorō Mase.
Celui-ci est peut être le plus engagé en terme de thème puisqu'on découvre dans Ikigami une uchronie très proche de notre monde où, cependant, la taille de la population est contrôlée par un procédé à la fois ingénieux et macabre. En effet, lors de la jeune enfance, tous les individus sont inoculés avec un sérum mais seulement une fraction d'entre eux est mortel. Arrivé à l'âge adulte, ceux qui ont reçu le sérum létal sont informés de leur mort imminente pour se préparer psychologiquement et dire leurs adieux. C'est notre héros principal qui est chargé de ces annonces. Ikigami n'est pas un manga d'action, mais plus une réflexion sur la mort et comment chacun l'aborde différemment. Nos vies jusqu'à l'instant fatidique de savoir si oui ou non le sérum était létal nous a conditionné, nous avons construit notre personnalité, nos familles nous ont influencées, nous nous sommes liées à des personnes. Tout ça change la façon qu'à la personne qui découvre qu'elle va mourir dans les 24h de se comporter. C'est réellement intéressant. Ce premier volume donne quelques exemples bien distincts et où le seul point commun est cet homme, nouveau dans le système et qui aimerait comprendre ce qu'il fait. Fujimoto essaye donc ce comprendre comment fonctionne l'Ikigami et on découvre à travers ses yeux l'apparente infaillibilité du système. C'est effectivement une machine bien huilée qui ne semble pas pouvoir être perturbée. Impossible de savoir à l'avance la date de sa mort. L'information est dévoilée 24 plus tôt et rien ne peut changer cela. J'ai apprécié que l'auteur prenne le temps d'expliquer ce qu'il a conçu et de nous donner clairement les règles de l'Ikigami. Je me doute que la suite mettra en scène des histoires où la perfection de ce système sera remis en question. Ikigami est un manga vraiment passionnant que j'ai dévoré très rapidement. L'histoire n'est pas très rapide et on passe beaucoup de temps avec des personnages qui ne sont pas le personnage principal et qui finissent inéluctablement par mourir, victimes de la sélection. Ce manga aborde en tout cas un thème très intéressant et qui nous fait nous confronter à notre propre mortalité. Que ferions-nous si on venait nous dire que nous n'avions plus que 24h à vivre ?
I am a Hero -1, écrit et dessiné par Kengo Hanazawa.
Ce second manga est un peu à part dans cette sélection car c'est en réalité une histoire de zombies, en tout cas ce volume en est l'introduction. Seulement, I am a Hero n'entre pas directement dans le vif du sujet et prend le temps d'installer son héros, ce garçon terriblement normal, légèrement décalé et qui n'aspire qu'à réussir en tant que mangaka. Au fil des pages on découvre le quotidien d'Hideo, différents aspects de sa personnalité et on apprend surtout qu'il n'est pas le jeune homme le plus stable. Sans même prendre la peine de nous expliquer pourquoi, l'auteur met en scène tout un panel de personnages improbables autour d'Hideo qui sont simplement des visions pour la plupart assez glauques. Cela donne un ton particulier à la narration car Hideo n'est au final jamais vraiment seul. L'aspect zombiesque de l'histoire n'est à vrai dire qu'abordé dans les toutes dernières pages du volume où un évènement vient bouleverser à jamais la vie d'Hideo. Impossible de savoir ce que l'avenir réserve sans lire le second volume cependant et j'ai rarement vu un cliffhanger aussi haletant dans un manga, malgré le fait qu'il soit sacrément prévisible. J'ignore si il y avait un désir de garder le mystère mais, connaissant le thème du manga, j'ai trouvé sans peine les indices semés en cours de route pour nous annoncer l'évènement final. En terme de dessin, I am a Hero est le plus soigné des quatre mangas dont je parle dans cet article. Le soin apporté aux décors est époustouflant et le travail au niveau des trames est tout simplement splendide. Les différents personnages sont très expressifs, principalement Hideo qui malgré son côté légèrement désagréable par moment, parvient à devenir amusant, voir même attachant. Même ce qui m'a le plus charmé dans ce manga, c'est le naturel qui s'en dégage. On a pas l'impression de lire une fiction, on a plutôt l'impression d'être un voyeur dans la vie d'un garçon. Contrairement à la plupart des mangas, I am a Hero enchaine les scènes plutôt embarrassantes pour les personnages, n'hésitant pas à les mettre sur les toilettes ou même suggérer sans détour des relations sexuelles. Cela donne une vraie consistance à l'histoire et renforce la crédibilité du tout. Cette normalité est d'autant plus judicieuse car on s'y habitue au fil des pages et même les quelques visions d'Hideo passent tranquillement. Seulement, lorsque le surnaturel rapplique, c'est beaucoup plus puissant. I am a Hero est mon coup de cœur de cette sélection.
Bakuon Rettō -1, écrit et dessiné par Tsutomu Takahashi.
Ce troisième manga a été à vrai dire une surprise à la lecture. J'avais commandé une flopée de bouquins en même temps et je ne me souvenais plus vraiment de quoi parlait Bakuon Retto. Ce n'est qu'en lisant les trente première pages que je me suis souvenu que l'histoire parlait en réalité d'un adolescent propulsé au milieu du monde des yakuzas et des motards. Et cette surprise à la lecture s'est rapidement transformée en un plaisir insoupçonné. Bakuon Retto met en scène Takashi dans le Tokyo de 1980, un jeune garçon en apparence inoffensif qui nous est présenté comme un garçon à problèmes, retiré de son lycée précédent par ses parents après avoir reçu des avertissements pour trainer avec des jeunes douteux. Désormais propulsé dans une toute nouvelle école, Takashi fait rapidement la rencontre Komiya et se retrouve intégré à un groupe de jeunes aspirants yakuzas, prêts à tout pour servir leurs ainés et intégrer le groupe le plus prestigieux. Commence alors une initiation qui va bouleverser la vision qu'à Takashi sur la vie et le début de son amour pour la moto. Je ne pensais pas autant aimer ce manga. J'ai pourtant été passionné par cette histoire inattendue. Ce qui m'a le plus interpelé, c'est l'originalité du héros. Non pas que Takashi soit un personnage jamais vu, non, il est plutôt l'archétype du gamin paumé, incompris par ses parents et surtout catégorisé comme un jeune à problème alors qu'il essaye simplement de trouver sa place. Non, ce que j'ai aimé c'est que physiquement Takashi est complètement improbable ! Sa transformation m'a époustouflé. Je ne m'attendais clairement pas à ce genre d'évolution, aussi rapidement, aussi habilement bien fait. Graphiquement, Bakuon Retto est le plus agréable à lire des quatre mangas dont je parle ici car l'auteur a un style assez sauvage, brut, qui correspond à la perfection à l'histoire et apporte un dynamisme obligatoire dans une histoire de motos. Les personnages ont des styles tout à fait différent, et j'ai particulièrement aimé les multiples physionomies qui font que pas un seul personnage ne ressemble à un autre, ou même à ceux qu'un autre manga. Bakuon Retto est le manga le plus excitant de cette sélection et probablement celui dont j'ai le plus hâte de lire la suite.
Tokyo Yamimushi -1, écrit et dessiné par Yūki Honda.
Et pour finir, le premier volume de Tokyo Yamimushi. Là encore un manga dont j'avais oublié l'histoire et que j'ai redécouvert en le lisant. C'est peut être le manga que j'ai le moins aimé des quatre mais pourtant je lui trouve certains aspects super sympa. C'est l'histoire de Kato, un jeune de vingt-trois ans, sans emploi et endetté jusqu'au cou, qui se voit proposer une nouvelle vie, un travail et l'opportunité d'effacer sa dette. Mais ce travail c'est celui d'un criminel, un homme de main qui devra exécuter les ordres sans discuter. J'ai trouvé cette histoire assez dure dès le départ. Sans vraiment d'explication on nous présente un garçon au bord du gouffre, à la vie ruinée alors qu'elle ne vient que de commencer. Même si c'est génial de commencer dans le vif du sujet, un peu de background sur Kato aurait été le bienvenue. C'est probablement quelque chose qui sera exploré par la suite mais cela m'a un peu manqué lors de ce premier volume. L'histoire est assez linéaire, la narration n'est pas spécialement originale, mais la dureté du thème suffit à rendre le manga très prenant. L'intrigue avance assez rapidement et Kato se retrouve au coeur de l'action rapidement, sans même comprendre se qu'il se passe. J'ai aimé cet aspect de l'histoire, d'être propulsé dans un monde sombre, violent et inconnu. Kato doit obéir aux ordres pour rembourser sa dette mais prend rapidement goût à ce nouveau style de vie, même s'il est conscient que c'est le début d'une descente aux enfers. Au niveau du dessin, j'ai trouvé que c'était le moins bon des trois, après un manga classique, un hyper soigné et un sauvage, Tokyo Yamimushi est un cran en dessous. Malgré ça, les personnages ont du caractère. Cependant, le personnage principal, Kato, manque parfois de consistance dans son design et s'il n'était pas seul au centre de l'histoire ça générait pas mal. Le style pseudo réaliste est intéressant mais un peu hésitant pour le moment, j'espère que le style sera meilleur dans la suite de l'histoire. Tokyo Yamimushi est un manga sympathique mais qui, avec son seul premier volume, ne me permet pas de vraiment apprécier l'histoire. Je compte acheter la suite pour affiner mon avis sur cette série.
(je n'ai pas réussi à trouver d'images de Tokyo Yamimushi...)